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Police, justice, autorités… Un partenariat possible ?

08/01/18
Police, justice, autorités... Un partenariat possible ?

Il arrive que des services de travailleurs de rue soient sollicités par la police pour mettre en place un partenariat. Si le partenariat n’est pas exclu, il doit être à sens unique sur toute une série de points.

Lorsqu’un service de police prend contact avec des travailleurs de rue dans l’optique d’un partenariat, de rencontres ou d’échanges, les policiers ne comprennent par toujours bien les réticences (surtout si les professionnels interpellés sont des employés communaux). Même lorsque la démarche policière s’éloigne de toute forme de répression et de contrôle, il est difficile d’expliquer que les échanges ne peuvent se faire dans les deux sens. Outre les décalages de missions et de représentations de celles-ci, nombres d’agents prennent personnellement la défiance à l’égard des services répressifs.

Prise de risque

Ce que certains agents ne réalisent pas, c’est qu’une simple rencontre peut déjà être une prise de risque sérieuse pour les intervenants sociaux. Si elle est mal comprise, mal expliquée ou sortie de son contexte, l’entrevue peut donner des airs de délation. Cela peut réduire à néant des années de travail sur la confiance envers les professionnels. De plus, n’oublions pas que pour bon nombre de personnes « en rue » la police est synonyme de danger et parfois de violences. Il faut donc bien évaluer le risque et surtout être transparent avec toutes les personnes concernées.

Sens interdit !

Sur certains sujets, les échanges n’iront que dans un sens. Par exemple, en matière de procédures et de méthodes de travail, l’intervenant social n’a pas besoin de connaitre celles de la police. Légitimes ou non, elles vont généralement à l’encontre des objectifs de prévention et de réduction des risques. À l’inverse, la police peut s’enrichir d’une meilleure compréhension du travail social et de ses dispositifs. Concernant les informations, le travailleur de rue, ne peut en aucun cas les partager avec la police (au risque d’enfreindre la loi, de fragiliser son service et de se mettre en danger) par contre les policiers peuvent tout à fait partager leurs préoccupations et leurs observations dans l’espoir (par exemple) de ne pas devoir intervenir sur de futurs incidents. Les agents reçoivent aussi régulièrement des demandes d’accompagnement qu’ils ne peuvent traiter, ou observent chez les citoyens des besoins auxquels ils ne peuvent répondre.

Sans interdit ?

J’ai parfois observé un paradoxe chez mes pairs. Certains refusent une réunion avec la police, mais appellent cette dernière pour dénoncer un acte répréhensible ou acceptent de mener un entretien individuel en présence d’un inspecteur. Je pense que cette incohérence est due à un discours convenu de distanciation avec l’institution policière, couplé à une réaction naturelle d’obéissance à l’autorité (quand bien même celle-ci serait illégitime). Nous nous mettons des barrières mais n’en mettons pas aux institutions étatiques lorsqu’elles dépassent le cadre de la légalité. Il faut faire tomber les interdits psychologiques et renforcer les interdits légaux et déontologiques.

Ne pas céder

Dans tous les cas, il ne faut pas céder face à la pression. Si un tel rapport s’installe, c’est que le partenariat n’en est pas un. Si les agents ne peuvent pas comprendre la position fragile des travailleurs et la méfiance des personnes concernées, c’est qu’il n’est pas encore temps d’échanger. Il faut être ferme sur la place de chacun et les libertés qu’ont les uns et les autres. De plus, au vu des enjeux respectifs, rien ne peut se faire sur la seule base d’un sentiment de confiance, il faut acter les décisions et se tenir rigoureusement à ce qui a été convenu.

Plus-values pour tout le monde

Si les parties arrivent à se comprendre et surtout à s’entendre, les plus-values peuvent être nombreuses. Les agents de police peuvent être moins sollicités et rester dans leur rôle, les citoyens peuvent recevoir des réponses appropriées à leurs problématiques, les travailleurs sociaux peuvent se faire mieux entendre des autorités, etc. Enfin, une meilleure entente entre les intervenants (dont la police fait partie) ne peut être que bénéfique pour les personnes, particulièrement les plus fragilisées.

D’autres exemples

Cette situation peut se retrouver dans d’autres cas que l’axe prévention/répression. Les travailleurs issus de l’aide contrainte et non contrainte peuvent avoir des questionnements similaires . Il en va de même pour les projets accueillants des personnes avec un suivi judiciaire ou psycho-médical. Le plus important reste d’être clair sur les attentes, les limites et les possibilités d’action et d’expression de chacun. Sans oublier la transparence à l’égard des premiers concernés. Si les partenariats son sains et sécurisés, il n’y a pas de raisons de s’en cacher.

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