Formation des "psys" : l'université portée au pinacle, pourquoi ?
Pourquoi l’université tient-elle ainsi le haut du pavé pour définir des cursus dans lesquels les compétences visées dépassent largement les simples connaissances théoriques ?
Pour la psychothérapie, le débat fait rage. Madame De Block tente d’imposer l’université comme lieu de passage obligé pour les psychothérapeutes. Les autres lieux de formation se défendent en mettant en avant leurs atouts : plus de pratique et un travail personnel obligatoire pour les futurs praticiens. Mais d’où vient cette suprématie universitaire ? Et se justifie-t-elle dans le cadre de la formation à nos professions en santé mentale ?
La confrontation émotionnelle
Notre métier nous confronte sans cesse à la souffrance. Les jeunes psychologues qui débutent leur stage en institution nous le rappelle souvent : être confronté à la souffrance humaine, c’est très difficile à gérer, et cela demande de la pratique. Dans ces moments émotionnellement denses, les connaissances théoriques sont loin d’être suffisantes.
La nécessité de travailler sur soi
De plus, cette « neutralité bienveillante », vers laquelle il faut tendre, est une autre gageure. Le praticien est tenu d’analyser sans cesse ce qui l’agite, et de bien distinguer ce qui lui appartient de ce qui appartient au patient qui lui fait face. Il faut donc souvent « nettoyer son écran ». La supervision est bien sûr indispensable mais également un travail sur soi : pour mieux se connaître et pour essayer « l’autre place » et ce qu’elle peut provoquer.
L’importance des connaissances théoriques
Mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain ! Il est tout aussi crucial d’avoir de solides connaissances théoriques (sans cesse réactualisées) car c’est ce qui fonde notre grille de lecture, c’est ce qui nous permet de formuler des hypothèses et de repérer les fonctionnements et les logiques dans les récits de vie que l’on nous adresse. Etre un lieu d’adresse vide ne veut pas dire cautionner l’ignorance ou la méconnaissance des balises théoriques qui nous permettent de naviguer !
L’université portée au pinacle
L’Université n’a que du type « long » et elle est également la seule à organiser des troisièmes cycles, des doctorats, qui sont dédiés à la recherche. Or le « palmarès » de ces universités est souvent en lien avec le nombre de chercheurs les plus cités dans leur discipline ou le nombre de publications réalisées. C’est donc la recherche qui explique sans doute le prestige des universités. Mais si la recherche est fondamentale dans toute discipline, elle n’est pas indispensable pour tout praticien. C’est ailleurs que doit porter le questionnement sur la formation ad hoc du psychothérapeute.
Un bout de chemin pour chacun
Et si nous rêvions d’une formation où les atouts de chacun seraient intégrés ? L’université, forte de son cursus théorique solide, pourrait alors axer davantage sa formation vers la pratique de l’entretien et tout ce que cela suscite sur le plan émotionnel. Elle pourrait exiger de la part des futurs praticiens un véritable travail sur soi. Elle pourrait mieux encadrer les premiers pas professionnels. Elle pourrait ainsi enrichir la formation actuelle, fort théorique. Ce qui n’excluerait pas d’autres lieux professionnalisants s’ils remplissent les mêmes critères et surtout les mêmes exigences de durée et de formation théorique.
D.B., psychologue
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