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Les personnes handicapées, oubliées du processus de déconfinement

08/05/20
Les personnes handicapées, oubliées du processus de déconfinement

Cela fait maintenant deux mois que les personnes en situation de handicap et leurs familles vivent une situation particulière. Au début du confinement, ces dernières ont dû faire un choix. Soit accueillir, pour une période non connue, leurs proches au sein de leur foyer, soit les placer en institution, sans savoir à quel moment ils pourraient les revoir. La question se pose donc aujourd’hui légitimement : quand les personnes en situation de handicap pourront-elles sortir des institutions ou y revenir ?

« Je n’ai plus vu mon fils depuis deux mois et nous ne savons pas anticiper le moment où nous pourrons le revoir ». C’est le genre de situation causée par la crise sanitaire et le confinement. Alors, une série d’associations (AP3, Inclusion ASBL, ALTEO, APEPA et ASPH) travaillant étroitement avec des personnes en situation de handicap a lancé l’alarme et posé la question. Quand les personnes en situation de handicap pourront-elles sortir des institutions (ou y revenir) ?

Dans un communiqué de presse, ces acteurs pointent que : « Le temps semble bien long pour les personnes en situation de handicap et leurs familles, tant pour celles confinées à domicile que pour celles qui en sont éloignées depuis très longtemps ».

Le déconfinement a pourtant démarré, en Belgique, en début de semaine. Il suivra un processus réfléchi et par étapes. Or à l’heure actuelle, dans le secteur du handicap, aucune échéance n’a « été clairement communiquée concernant la possibilité de sortie (ou de rentrée) des personnes résidant dans un service d’hébergement collectif » indique le communiqué. D’où un sentiment légitime d’abandon et de déconsidération, prégnant, pour ces familles et ces personnes en situation de handicap.

Des demandes au Conseil National de Sécurité

C’est d’autant plus important quand on sait que ces conditions particulières peuvent impacter la santé de ce public. C’est notamment le cas pour les personnes souffrant d’un handicap intellectuel. Elles « ont souvent beaucoup de difficultés à comprendre cet éloignement ». Et le numérique, pour ce groupe spécifique, ne parvient pas vraiment à remplacer le contact, ni à rendre supportable l’éloignement. C’est pourquoi cette conjoncture peut avoir « des effets très lourds sur la santé mentale de ces personnes pouvant aller jusqu’à une prise en charge d’urgence ou une hospitalisation ».

Bien que les visites aient repris dans certaines structures d’hébergement pour personnes handicapées, elles n’ont pas le même impact que celles autorisées dans les maisons de repos. Ces deux publics sont différents. Ce qui change, c’est que le contact avec les familles, pour les personnes handicapées se fait généralement au sein du foyer, pendant les week-ends, et non au sein même de la structure. Par conséquent, ce sont « les sorties extérieures qui permettent de maintenir le contact avec les proches et non pas des visites intramuros ».

Conscientes que l’impératif des autorités est la sécurité publique, les associations offrent donc des préconisations. Elles prêchent notamment pour l’établissement d’un climat de confiance entre les institutions et les familles, celles-ci étant un « partenaire essentiel du processus ».

Ce n’est pas tout, les 5 associations font trois demandes au Conseil National de Sécurité. D’abord, elles souhaitent que les autorités prennent « ce public spécifiquement en considération et qu’une communication claire soit faite ». Puis, que « cette communication précitée s’accompagne de propositions concrètes ». Enfin, les associations réclament la priorisation de « l’accès aux tests pour les personnes en situation de handicap résidant en institution et leurs proches ».

La crainte d’une perte de repères et de capacités

Pour autant, rien ne donne plus de résonnance à ces demandes que les témoignages des familles de ces personnes en situation de handicap. Marie-Christine, dont la fille Yasmina est atteinte du syndrome d’Angelman, confie : « Ma fille et moi ne pouvons communiquer que par Skype. Elle est porteuse d’un handicap intellectuel profond et est atteinte de mutisme. »

Pire : « Il lui est impossible de se servir des différents moyens de communication. Elle éprouve également des difficultés à me voir, étant aussi malvoyante. Elle entend ma voix, me cherche et ne comprend pas pourquoi je ne vais pas la voir. Si le confinement perdure, je crains que l’absence de ses proches, sans raison compréhensible pour elle, n’en vienne à la déprimer, lui fasse perdre ses repères de même que ses capacités durement acquises grâce aux prises en charge spécifiques ». Espérons que cette situation ne s’éternise pas trop longtemps.

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