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La relation patiente-accoucheur remise en cause

12/02/18
La relation patiente-accoucheur remise en cause

Depuis quelques années, des mouvements naissent dans plusieurs pays pour dénoncer les violences obstétricales. Touchers vaginaux, épisiotomies, déclenchements des accouchements... Les protocoles médicaux, lorsqu’ils sont appliqués de façon systématique et sans adaptation aux volontés de la patiente, peuvent parfois introduire des actes médicaux non-nécessaires ou pire, non-consentis.

Le terme de "violences obstétricales" désigne des actes médicaux non-nécessaires et non-consentis dans le cadre du suivi de gynécologie. Si certains témoignages sont parus dans la presse ces dernières années, permettant ainsi de briser un tabou, le mot "violence" se base cependant sur un ressenti subjectif de la patiente, qui peut être différent en fonction de son vécu. Vécu que ne maîtrise pas forcément l’accoucheur, qu’il soit gynécologue ou sage-femme. Face à ces actes parfois ressentis par les patientes comme de la maltraitance, la confiance de la patiente envers l’accoucheur se voit quelque peu égratignée.

Belgique et France : deux débats différents

En Belgique comme en France, les témoignages de violences obstétricales ont permis de sortir d’un tabou et de parler de la question du consentement de la patiente aux actes médicaux exécutés lors de l’accouchement.

Pourtant, le débat n’est pas le même dans les deux pays. En effet, la polémique est bien moins virulente en Belgique car elle n’a pas révélé des pratiques non-consenties à aussi grande échelle. Cela est dû notamment à un meilleur suivi gynécologique des femmes en Belgique : en France, les femmes n’accouchent pas nécessairement avec le gynécologue qui les a suivies et se retrouvent parfois avec un professionnel qu’elles n’ont jamais rencontré.

Pour une majorité de femmes, l’accouchement se passe bien et n’est pas source de violences. Marie-Hélène Lahaye, auteure de Accouchement : les femmes méritent mieux, rappelle au micro de La Première que "ce n’est pas pour autant qu’il faut le taire [les violences NDLR] parce qu’elles ne sont que minoritaires [sic]"

Pourquoi ces violences ?

Ces pratiques de violences obstétricales peuvent être liées à différents facteurs. D’abord, comme dans tous les métiers, il existe dans le secteur de la santé des professionnels incompétents, qui ne sont pas à l’écoute de leurs patients, voire des professionnels "délinquants" : des personnalités particulières qui relèvent plus de la justice que de la santé. Les praticiens "violents" sont alors difficiles à quantifier.

Ensuite, certains actes médicaux lors de l’accouchement peuvent être effectués dans un objectif de rentabilité. En effet, certains praticiens choisissent de déclencher un accouchement alors que ce n’est pas nécessaire, pour assurer le turn-over de patientes. Avec les récentes mesures prises par la ministre de la Santé, Maggie De Block, concernant le séjour en maternité, le temps des accouchements est plus que jamais compté. Néanmoins, dans certains cas, c’est pour assurer un accouchement dans des conditions optimales que les professionnels de la santé se voient contraints d’enclencher le travail. Dans une interview à la RTBF, Pierre Bernard, chef du service Gynécologie-Obstétrique de Saint-Luc, expliquait ainsi qu’il peut être intéressant d’ "optimaliser" un accouchement si cela permet à une femme d’accoucher en journée plutôt que la nuit, où il y a moins de personnel disponible.

Enfin, certaines pratiques, qui peuvent être considérées comme non-nécessaires, sont "culturellement" perpétuées par habitude. Par exemple, les épisiotomies seraient plus pratiquées en Belgique qu’en France, plus en Flandre qu’en Wallonie et à Bruxelles. La question se pose donc sur ces pratiques, qui dépendraient alors d’un facteur plus culturel que médical.

Et les chiffres ?

Actuellement, il existe des statistiques wallonnes des actes médicaux pratiqués lors des accouchements (taux de césariennes, d’épisiotomies, de déclenchements, etc), mais elles ne sont malheureusement pas publiées, afin de ne pas créer de concurrence entre les hôpitaux. Pourtant, il pourrait être intéressant pour les professionnels d’accéder à ces données, afin de comparer leurs pratiques et éventuellement la remettre en question.
Il est évident que, si les protocoles à suivre par les professionnels ont pour premier objectif la sécurité de la mère et de l’enfant, ceux-ci peuvent cependant être adaptés au cas par cas. En cas d’urgence, il peut cependant arriver que la nécessité d’aller vite pour le praticien empiète sur le consentement de la patiente, d’où le besoin de prévoir un espace de discussion au préalable avec la patiente.

Sage-femme ou gynéco ?

Marie-Hélène Lahaye explique à La Première que, selon elle, l’accouchement est un acte naturel qui ne nécessite pas la présence d’un gynécologue, sauf dans les cas de grossesses difficiles ou lorsque c’est un souhait de la patiente. Demander à une femme enceinte de se faire suivre par un gynécologue relève selon elle d’une "pathologisation" de la grossesse et le suivi par une sage-femme serait parfaitement suffisant.

Si le choix d’un gynécologue ou d’une sage-femme relève de la volonté de la patiente, les sages-femmes peuvent cependant souvent offrir un suivi plus personnalisé grâce à leurs nombreuses spécialisations. Quel que soit ce choix, le professionnel a un devoir d’information sur les différents actes qui peuvent être pratiqués lors de l’accouchement afin d’offrir à la patiente un consentement libre et éclairé.

Enfin, au cas où l’accouchement aurait été vécu comme "violent", le suivi postnatal est tout aussi important.Après le raccourcissement du séjour en maternité, les initiatives se multiplient pour assurer aux jeunes mamans un suivi adéquat.

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