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La gestion de la crise dans la protection à l'enfance

22/10/18
La gestion de la crise dans la protection à l'enfance

Le dévoilement d’une situation de maltraitance au sein d’une famille crée une crise majeure. Les différents membres du système sont impactés, bien souvent la structure familiale explose, les individus sont en perte de repères et les intervenants se retrouvent souvent pris en miroir de ce fonctionnement chaotique. Dans ces situations, comment, en tant que profesionnel(le)s, réagir et continuer à penser et ce d’autant plus que l’enfant doit parfois être mis à l’abri ?

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Forte de plus de 10 ans d’expérience comme psychologue dans le secteur de la protection à l’enfance, la notion de crise ou d’urgence a souvent rempli mes journées. Durant mon parcours universitaire, j’ai appris à penser les choses, à élaborer et à formuler des hypothèses mais face à la maltraitance, il va parfois falloir penser et agir de concert. Suite aux révélations du jeune, il est nécessaire de faire une évaluation rapide et objective des risques qu’il encourt et d’éventuellement prendre des mesures d’éloignement temporaire de son milieu de vie.

Et la crise éclate…

Le personnel des services de première ligne : les puériculteurs/rices, les enseignant(e)s, les directeurs/rices d’école, les pédiatres, les intervenants des centres PMS… entendent souvent en premier les révélations de faits de maltraitance. Les propos sont parfois crus, violents, percutants… ou alors dits à voix basse, dans une volonté d’être gardés secret. Il n’est pas aisé d’accueillir ces confidences, l’intervenant est souvent chamboulé par ce qu’il vient d’entendre. Néanmoins, il s’agit d’écouter les propos de l’enfant et d’y répondre adéquatement. Faire appel à des spécialistes du secteur de la maltraitance, comme les équipes SOS Enfants, peut constituer une ressource plus qu’utile.

Informer pour garantir une potentielle alliance

Dans la protection à l’enfance, l’urgence de l’intervention est bien souvent réelle. Néanmoins, la réponse à donner doit continuer à être pensée et l’intervenant doit éviter d’agir dans la précipitation. Celle-ci amenant encore à davantage de confusion. Informer les parents des propos de l’enfant et s’assurer que ceux-ci garantiront la sécurité de leur progéniture constituent les premières actions à poser. En l’absence de cette certitude, faire appel à un tiers protectionnel que ce soit un lieu d’hébergement d’urgence, une équipe spécialisée dans l’accompagnement des situations de maltraitance, une instance judiciaire… Négliger d’informer rapidement les parents des mesures prises entraînera très souvent une collaboration ultérieure très difficile. Ils se sentiront disqualifiés dans leur fonction parentale, les professionnels n’ayant pas jugé utile de les informer en première instance.

L’éloignement du milieu de vie semble inévitable

Dans certaines situations, les conditions ne sont pas réunies pour permettre à l’enfant de retourner vivre immédiatement dans son milieu de vie habituel. Suite aux révélations, les membres de la famille sont bouleversés, abattus, en colère… Ce qui était gardé dans la sphère de l’intime passe dans la sphère publique. Un travail tant avec l’enfant, sa famille que les intervenants de première ligne doit être initié. Il est important que l’accueil soit réfléchi et pensé dans une perspective d’ouverture et de non jugement. La loi interdit tout acte de violence, il est important de le rappeler mais avant tout il s’agira de comprendre ce qui a entraîné cette dynamique de maltraitance. Soutenir les intervenants qui ont entendu l’enfant est également un pan important du travail d’accompagnement.

Profiter de la crise

La crise ouvre des perspectives de changements non négligeables, il s’agit donc de s’en saisir. L’hospitalisation temporaire d’un enfant doit si possible se négocier avec les parents afin de maintenir une alliance à minima. Travailler la honte générée par l’intervention de professionnels dans l’espace privé constitue également un axe d’intervention. Il est également important de se centrer sur les propos de l’enfant, son état de santé physique et psychique. En outre, les différents partenaires doivent continuer à réfléchir ensemble pour mener un accompagnement social, thérapeutique, éducatif cohérent auprès du jeune et de sa famille, et ainsi permettre l’arrêt de la maltraitance. Bien trop souvent, les intervenants de première ligne une fois le relais passé à d’autres intervenants restent sans nouvelle de l’évolution de la siuation, hors ils détiennent souvent déjà beaucoup d’informations et seront fort probablement amenés à continuer à travailler avec cette famille dans le futur.

V.B, Psychologue clinicienne



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