Béguinage : le travail de terrain des professionnels de santé pendant la grève de la faim

23/07/21
Béguinage : le travail de terrain des professionnels de santé pendant la grève de la faim

Les personnes sans-papiers regroupées dans l’église du Béguinage à Bruxelles ont annoncé mercredi la suspension de la grève de la faim entamée il y a deux mois pour faire pression sur le gouvernement fédéral et obtenir enfin une régularisation. Avec Hannah Haïoun-Viet, chargée de la coordination médicale au sein de la Fédération des Maisons médicales, nous revenons sur le travail de terrain effectué par les professionnels de santé et les bénévoles qui ont apporté leur aide aux grévistes.

Premier écho : l’annonce de la fin de la grève a été vécue avec un certain soulagement : “La situation a été, jusqu’au 21 juillet dernier, assez préoccupante. Certaines personnes avaient entamé une grève de la soif, une grève du sucre, il y avait une dizaine d’hospitalisations par jour...”, témoigne Hannah Haïoun-Viet. Mais pas le temps de souffler car de nouveaux défis attendent les personnes engagées aux côtés de ces personnes sans-papiers : la gestion des dossiers administratifs pour les bénévoles, l’aide à la réalimentation et la poursuite du suivi médical personnalisé pour le personnel médical, afin de pouvoir orienter au mieux les personnes prises en charge et de leur assurer un suivi également à moyen et long terme.

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Les difficultés d’accès ont freiné la prise en charge

Pendant deux mois, les soins prodigués ont été limités à la surveillance des paramètres vitaux des personnes en grève (tension artérielle, pulsations, rythme cardiaque et glycémie) par des infirmiers ou des bénévoles paramédicaux en collaboration avec des médecins. En fonction de l’état de santé de chacun, des médicaments ont été fournis et des hospitalisations ont pu être requises, comme évoqué plus haut.

Bénévoles et professionnels de santé ont été confronté à une difficulté majeure, à savoir l’impossibilité de rentrer dans l’église car les grévistes s’y étaient enfermés. Seul un médecin était autorisé à franchir les portes du bâtiment en cas d’urgence. Pour plus de précautions, les soignants restaient néanmoins à proximité de l’église. Cependant, les grévistes comptaient parmi eux des référents médicaux formés au préalable et chargés de s’occuper des paramètres vitaux des personnes les plus en danger. En cas de doute, ils appelaient une ambulance pour garantir un accès aux soins de santé aux personnes les plus en détresse. “A un moment donné, on ne pouvait presque plus intervenir ou alors de loin, par contact téléphonique avec les référents médicaux qui, eux, étaient dans l’église”, confie Hannah Haïoun-Viet.

D’autres professionnels de santé, comme des psychologues et des assistant(e)s sociaux(les), se sont également proposés pour apporter leurs compétences. “ L’essentiel, c’est l’approche relationnelle et l’engagement”, explique-t-elle. “Il y a un partage de connaissances et c’est très chouette d’avoir une équipe très diversifiée, cela apporte beaucoup de choses”.

La fin du calvaire ?

L’état de santé des grévistes laisse toujours à désirer : “Pour le moment, les personnes qui restent dans l’église sont relativement stables mais TRES affaiblies donc il faut continuer une surveillance des personnes qui sont sur place pour s’assurer que leur état ne s’aggrave pas”, maintient-elle. Les grévistes sont touchés sur le plan physique à cause du jeûne prolongé et sur le plan psychique en raison d’une grève qui dure depuis deux mois (la grève est à l’heure actuelle suspendue mais pas définitivement arrêtée).

“L’enjeu sur le court terme, c’est vraiment la réalimentation progressive, on essaye d’insister là-dessus”, poursuit-elle. Les médecins et coordinateurs médicaux sur place ont déjà distribué de nombreux protocoles de réalimentation à ce sujet. Sur le moyen terme, une intervention kinésithérapeutique semble également nécessaire, le jeûne ayant entraîné de nombreuses complications musculaires qui nécessitent une rééducation.

Si la régularisation de ces personnes sans-papiers serait une victoire pour tout le monde – et probablement la meilleure solution tant pour la santé que pour l’avenir (professionnel) de ces personnes, il faut pour le moment se contenter d’une autre alternative. Ainsi, la FMM mobilise actuellement l’ensemble des maisons médicales bruxelloises pour savoir lesquelles seraient capables de prendre en charge des personnes en fonction de leur capacité. “Le modèle des maisons médicales pourrait vraiment permettre une prise en charge globale de ces personnes”, déclare Hannah Haïoun-Viet. Les garanties ne sont pas encore toutes là mais l’élan de soutien reste prometteur. “On a pu observer une très grande solidarité et ça continue mais il reste un long combat à mener”, conclut-elle.



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