" Les psychomotriciens sont parfois vus comme des extraterrestres ..."
Le baccalauréat professionnalisant en psychomotricité n’existe que depuis deux ans en Belgique. La profession peine encore à s’implanter auprès du grand public.
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Aurélie, éducatrice de formation spécialisée en psychomotricité, anime des enfants lors d’activités extrascolaires. Elle met à profit son bagage de psychomotricienne dans toutes ses activités. « On est encore vu comme des extraterrestres. Notre profession reste mystérieuse aux yeux des collègues, regrette-t-elle, l’idée qu’ils se font de la psychomotricité se limite au développement de l’enfant, point. Ils ne l’envisagent pas dans toute sa globalité sur le plan thérapeutique, éducatif, relationnel, corporel ».
L’Union Professionnelle Belge des Psychomotriciens Francophones travaille d’arrache-pied à la reconnaissance de la psychomotricité en Belgique depuis une vingtaine d’années. Avec des victoires : la reconnaissance d’abord du psychomotricien comme l’un des membres de l’équipe paramédicale dans plusieurs secteurs et la mise sur pied il y a deux ans du premier bachelier paramédical en psychomotricité en Belgique francophone, validé par le Ministère de l’Enseignement Supérieur Paramédical. Une belle évolution pour la Belgique jusqu’alors bien à la traîne en matière de formation par rapport à ses voisins européens comme la Suisse ou la France.
« En France, il y a des écoles qui forment à ce métier depuis plusieurs dizaines d’années, il a beaucoup de succès, explique Mathilde, installée en Belgique, la psychomotricité est un métier paramédical reconnu. Le psychomotricien travaille dans une équipe pluridisciplinaire, avec des enfants mais aussi des adolescentes et des personnes âgées, ». En témoigne l’ouverture, dans le cadre du Plan Alzeihmer en 2008, de 1000 nouveaux postes de psychomotriciens dans l’Hexagone. « En Belgique, remarque la professionnelle, on pense encore souvent que la psychomotricité se cantonne aux enfants ». Et d’illustrer son propos : « J’avais postulé comme animatrice dans un centre pour adolescents en Belgique. Mais pour l’employeur, il était inconcevable de faire de la psychomotricité hors des écoles maternelles ».
Une culture à créer
« La psychomotricité est né au même moment en Belgique et en France », rappelle Jean-Pierre Yernaux, président de l’UBPBF et maître d’œuvre de ce grand chantier de reconnaissance, « en France, ils ont eu une opportunité politique de reconnaissance dans les années septante. En Belgique, on a pris une autre voie : développer la psychomotricité au sein des formations déjà existants (psychologie, pédagogie, kiné…) avec la possibilité de spécialisation. On a mis plus de temps pour se reconnaître de façon autonome ». Cela joue-t-il sur la méconnaissance du grand public du métier et le regard parfois suspect posé sur ce métier ? « Il reste une culture à créer autour du psychomotricien », concède Jean-Pierre Yernaux. Il explique : « La psychomotricité n’appartient pas aux psychomotriciens - le concept est intégré dans de nombreuses interventions d’autres praticiens - mais ils ont une pratique spécifique. On a développé la pratique sous l’angle psychomoteur. Certaines institutions ont trop insisté sur le deuxième terme. Or, le psychomotricien n’est pas l’un ou l’autre. Il établit le lien entre le corps et le psychique. Il accompagne l’autre pour qu’il habite son corps consciemment ». Et Jean-Pierre Yernaux de conclure, lucide mais confiant pour l’avenir qu’il reste, à cet égard, « encore un travail d’information à fournir ».
Manon Legrand
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