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Les coulisses des métiers de la petite enfance : regards croisés entre une accueillante d'enfants et une puéricultrice

Les coulisses des métiers de la petite enfance : regards croisés entre une accueillante d'enfants et une puéricultrice

Puéricultrice en crèche ou accueillante d’enfants à domicile, ces professionnelles jouent un rôle essentiel dans l’éveil et le bien-être des tout-petits. Si leurs conditions de travail diffèrent, leur mission reste la même : accompagner les enfants dans leurs premières années de vie. À travers les témoignages d’Aurélie Volckaerts, accueillante d’enfants à domicile, et Valérie Louette, puéricultrice en crèche, cet article met en lumière les réalités de ces deux métiers et rappelle que, malgré leurs spécificités, ils reposent sur une même base de formation et une vocation commune.

Accompagner les jeunes enfants dans leur développement peut se faire de différentes manières. Certains choisissent la voie d’accueillante en crèche, intégrant une équipe encadrée et une structure collective. D’autres optent pour l’accueil à domicile, un cadre plus familial et personnalisé. Si ces deux professions présentent des réalités bien distinctes – en termes de conditions de travail, de responsabilités et de relation avec les parents –, elles partagent une même mission : accompagner le développement des jeunes enfants en lien avec leur famille.

Cet article croise les témoignages d’une puéricultrice, Valérie Louette (photo du bas) et d’une accueillante d’enfants (photo du haut), Aurélie Volckaerts, mettant en lumière leurs différences et leurs points communs. Il est important de rappeler que ces deux fonctions sont accessibles via un même socle de formation. Parmi les diplômes et qualifications permettant la fonction d’accueil tant en crèche, en service d’accueil d’enfant ou encore comme accueillant-e indépendant.eà domicile, on retrouve le bachelier en Accueil et Éducation du Jeune Enfant, les certificats de qualification en puériculture et agent/agente d’éducation, les formations de promotion sociale (auxiliaire de l’enfance et éducateur/éducatrice, ainsi que la formation professionnelle d’accueillant.e – chef d’entreprise.

Au-delà des parcours et des choix professionnels, ces métiers partagent une même mission : offrir un cadre bienveillant et structurant aux tout-petits dans leurs premières années de vie et accompagner les parents ; les familles concernées.

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Parcours et motivations : des chemins différents, une même passion

Si leurs parcours sont différents, leur passion pour la petite enfance est la même. Aurélie Volckaerts est arrivée à ce métier après un cheminement personnel et une prise de conscience en tant que maman, tandis que Valérie Louette a suivi une voie plus classique, portée par une vocation précoce.

« Mon parcours n’a pas été linéaire », lance en préambule Aurélie Volckaerts. « J’ai commencé par des études en diététique avant de me tourner progressivement vers l’accompagnement des enfants. Devenir maman a été une révélation. J’ai ressenti le besoin de me former et d’apporter mon soutien aux familles. Ce choix est venu d’une constatation : les parents se retrouvent souvent seuls dans les premières années. Comment gérer les colères, par exemple ? Il y a plein de questionnements et en réponse, un grand vide. De par mon parcours de maman, j’ai suivi plusieurs formations sur l’éducation, la parentalité et le développement de l’enfant. Et j’ai voulu répondre un peu à cette solitude du parent en devenant accueillante d’enfants. »

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De son côté, Valérie Louette confie : « J’ai su très jeune que je voulais travailler avec les enfants. Adolescente, j’adorais travailler avec les enfants et quand la question du choix des études s’est posée, mes parents m’ont encouragée dans cette voie. J’ai suivi des études de puériculture, j’ai fait de nombreux stages et, depuis 32 ans, j’exerce ce métier avec la même passion. Chaque journée est unique, pleine d’émotions et de découvertes. Ce qui m’anime, c’est de voir les enfants évoluer, développer leur autonomie et leur confiance en eux. »

Un quotidien exigeant mais gratifiant

Le quotidien d’une accueillante d’enfants à domicile diffère de celui d’une accueillante en crèche, mais toutes deux mettent un point d’honneur à répondre aux besoins fondamentaux des enfants.

« Aujourd’hui, j’accueille jusqu’à cinq enfants. Actuellement, le plus jeune est âgé de 11 mois et les plus grands ont deux ans », précise Aurélie Volckaerts. « Ma journée commence à 7h15 et se termine vers 18h15. Tout est pensé pour offrir un cadre sécurisant et stimulant. Je suis à 100% disponible pour les enfants, que ce soient pour les repas, le développement de la résilience ou l’acquisition de l’autonomie. Chaque moment est une opportunité d’apprentissage et d’accompagnement. »

Et en crèche ? « Nous fonctionnons en équipe. Nous sommes trois pour 13 à 14 enfants. L’organisation est structurée : accueil, activités éducatives, repas, sieste... », pointe Valérie Louette, avant de préciser : « Tout est adapté aux rythmes et aux besoins des enfants. Nous veillons aussi à leur autonomie, en les encourageant à participer aux tâches du quotidien, comme ranger leur chaise ou se servir à table. L’interaction avec les parents est également essentielle pour assurer une continuité bienveillante. »

Le lien avec les parents : entre confiance et accompagnement

Accueillante en crèche ou accueillante d’enfants à domicile, ces professionnelles partagent un même objectif : le bien-être des tout-petits. Si toutes deux insistent sur l’importance du lien avec les parents, leur approche diffère.

