Le métier de pair-aidant : quand l'intervention sociale est basée sur le vécu

En Belgique francophone, le métier de pair-aidant n’existe pas encore officiellement même si des expériences informelles fleurissent ci et là. Le pair-aidant peut cependant jouer un rôle important dans l’accompagnement des patients. Explications.
Selon l’asbl Psytoyens, aucune personne n’est engagée sous le titre de pair-aidant en Wallonie et à Bruxelles. « Actuellement, les autorités de la Réforme des soins de santé mentale ne mettent pas de moyens spécifiques pour la création de postes de pair-aidant au sein des équipes. » En Flandre, par contre plusieurs expériences de pair-aidance sont constatées, notamment à Anvers et à Gand.
Pair-aidant, un métier atypique ?
Un pair-aidant est, selon la fédération d’associations d’usagers en santé mentale Psytoyens, « un usager ou un ex-usager de services de soin en santé mentale, engagé au sein d’une équipe d’intervention psycho-médico-sociale. Bien que les savoirs plus « académiques » (formation en action sociale, en aide sociale et administrative, formation en psychologie, infirmière sociale...) soient une ressource à part entière, ses aptitudes, sont avant tout liées à son parcours et son cheminement en santé mentale. »
Notez que le pair-aidant travaille, au même titre que les autres intervenants, au service du rétablissement et de l’intégration sociale des usagers.
L’expérience du vécu, pierre angulaire du métier
Condition sine qua non à une intervention efficace, le pair aidant doit avoir réussi à se distancier de son parcours de vie. « Les supervisions individuelles, les intervisions avec d’autres usagers et les formations permettront une prise de recul vis-à-vis de sa propre expérience. C’est bien cette opération de « mise à distance » de son propre vécu qui permettra de passer de l’expérience à l’expertise, et de mobiliser celle-ci au sein d’une fonction », explique Psytoyens dans un article consacré à la thématique.
C’est donc seulement après avoir réussi à prendre du recul que le pair-aidant est prêt à utiliser son histoire comme outil de soin et peut dès lors aider l’usager à « se raccrocher, reprendre espoir et prendre appui. » « Qu’il s’agisse de l’expérience de l’hospitalisation, de la mise en observation, du soin sous la contrainte, c’est un aller-retour entre sa propre expérience et celle d’autres », poursuit Psytoyens.
Intégrer un pair-aidant dans une équipe professionnelle
L’atout du pair-aidant est indéniablement son expertise liée au trajet de soins, à l’expérience de la maladie et à tout ce qu’elle comporte en termes de processus individuels et sociaux.
Au sein d’une équipe psycho-sociale, le pair-aidant portera attention, par exemple, aux stratégies diverses que l’usager peut développer dans l’optique de se remettre sur pied : le recours à des groupes d’entraide, le recours aux ressources de l’usager, une attention sur ses attentes, ses besoins...
La structure dans laquelle il exerce devra pour ce faire veiller à baliser le rôle, la fonction et la place du pair-aidant aux côtés des autres travailleurs. « Cette fonction n’est pas ’clef-sur-porte’ mais doit à chaque fois être pensée en équipe. »
Quel statut pour le pair-aidant ?
Afin de mettre en place la fonction de pair-aidant, l’asbl Psytoyens estime que deux statuts sont envisageables, à l’heure actuelle. « Un premier statut peut être celui d’employé. Un second, celui d’« expert du vécu consultant ». Ici, le pair-aidant est consulté par une équipe, dans le cadre d’un projet précis ou d’une question spécifique. Le pair-aidant travaille alors dans le cadre de contrats de plus courte durée. »
Dans les deux cas, il est essentiel que le pair-aidant bénéficie d’un accompagnement soutenu, via des supervisions, des intervisions et des formations.
Au-delà de l’accompagnement du patient dans sa guérison, le pair-aidant participe de manière plus générale à la déstigmatisation des personnes qui vivent avec un trouble psychique. Dès lors, promouvoir la pair-aidance dans une structure de soins, c’est « promouvoir l’inclusion de toutes et tous au sein de la société, dans le monde du travail et valoriser l’expertise du vécu en santé mentale. »
Delphine Hotua
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