Psychomotricité : le procès va enfin commencer !
La Fédération des Etudiants Francophones et l’Union Professionnelle Belge des Psychomotriciens Francophones se préparent à batailler contre la décision de la ministre de la Santé de ne pas reconnaître le diplôme de psychomotricien. Des étudiants, soutenus et financés par les 2 organismes, défendront leurs droits, au civil, à la mi-février 2017.
Contrairement à la psychothérapie, la psychomotricité n’est inscrite dans aucun arrêté. Impossible donc pour la FEF ou l’UPBPF d’introduire un recours devant le Conseil d’Etat ou la Cour Constitutionnelle. Les 2 organismes doivent se contenter d’un simple procès d’étudiants lésés au tribunal civil, bas de l’échelle législative. La FEF attend néanmoins beaucoup de cette démarche. "Si on nous donne raison, ça peut très vite s’emballer, mais ça peut aussi retomber juste après", explique Maxime Mori, président de la FEF. Il revient, pour le Guide Social, sur les éléments clés de ce dossier épineux.
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"Les pouvoirs de la ministre sont impressionnants"
Le procès qui aura lieu à la mi-février sera introduit pas des étudiants en psychomotricité qui se disent lésés. Une démarche initiée et entièrement financée par la FEF et l’UPBPF. Pour Maxime Mori, il s’agit de se battre contre la décision arbitraire de la ministre de la Santé : "Quand Madame De Block a remis sa lette disant "Je déclare la psychomotricité comme étant l’exercice illégal de la médecine", on s’est interrogé sur le caractère légal de sa démarche. Car il n’y aucune manière de contester ou de discuter cette décision. Je m’explique : dans un arrêté, quand les différentes professions sont indiquées, on considère qu’elles sont reconnues. A contrario, toutes celles qui n’y figurent pas sont considérées comme illégales. Comme la psychomotricité n’est pas dans la loi, on ne peut donc rien contester. C’est un vaste problème, car ça donne à la ministre de la Santé un pouvoir impressionnant vu qu’elle n’est pas obligée d’obéir aux avis et décide donc seule de l’avenir d’une profession."
Une profession mise à mal
"Le fait que la profession soit considérée comme illégale entraine que tous les étudiants et professionnels ont des chemins de vie mis à mal. Concrètement, plusieurs praticiens sont en train de se faire licencier des institutions où ils travaillaient. Les étudiants en cours de cursus, quant à eux, sont forcés de recommencer des études. Pour qu’ils ne perdent pas trop leur temps, il faudrait leur donner la possibilité de faire des passerelles. Le problème, c’est qu’en FWB, seulement 5 passerelles sont ouvertes pour la psychomotricité et n’ont pratiquement aucun rapport avec la profession. C’est absurde ", précise Maxime Mori.
Reconnaître avant de former
Le président de la FEF évoque un autre point absurde : "Il aurait d’abord fallu reconnaître la profession et ensuite ouvrir la formation en psychomotricité. Ce qui n’est pas la logique suivie en temps normal. Quand on regarde l’historique des professions paramédicales en Belgique, aucune d’entre elles n’a suivi cet ordre là. Et c’est normal. La formation a d’abord été ouverte, puis la profession a été reconnue. Il faut arriver à déterminer un référentiel de tâches sur le terrain pour ensuite le traduire dans un texte de loi. Il est impossible de théoriser une formation avant que la profession n’ait été exercée. Le problème, c’est que dans le cas de la psychomotricité, cet argument ne tient pas la route. En effet, dans le cursus des autres professions paramédicales, de nombreuses heures de cours sont dédiées à la psychomotricité. Mais la discipline ne figure pas dans le référentiel de tâches, inscrites dans la loi, des kinésithérapeutes, des ergothérapeutes, des orthoptistes, des logopèdes ou encore des infirmiers. Ce qui veut dire que la ministre et le CNPP qui est derrière tout ça reconnaissent le fait qu’on puisse pratiquer la psychomotricité, mais ne veulent pas que la profession soit reconnue à part entière !"
Rétroactes
"En 2012, le Conseil national des professions paramédicales (CNPP) avait rendu un premier avis négatif au sujet de la reconnaissance de la profession de psychomotricité. Il attestait que la discipline était déjà exercée par 5 professions. Le CNPP avait ainsi déconseillé à la ministre de la Santé de l’époque de reconnaître la profession. Malgré cela, un baccalauréat professionnalisant en psychomotricité a été ouvert. Un millier d’étudiants ont déjà leur diplôme et 1.000 autres sont en cours de cursus", rappelle Maxime Mori.
En juin 2016, Maggie De Block, ministre de la Santé, a déclaré ne pas reconnaitre la psychomotricité comme discipline paramédicale. Déjà à ce moment là, la FEF et l’UPBPF étaient les premiers à contester cette décision. En août 2016, la FEF a décidé de mettre laministre en demeure et l’a menacé de procédure judiciaire, toujours soutenue par l’UPBPF qui a, en outre, lancé une pétition. Aucune réaction. Maggie De Block se réfugie derrière l’avis négatif du CNPP. En octobre 2016, la première offensive est lancée : 6 étudiants attaquent l’Etat belge.
En février 2017, une nouvelle offensive devant le tribunal civil aura donc lieu. La FEF et l’UPBPF espèrent que les cursus continuent et que l’exercice de la profession ne soit plus considéré comme illégal. Et ils comptent bien "batailler" jusqu’au bout pour y arriver.
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