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Les entreprises sociales créent-elles de la richesse ?

09/07/14
Les entreprises sociales créent-elles de la richesse ?

Outre les bénéfices en termes d’impact sociétal et d’investissements responsables, l’entrepreneuriat social participe aussi au PIB (Produit Intérieur Brut) de la Belgique. Faire du business autrement dispose donc également d’un potentiel économique.

Lire notre dossier de la semaine sur l’entrepreneuriat social

Pour Michel Marée du centre d’Économie Sociale (HEC-ULg), il y a 3 bonnes raisons d’affirmer que les entreprises sociales sont créatrices de richesse.

L’économie ne se résume pas qu’au marché

La première raison est que le secteur associatif répond à des besoins et, à ce titre, contribue directement à la création de richesses.

Pour cet expert, la perception de l’économie comme étant l’ensemble des activités marchandes réalisées en vue du profit repose sur une double confusion : d’une part, l’économie y est assimilée au marché ; d’autre part, le marché y est vu comme une institution occupée par des producteurs uniquement guidés par le souci de rentabilité maximale. «  En fait, si on en revient à la définition de base, tout manuel de science économique décrit les activités économiques de manière similaire, à savoir comme l’ensemble des processus par lesquels une collectivité affecte des moyens, a priori en quantités limitées (travail, ressources naturelles, capital...) à la production de biens ou de services destinés à la satisfaction des besoins des individus et donc à leur bien-être. »

Et de souligner que dans le cas de l’entrepreneuriat social, la notion de « besoins » est très large et ne se limite pas aux besoins dits « vitaux » (se nourrir, se loger...), mais englobe toutes les attentes des membres de la collectivité en termes d’éducation, de santé, d’action sociale, de formation, de la culture, etc.

Une participation au PIB à hauteur de 5,5 %

Dans de nombreux cas, les associations remplissent également une fonction d’innovation sociale, grâce au bénévolat et aux dons qui leur permettent de répondre de manière novatrice à des demandes non solvables qui, sans elles, resteraient insatisfaites.

Que ces activités associatives soient souvent financées hors marché (dons, volontariat, subventions, crowdfunding, philanthropie,...) ne change rien au raisonnement : elles restent comptabilisées dans les comptes nationaux et dans le calcul du produit intérieur brut. «  Certes, pendant longtemps, les économistes se sont quelque peu désintéressés du secteur associatif en tant que tel, de sorte que son poids économique - c’est-à-dire sa contribution au PIB - est resté largement méconnu en raison de la difficulté à isoler ce secteur dans les statistiques. La situation a toutefois considérablement changé depuis une dizaine d’années. Ainsi, la Banque nationale de Belgique publie chaque année depuis 2004 un ’compte satellite des institutions sans but lucratif (iSBL)’, les iSBL désignant les différentes formes associatives existant en Belgique ainsi que les fondations », explique Michel Marée.

Et selon les chiffres 2010 de la Banque nationale, le secteur associatif (hors établissements scolaires du réseau libre) représente quelque 5,5% du PIB.

Les entreprises sociales, acteurs à part entière de l’activité économique

La deuxième raison est que le secteur associatif favorise l’activité économique

Selon le Baromètre des Entreprises Sociales,l’emploi dans les entreprises sociales représente, en 2010, 11,6% de l’emploi salarié. Ces emplois donnent lieu à des revenus qui génèrent bien entendu des flux d’impôts qui reviennent aux pouvoirs publics. Ces revenus engendrent des dépenses essentiellement adressées au secteur marchand et favorisent donc clairement l’activité économique, tout comme d’ailleurs les achats que le secteur associatif effectue auprès des entreprises « classiques ».

De plus, le secteur associatif contribue aussi dans de nombreux cas à réduire les dépenses publiques. La réinsertion socio-professionnelle de personnes précarisées, par exemple, permet de soustraire ces personnes des programmes d’assistance (chômage, revenu d’intégration...), tout en créant de l’activité économique et, en favorisant la cohésion sociale (réduction des inégalités, augmentation du capital social, amélioration de la santé publique, réduction de la délinquance...).

Une plus-value sociétale non négligeable

La troisième raison est que le secteur associatif est une source d’importants impacts sociétaux

Peut-on apprécier l’importance du secteur associatif en se limitant aux flux financiers et à sa contribution au PIB ? Pour Michel Marée, ce n’est pas suffisant. Les activités associatives contribuent aussi indirectement au développement harmonieux d’une collectivité et à son bien-être en engendrant ce qu’on appelle des « impacts sociétaux » ou « collectifs ».

«  Imagine-t-on par exemple réduire l’importance du secteur de l’éducation au seul nombre d’emplois occupés et à sa contribution au PIB, sans tenir compte du rôle fondamental que ce secteur joue dans le développement socio-économique ? Ainsi, pour se limiter aux effets sur le secteur marchand, l’enseignement ne permet-il pas aux entreprises de disposer d’une main-d’œuvre qualifiée, sans laquelle leur niveau de productivité serait certainement moindre ? », illustre Michel Marée avant de souligner que ce raisonnement peut être généralisé à pratiquement tous les services produits par les entreprises sociales.

Vers une pluralité de l’économie

Et de conclure que les trois raisons qui viennent d’être invoquées, à savoir que le secteur associatif produit des services pour répondre à des besoins fondamentaux, qu’il est étroitement impliqué dans les flux monétaires liés à l’activité économique et qu’il génère des impacts sociétaux importants, font certainement des associations, des acteurs économiques certes différents mais incontournables dans les sociétés contemporaines.

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Delphine Hotua

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