Chronique d’un psy : « Je ne suis pas belge ?! »

On ne va pas se mentir, cela faisait des semaines que j’éprouvais une démangeaison de plus en plus oppressante. Au fil de l’actualité, ça me lançait, en observant les propos tenus, les comportements posés et les propositions aussi abjectes qu’ineptes émises sans réelle grosse opposition. Ça m’asticotait, grave. Puis, il y a eu la lecture d’un article, une référence à l’exclusion du chômage et des statistiques fournies par la Banque Carrefour de la Sécurité Sociale. Enfin, j’ai découvert, comme tout le monde, la lecture biaisée de ces chiffres. Et cette diagonale – à ce stade, ce n’est plus un biais, ni une légère interprétation – , a provoqué le zona de mon âme, un rash méphitique qui ne pouvait que faire sortir T. Persons de sa retraite.

David… Puisqu’il s’agit de toi… Tu ne m’en voudras pas de te tutoyer, je l’espère. Il ne s’agit pas d’un manque de respect ou d’une absence évidente de révérence liée à mon nouveau statut d’« étranger » dont tu m’étiquettes, et qui m’oblige à ne plus connaître les usages distingués, quand on s’adresse à un Ministre. Non, vois ça plutôt comme une remise en question de ton statut, celui dont tu jouis, là-haut, dans ta petite tour d’Ivoire, déconnecté de tout. Ici, dans cette chronique, malgré ce que tu peux sous-entendre, tu es mon égal. On se tutoie, point.

Il faut peut-être le préciser, ce n’est pas la première fois qu’on se rencontre. À l’époque, t’étais Ministre des indépendants. C’était sympa, t’avais la tutelle de la Commission des psychologues. Bref, rien de juteux, si ce n’est qu’en réunion, tu ne faisais pas la distinction entre un psychologue et un podologue – je vous le jure, ceci est vrai – . À l’époque, on te pardonnait tout, après tout, doit-on réellement savoir à quoi sert un psy quand on est leur Ministre de tutelle ? Non, David, les pieds, ce n’est pas la tête. Cela ne raisonne pas de la même manière, même si, franchement, ça expliquerait peut-être la façon dont toi-même tu ergotes.

Où, finalement, Philippe de Belgique, le roi des Belges, ne serait pas belge...

Soit, revenons à l’essentiel. Selon la manière dont tu transformes la réalité pour la faire coller à la ligne fidèle de ton président de parti, pour ne pas être considéré comme un étranger, il faudrait être issu d’une maman belge et d’un papa belge à la naissance. Les deux, sinon rien. Selon toi, il y aurait trop d’huile d’olive et d’origan dans mes gènes pour le Saint-Graal, la nationalité et l’origine belge. Heureusement, ce scénario n’est sorti que de ta tête et non d’une réalité où, finalement, Philippe de Belgique, le roi des Belges, ne serait pas belge. En soi, une histoire qui serait typiquement belge, mais soit, on s’éloigne du sujet…

David, tu t’es bien rendu compte que c’était trop gros… La société, bien que de plus en plus encline à accepter une rhétorique de fosse septique, n’a pas vraiment digéré le propos. Alors tu rétropédales, un peu. Tu ne vas pas t’excuser. Non, ça, comme dirait Georges-Lou’, c’est exclu. Tu vas dire que c’est à cause des journalistes et puis surtout, tu vas ponctuer ton discours en nous disant que tu t’opposes à toute stigmatisation, et tu nous parles de tolérance. De tolérance ? Peut-on être plus à côté de la plaque ? Tu me fais un peu penser à ce gars qui a marché dans une crotte de chien avant de rentrer chez moi et qui, après s’en être rendu compte et avoir fait le tour du propriétaire, va essuyer ses bottines sur les peluches de mes gosses. David, on ne tolère pas les étrangers, on les accueille, on les nourrit, parce qu’on sait qu’ils vont nous nourrir à leur tour de mille et une façons. On cultive la différence, parce qu’elle est une source de richesse inépuisable. Nous sommes tous égaux, peu importe nos origines. C’est un point de vue que tu devrais défendre, plutôt que de le piétiner.

En conclusion, David, s’agit-il d’une nouvelle bourde ? Ne t’a-t-on pas suffisamment briefé ? Sache-le, la vision de la nationalité que tu prônes où les familles belges s’unissent entre elles, uniquement pour perpétuer leur lignée ne mène qu’à une seule chose : la consanguinité. Vu que tu confonds les podologues et les psychologues, il est de bon ton de ne pas faire de même avec la consanguinité et le code de la nationalité. Lis-le, David, c’est éclairant sur ce qui fait d’une personne un citoyen belge. Il va falloir beaucoup d’humilité pour te sortir de cette situation, et ça commence peut-être par des excuses sincères et une vrai remise en question ou à défaut, une lettre de démission.

T. Persons