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Outils pédagogiques : difficiles à produire, jamais parfaits !

29/08/19
Outils pédagogiques: difficiles à produire, jamais parfaits !

Les outils pédagogiques à l’attention des publics dits jeunes ne sont pas toujours accessibles ou adaptés. Pourquoi des décalages existent-ils entre leur production et leur utilisation ?

Ces dernières années, j’ai navigué entre les postures de formateur, de rédacteur, de coordinateur de projets, de superviseur et d’animateur. J’ai fait l’expérience de l’ensemble des places concernant les outils, de l’utilisateur au créateur. J’ai constaté que sur l’ensemble des productions qui existent, une minorité est adaptée aux réalités de terrain. Par ailleurs, j’ai fait l’expérience de la difficulté de créer un ouvrage compréhensible, utilisable et adaptable.

Adéquation avec le terrain ?

Si on s’accorde pour dire qu’un outil pédagogique est un support accompagné d’une méthode, on comprend plus facilement pourquoi certains ouvrages appelés « outils pédagogiques » ne font pas sens aux yeux des travailleuses et des travailleurs de terrain. Il s’agit d’analyses, de recommandations ou de critiques. Bien qu’elles puissent être pertinentes, elles n’offrent pas une ressource utilisable directement par les acteurs de première ligne.

Ces professionnels sont souvent pressés en matière de timing et de résultats. Ils ont besoin de ressources faciles à s’approprier et dont la mise en place peut être rapide. J’ai en tête quelques exemples d’outils avec de grosses faiblesses : un outil de 188 pages A4, un autre dont un mot sur deux nécessite un dictionnaire, le suivant qui parle d’animations pour des 6-10 ans adressé à des animateurs qui bossent avec des 16-26. Tant d’exemples qui démontrent une rupture entre la personne qui a rédigé/pensé l’outil et celle qui va l’utiliser.

Du temps et de l’énergie

J’ai été utilisateur, relecteur, porteur et contributeur. J’ai consulté plusieurs dizaines d’outils, j’en ai essayé une bonne trentaine et j’ai participé (à des degrés divers) à la réalisation d’une dizaine. J’en ai porté sept, quatre ont abouti. J’ai voulu faire ce travail en consultant les équipes de terrain et les publics visés. Je proposais un dispositif de création permettant à chaque personne de participer pleinement. Il y a eu de la participation mais pas autant que j’espérais.

La plus grande difficulté que j’ai rencontrée, c’est la disponibilité. Les travailleurs de première ligne ont le nez dans le guidon, les directions sont sur tous les fronts (ou s’en foutent) et le public n’est pas forcément intéressé (lorsque c’est le cas, ça ne passe pas en priorité). J’ai du m’adapter, proposer des moments qui rencontraient les intérêts de chacun. J’ai du me satisfaire de chaque petite avancée.

Ma plus grande frustration réside dans le fait que de nombreuses institutions auraient bien répondu présent mais sont coincées par des impératifs légaux trop rigides. Concrètement une ASBL reconnue qui doit faire un certain nombre d’heures, ne pourra me consacrer du temps que si les heures passées avec moi peuvent être valorisées dans le cadre de sa reconnaissance. C’est d’autant plus fort lorsque les associations subissent le morcellement des subsides et doivent respecter de multiples décrets.

Le cas particulier des commandes

Souvent issues des ministères ou des directions, plus rarement des travailleurs, les commandes doivent répondre à des objectifs politiques et/ou institutionnels. Hormis quand la création implique les praticiens, c’est toujours un peu la roulette russe. L’opérateur est-il compétent pour cette création ? Les moyens sont-ils adaptés ? Le temps est-il suffisant ? Les porteurs ont-ils une approche participative ? Tant de question qui ne peuvent recevoir de réponses négatives sous peine de mettre à mal le projet.

Je pense qu’un outil doit être créé en collaboration avec les personnes concernées. Cela permet de se rapprocher du terrain. Lorsque la demande émane du terrain ou d’une équipe, l’implication du public et des professionnels est plus naturelle. Lorsque la commande émane d’instances dirigeantes, les porteurs doivent rester très attentifs à ne pas se couper des réalités de leurs cibles. Plus les demandeurs sont loin de la première ligne, plus cela demande une exigence déontologique permanente et plus il est difficile de ne pas céder aux pressions.

Perceval CARTERON - éducateur

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