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Pour une éducation dégenreante qui dérange !

02/10/19
Pour une éducation dégenreante qui dérange !

« Fais pas ton genre ! ». Tel est l’intitulé d’une nouvelle campagne avec laquelle la Ligue des familles s’engage à bousculer les codes, à déconstruire les stéréotypes liés au genre dans l’éducation, à encourager les familles à éduquer celles et ceux qui deviendront les femmes et les hommes de demain dans un monde que nous voulons plus juste et plus égalitaire.

Carla a 19 ans et lorsqu’elle annonce qu’elle espère ne jamais devenir maman, la plupart de ses interlocuteur.rice.s, sous le choc, deviennent livides avant de lui rétorquer « ça viendra avec le temps ».

Lucas ambitionne de devenir expert make up. Le jeune homme, âgé de 16 ans, a dû changer d’école, victime de la violence des autres jeunes pour qui la vue d’un garçon portant du fond de teint était de nature à les « heurter ». « Mais ça dérange qui que je m’assume ? Je n’enlève rien à personne ! »

Pino est instituteur maternel depuis 30 ans. Il se sent à sa place depuis son entrée dans la profession. Pourtant, quand l’affaire Dutroux a éclaté, il a senti se poser sur lui le regard empoisonné de la suspicion… « Mais que fait un homme avec une carrure de rugbyman toute la journée avec des petits de 4 ans ? ».

Le point commun entre ces trois protagonistes ? Celui d’être des héroïnes et des héros du quotidien, refusant de se soumettre à un rôle défini par une société qui, même si elle donne le sentiment d’avoir évolué, garde des relents patriarcaux collés à ses semelles comme un vieux chewing-gum.

Commencer par se questionner soi-même

En préambule, il nous semble essentiel de rappeler la différence entre « sexe » et « genre ». Selon l’OMS, « Le mot sexe se réfère davantage aux caractéristiques biologiques et physiologiques qui différencient les hommes des femmes. Le mot genre sert à évoquer les rôles qui sont déterminés socialement, les comportements, les activités et les attributs qu’une société considère comme appropriés pour les hommes et les femmes ».

Enfermé.e.s dans un rôle qu’on leur a assigné dès leur naissance, voire avant, comment faire en sorte que nos enfants deviennent les acteurs de changement pour plus d’égalité dans le monde de demain ?

De la naissance à l’âge adulte, adoptons-nous un mode d’éducation différent selon que notre enfant est une fille ou un garçon ?

Nos enfants sont-ils/elles entouré.es de stéréotypes au sein de la famille, de l’école, du monde professionnel ?

Les représentations proposées par notre société dans les manuels scolaires, les livres, les jouets, la publicité ne sont-elles pas chargées de clichés en la matière ?

Ne les incitons-nous pas à choisir leurs loisirs sportifs et culturels et leur futur métier en fonction de leur sexe et du genre qui leur a été assigné à leur naissance ?

Le mythe de la princesse râleuse et du soldat fortiche

Il paraît que les filles sont plus sensibles, plus douces, dotées de moins de force physique… Les garçons, quant à eux, sont plus turbulents, plus fonceurs, plus agressifs…

Nombreux sont les parents qui pensent que ces rôles sont une réalité, qui estiment que le comportement, la capacité et l’aptitude de leur enfant seraient même liés au déterminisme de la génétique. C’est dire s’il est temps d’induire un changement de mentalités !

Hélas, les études convergent : les modèles d’identification proposés aux filles manquent cruellement de valorisation et de diversité. Leur estime de soi est altérée par les images que leur renvoient les médias et la publicité notamment. À l’âge adulte, elles sont moins nombreuses à s’engager dans des fonctions à responsabilité et dans les filières scientifiques.

Quant aux garçons, ils se retrouvent également prisonniers de leur nature masculine : ils doivent se montrer solides en toutes circonstances et ne pas se laisser submerger par leurs émotions. Ils sont dès lors moins nombreux à s’engager dans les métiers du social, du service à la personne et leur présence est moins sollicitée dans les activités domestiques.

