Témoignage : " Maggie De Block, c'est du chiffre ! "
Rosa (nom d’emprunt) côtoie des demandeurs d’asile déboutés quotidiennement dans son centre d’accueil. Elle est écœurée par les méthodes de Maggie De Block, la secrétaire d’État à l’Asile et à l’Immigration. Confidences.
Lire notre dossier : La politique de Maggie de Block jugée plus restrictive par de nombreuses associations
Comme tous les autres, le centre d’accueil où Rosa travaille a été mis sous la tutelle de la secrétaire d’État à l’Asile et à l’Immigration depuis décembre 2011. Et pour cette professionnelle du secteur, la politique mise en place fait beaucoup de dégâts.
Une politique du chiffre
En ce qui concerne les chiffres, il n’y a rien à redire. Maggie De Block bat tous les records. On constate une baisse importante au niveau des demandes d’asile et, le budget alloué à la politique de l’Asile et l’Immigration a été réduit. Pour Rosa, c’est clair, cela contribue pour une grande partie à la popularité de madame De Block. « Elle fait du chiffre et ça plaît. Il y a de moins en moins de demandeurs d’asile. En période de crise économique, c’est ce que les gens veulent entendre. Mais à quel prix ? »
Du personnel tiraillé entre résidents et autorités
Sur le terrain, le quotidien des assistants sociaux, des éducateurs, des infirmiers mais également des conseillers juridiques actifs dans le secteur de l’accueil, n’est pas à envier.
« On nous demande de faire de l’accueil, mais à côté de ça, c’est à nous d’annoncer les mauvaises nouvelles aux résidents et, c’est nous qui en subissons les conséquences directes. Certains réfugiés parlent carrément de suicide et vu les antécédents, ce n’est pas quelque chose à prendre à la légère. Quand on est dans un rôle d’accueillant, ce n’est pas logique de devoir amener les demandeurs d’asile au bûcher... », déclare Rosa.
La loi accueil prévoit de parler un maximum du retour volontaire à tous les demandeurs d’asile. Pour ce faire, des centres de retour ouverts, gérés par l’Office des Étrangers et Fedasil, existent afin de sensibiliser les réfugiés à ce retour volontaire. Par contre, quand tous les recours ont été épuisés, les personnes célibataires sont envoyées dans un centre fermé, les familles quant à elles se retrouvent en maison de retour. Cette procédure passe par une convocation. La personne convoquée doit alors se présenter à l’Office des Étrangers, afin de recevoir cette décision et, ensuite, être emmenée en maison de retour ou en centre fermé. Si, néanmoins, la personne manque à l’appel et refuse de quitter le centre d’accueil, ce dernier doit en informer l’Office des Étrangers. À ce moment, l’Office prévient la police pour escorter la personne ou la famille illégale jusqu’à un établissement de retour.
Bien souvent dans telle situation, c’est le personnel d’accueil qui est le maillon entre les décisions de l’Office et les résidents.
« Les réfugiés sont poussés à l’illégalité »
« Il existe en fait deux types de retour : celui volontaire qui est donc une décision de la personne de rentrer au pays et celui forcé, qui est imposé par les autorités. Dans le cas de retour forcé, un laisser-passer du pays de retour doit être accordé. Si ce n’est pas le cas, la Belgique ne peut expulser la personne. On constate alors que certaines de ces personnes reçoivent quand même un petit bout de papier avec ordre de quitter le territoire... Elles tombent dès lors dans la clandestinité et deviennent des SDF », explique Rosa.
Certes, depuis l’entrée en fonction de Maggie De Block à l’Asile et à l’Immigration, la crise de l’accueil a été résolue. Les demandeurs d’asile ne vivent effectivement plus à la rue et ne sont plus envoyés dans des chambres d’hôtel à cause de manque de place dans les centres. « Par contre, beaucoup d’illégaux qui vivaient auparavant dans les centres sont aujourd’hui mis à la rue, sans aucune ressource et poussés à l’illégalité. Ils ne sont pas prêts à rentrer au pays car ils savent la situation trop dangereuse. Ils refusent donc le retour volontaire mais aucune solution n’est envisageable pour eux. En gros, c’est une impasse », raconte encore Rosa.
Elle ajoute : « De plus, j’ai l’impression qu’aujourd’hui, les conditions pour obtenir une régularisation sont laissées volontairement floues afin qu’un minimum de personnes y aient droit. C’est devenu un privilège. L’équipe du centre et moi-même savons d’avance que les personnes qui introduisent une demande n’ont quasiment aucune chance de l’obtenir, même si elles ont une promesse d’emploi, qu’elles parlent le français et que les enfants sont scolarisés. »
L’Europe a son rôle à jouer
Et Rosa de prôner une politique européenne plus forte.
« Il faut créer une politique européenne unie concernant l’immigration. Ce n’est pas normal que certains pays, comme par exemple l’Italie avec l’île de Lampedusa, prennent en charge tous les immigrants qui arrivent sur le sol européen. Il faut se serrer les coudes. C’est trop facile de dire chacun chez soi. Et quid si on vivait une guerre civile dans notre pays. On serait bien content d’être accueilli dans un pays sécure. »
Delphine Hotua
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