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La loi sur le secret professionnel n'est pas encore en application

31/05/17
La loi sur le secret professionnel n'est pas encore en application

La loi sur le secret professionnel a été votée le 4 mai dernier : les travailleurs sociaux sont maintenant contraints de dénoncer les "indices sérieux" d’une probable action terroriste. Elle sera applicable dès le 1er juillet prochain.

Après des mois de combat, la proposition de loi visant à faciliter la lutte contre le terrorisme a été votée le 4 mai dernier. Un coup dur pour les professionnels du milieu social et le secret professionnel. Dès le 1er juillet, les travailleurs sociaux devront dénoncer au Parquet les indices d’une potentielle infraction terroriste. De plus, ils peuvent aussi dénoncer la fraude sociale. Au final, cette loi incite le travailleur social à se questionner sur sa pratique, et de façon encore plus générale, sur le but de son métier. La Fédération des CPAS a fait le point sur la situation actuelle et sur ce qu’il reste à venir.

Quid de l’entrée en vigueur ?

Le texte adopté doit être soumis à sanction royale et devra ensuite être publié au Moniteur belge. Ce n’est qu’à dater de cette publication que nous pourrons vous préciser la date d’entrée en vigueur, le législateur ayant prévu celle-ci « le premier jour du deuxième mois qui suit celui de sa publication ». Si la loi devait être publiée en mai, elle serait donc d’application au 1er juillet. Aujourd’hui, cette loi n’est donc pas encore d’application, contrairement à certains échos qui nous reviennent du terrain !

Et quant au contenu de cette nouvelle loi ?

Nos interrogations sont toujours aussi nombreuses et ce ne sont pas les débats à la Chambre qui nous permettent d’y voir plus clair, au contraire.
[...]
Bref, après avoir entendu les débats de ce 4 mai et lu les avis du Conseil d’Etat, selon nous, la loi votée nous semble loin d’être limpide au niveau juridique.
[...]
Pourtant, l’auteure de la proposition de loi estime quant à elle que, « cette proposition de loi crée une base légale et claire pour la rupture du secret professionnel, ce qui profite également à la sécurité juridique ».
[...]
De notre côté, voici quelques-unes de nos interrogations, résumées rapidement :

 Notion d’institution de sécurité sociale : les CPAS sont visés mais dans quelle mesure (pour quel public) ? La loi fait référence à deux législations : celle de la banque carrefour et de la charte de l’assuré social, la portée de l’une et de l’autre diffère pour les CPAS. Quid ?

 Qui doit communiquer les renseignements demandés : les institutions de sécurité sociale ou n’importe quelle personne (de l’institution de sécurité sociale) interpellée par le Procureur ? Un alinéa précise que c’est l’institution qui communique et un autre que la personne qui refuse de communiquer sera punie pénalement… Le fonctionnement du CPAS (régionalisé) ne peut être nié. Ces alinéas doivent être lus à la lumière de la loi organique. Comment concilier la nouvelle loi et la loi organique ?

 Que recouvre la notion de « renseignement administratif » ? Le Conseil d’Etat avait précisé que « compte tenu du principe de légalité en matière pénale, mieux vaudrait définir plus précisément la notion de ‘renseignements administratifs’ », d’autant plus que les développements de la proposition de loi ne sont pas tout à fait dépourvus d’ambiguïté à cet égard. Rien n’a été modifié entre l’avis du Conseil d’Etat et l’adoption de la loi…

 Il faut répondre aux renseignements que le Procureur « juge nécessaires » : sans aucun esprit critique ? Et si, a posteriori, le renseignement demandé n’est pas considéré comme « administratif », qui en portera la responsabilité ?

 Notion d’« indices sérieux d’une infraction terroriste » reprise dans l’obligation de dénonciation : faut-il une infraction déjà commise ou des éléments qui permettent de penser à une infraction terroriste future sont-ils aussi visés ? Bref, la loi permet-elle de dénoncer de manière préventive ?

 Toute personne qui, du chef de sa fonction, a connaissance de la mesure ou y prête son concours, est tenue de garder le secret. Quid par rapport à la hiérarchie ? Le travailleur doit-il aussi garder le secret dans ce cadre ?

 Dans le paragraphe 3, certaines données médicales sont exclues (données médicales à caractère personnel au sens de la Charte). Les CPAS accordent des aides médicales urgentes pour lesquelles de nombreux éléments doivent être communiqués au SPP IS. Toutes ces données transmises peuvent-elles (ou non) être dénoncées ?

Et maintenant ?

Le Ministre de l’Intégration sociale a réaffirmé lors des débats qu’ « une circulaire explicative sera bientôt communiquée aux CPAS »

Et du côté des Fédérations de CPAS ?

Les différents Comités directeurs des Fédérations se sont réunis les 18 et 19 mai. En ce qui concerne le volet fédéral du dossier (modification du CIC, lutte contre le terrorisme, etc.), une concertation doit encore avoir lieu avec nos homologues bruxellois et flamands pour apprécier les actions qui pourraient être menées. Nous pouvons déjà vous annoncer que du côté de la Fédération des CPAS wallons, des démarches seront entreprises au niveau régional. Depuis le début nous soutenons en effet que ce dossier a aussi une connotation régionale (ou communautaire) dès lors qu’il touche au fonctionnement des CPAS.

Nous vous tiendrons informés des suites de la concertation.

Mari-Claire Lodefier.

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