Aurélie Volckaerts, en tant qu’accueillante, adapte sa communication aux attentes de chaque famille tout en préservant la place essentielle des parents : « Chaque parent a des attentes différentes. Certain·e·s veulent des nouvelles régulières, d’autres sont moins demandeurs. J’adapte ma communication, mais je rappelle toujours que je ne suis pas un parent. L’enfant a besoin de temps avec sa famille, c’est primordial. J’ai aussi un projet d’accueil qui laisse plus de place à l’implication des parents : mes horaires sont de 8h à 17h, pour éviter que les enfants passent des journées trop longues loin de chez eux. »

De son côté, Valérie Louette, observe une évolution dans la relation avec les familles accueillies dans la crèche et les défis croissants du métier : « La relation de confiance avec les parents est indispensable. Nous sommes là pour accompagner, rassurer, et aussi poser des limites. Malheureusement, je constate une évolution au fil des années : les parents semblent avoir de moins en moins de temps, et cela a un impact sur les enfants. Certains sont plus agités, en manque de repères, car la société va trop vite. Nous devons parfois jouer un rôle de médiation, rappeler que quelques minutes de qualité chaque jour avec son enfant peuvent faire toute la différence. »

Si l’une favorise un accueil plus souple et impliquant, l’autre souligne l’importance de préserver des repères pour les tout-petits face aux rythmes effrénés d’aujourd’hui.

Défis et réalités du métier

« Il faut être passionné·e pour tenir. »

Malgré leur engagement et leur passion, les conditions de travail restent un défi pour ces professionnelles de la petite enfance.

Aurélie Volckaerts, en tant qu’accueillante indépendante, fait face à une précarité financière et un manque de protection sociale : « Ce métier est une passion, mais il reste précaire. Je suis indépendante [1], ce qui signifie pas de congé maladie, pas de congé payé et une pension incertaine. Financièrement, ce n’est pas toujours simple. Je demande 800 € par mois aux parents, ce qui est déjà un budget conséquent pour eux. Pourtant à la fin du mois, mon revenu net n’est pas représentatif des heures de travail effectuées. Il faut être passionné·e pour tenir. C’est dommage, car le développement du cerveau des enfants entre 0 et 2 ans est primordial pour leur bien-être futur. »

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De son côté, Valérie Louette, accueillante en crèche, souligne la charge mentale et le manque de moyens qui pèsent sur la profession : « Pour la responsabilité qu’on a, pour les échanges qu’on a, pour la collaboration qu’on peut avoir, pour le rôle qu’on joue dans le développement des enfants… Je ne peux pas dire que nous gagnons bien nos vies. Mais voilà, j’adore ce que je fais. »

Elle rajoute : « Le plus grand changement en 30 ans ? Le rythme effréné de notre société et les conditions de travail qui se sont durcies. En crèche, nous avons heureusement une équipe soudée, mais ailleurs, beaucoup de professionnel·le·s se retrouvent en sous-effectif. La charge mentale est lourde, car nous devons être partout à la fois. Pourtant, ce métier est essentiel : nous posons les bases du développement des enfants. »

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Un métier de vocation

Malgré les difficultés, Aurélie et Valérie partagent une même conviction : travailler avec les jeunes enfants est une chance et une immense responsabilité.

Aurélie Volckaerts évoque avec passion l’impact de son travail sur le développement des tout-petits : « Voir un enfant gagner en confiance, apprendre à découvrir ses émotions et évoluer au quotidien est une immense satisfaction. Les moments où ils réussissent quelque chose seuls, où ils se sentent fiers d’eux, c’est magique. »

Elle insiste sur l’importance des premières années de vie, période charnière pour l’avenir de l’enfant : « Quand j’ai découvert que l’augmentation de la résilience des enfants, qui dépend de la qualité de l’accompagnement par les adultes, est directement corrélée à leur capacité au bonheur, ça m’a fait rêver. Je me suis dit : là, il y a vraiment un truc énorme à faire en tant qu’accompagnante au quotidien de tout-petits. »

Valérie Louette, quant à elle, rappelle le rôle fondamental des professionnels de la petite enfance : « C’est un métier qui doit être mis en valeur. Nous sommes à la base du développement des enfants, et notre rôle est essentiel. L’attachement que nous développons avec eux est précieux, et nous sommes là pour les accompagner dans leurs premiers apprentissages de la vie. »

Toutes deux s’accordent sur un point : accompagner les jeunes enfants dans leurs premières découvertes et les voir s’épanouir est une source inestimable de motivation.

Mathilde Majois

L’ONE s’investit activement dans l’accompagnement et la reconnaissance des professionnels de la petite enfance. Conscient des défis et de l’importance cruciale de leur rôle, l’ONE déploie divers projets pour valoriser et soutenir ce secteur. Le travail des Coordinatrices Accueil, des Agents Conseils et des Conseillers Pédagogiques constitue un appui essentiel pour guider ces professionnels dans leur mission. Par ailleurs, le projet « Fonctions critiques » incarne l’engagement de l’ONE à mettre en lumière les compétences et l’expertise nécessaires à ces métiers, renforçant ainsi leur visibilité et leur reconnaissance dans la société.

Savoir plus :

[1] : Il existe aussi la possibilité d’être accueillante salariée dans le cadre d’un service d’accueil d’enfants (SAE) (voir la campagne de l’ASBL COSEGE sur ce lien) ou sur le site de l’ONE pour les informations pratiques.




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