Elsa est étudiante infirmière en pédiatrie. Elle raconte : « Un papa a sonné pour me dire qu’il fallait changer son fils. Je lui ai demandé s’il avait besoin de quelque chose. Il m’a répondu que je devais le faire car lui ne savait pas et que la maman n’était pas là... C’était son 3ème enfant. »

Et pour les papas qui choisissent de prendre leur place auprès de leur enfant, la confrontation avec les préjugés peut également se révéler brutale : « Quand ma compagne a mis au monde notre enfant, j’ai demandé si je pouvais avoir un lit et rester auprès d’elle. L’infirmière m’a invité à rentrer chez moi et à prendre du repos… Ma femme, qui avait souffert pendant 18h, était censée pouvoir gérer la situation mieux que moi », s’étonne Marc, qui revendique un allongement du congé de paternité.

L’affaire de tous, pour tous, par tous

En matière d’égalité hommes-femme, la plus grande erreur serait de croire que nous avons accompli l’essentiel du chemin. Il n’en est rien ! Nous n’en avons fait que la moitié. Beaucoup de parents pensent pourtant que l’égalité des chances entre les filles et les garçons est acquise et ils sont convaincus d’élever leurs enfants de façon égalitaire.

En notre qualité de parent, nous transmettons à notre enfant les codes nécessaires à son intégration dans la société et c’est sur base de ce bagage qu’il se construit. Et sans en avoir conscience, nous contribuons bien souvent nous-mêmes à la transmission de stéréotypes et des valeurs sexuées que nous jugeons pourtant dépassés.

Briser les stéréotypes

À la Ligue des Familles, nous encourageons les parents à éduquer leur enfant, garçon ou fille, dès le plus jeune âge, de façon à porter un regard critique sur les stéréotypes encore véhiculés par notre société.

Notre objectif n’est pas de prôner une éducation asexuée mais de permettre aux femmes et aux hommes de demain de devenir qui ils veulent en s’émancipant du poids de ces modèles imposés par la société.

Comment ? En proposant aux parents et futurs parents d’offrir à leurs enfants le plus tôt possible l’exemple de personnes adultes qui, au jour le jour, ne se laissent pas emprisonner dans une distribution des rôles sexuée et implacable.

En les invitant à ne plus confiner leur petite fille au rôle édulcoré de princesse et leur petit garçon à celui du puissant et invulnérable petit soldat.
En les encourageant à soutenir leurs enfants dans leurs choix individuels, mêmes s’ils passent pour excentriques aux yeux d’une société qui ne favorise pas assez l’épanouissement personnel.

En les incitant à donner à leurs enfants l’assurance qu’ils.elles possèdent tous les atouts nécessaire à l’exercice de leurs choix, quel que soit le sexe auquel ils.elles appartiennent.

« Le combat pour l’égalité femme-homme a de beaux jours devant lui. Les femmes changent toujours massivement leurs horaires ou travaillent moins pour s’occuper des enfants (62%). Elles assument toujours l’essentiel des tâches domestiques et sont plus nombreuses à subir le poids de la charge mentale. De leur côté, les hommes sont nombreux à réaliser les tâches qui leur sont traditionnellement associées (bricolage, réparation et jardinage) (...) l’égalité progresse... à petits pas », peut-on lire dans notre dernier Baromètre des Parents à la lumière des réponses de plus de 1.300 parents belges.

Informer le public est une première action nécessaire pour briser les stéréotypes et enrayer leur diffusion, voire leur diffusion. Nous lui proposons le « Quiz dégenreant » afin qu’il s’interroge sur ses propres stéréotypes et pratiques éducatives.

Nous en sommes convaincus : le poids de la société et des représentations qu’elle véhicule encore ne doit pas être un obstacle à la découverte de l’identité, des valeurs, des talents d’un enfant, quel que soit son sexe.
Homme ou femme, chacun de nous subit l’influence des stéréotypes de genre et l’un des enjeux actuels est de bousculer les codes pour que notre société ne reste pas figée. Construire un monde plus juste ne doit pas rester une promesse mais devenir une réalité. Il nous faut agir maintenant pour que demain, les femmes puissent être fortes, les hommes fragiles et vice-versa.

Maintenant, à vous de jouer !

Maco Meo

Chargée de campagne

La Ligue des familles asbl



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