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Le Relais Social du Brabant wallon alerte : "Un seul travailleur pour gérer 30 places ? Intenable"

15/05/25
Le Relais Social du Brabant wallon alerte :

Fin 2024, le gouvernement wallon a annoncé une réduction de 850.000 euros des subsides alloués aux Relais sociaux. Au sein du Relais Social du Brabant wallon, dont 85 % des subventions sont à renégocier chaque année, cette perspective suscite de sérieuses craintes quant à la poursuite de ses activités pourtant indispensables.

Le Guide Social : Le Relais Social du Brabant wallon (RSBW) est le plus jeune relais social wallon. Quel est votre mode de fonctionnement ?

Maëlle Dewaele, Coordinatrice générale RSBW : Dans les relais sociaux, on distingue les relais sociaux urbains et les relais sociaux intercommunaux. Le RSBW constitue un relais social intercommunal, car la province ne compte pas de grandes villes de plus de 50.000 habitants. Notre objectif est de coordonner tout le réseau de la grande précarité sur l’ensemble de la province, qui compte des territoires assez larges, mais avec des financements très limités. Or, la précarité en milieu rural existe et il est indispensable de la prendre en charge, non seulement pour éviter de couper l’enracinement social de personnes qui se verraient obligées de partir ailleurs, mais aussi pour éviter une trop grande concentration de personnes dans les grandes villes.

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"Nous avons peu de moyens budgétaires par rapport aux autres relais sociaux"

Le Guide Social : Votre relais bénéficie d’un des plus petits budgets. Un montant insuffisant, mais d’autant plus indispensable ?

Maëlle Dewaele : On ne nous donne clairement pas les moyens structurels nécessaires pour mettre en place toutes les actions pérennes que nous souhaitons. Actuellement, une de nos équipes dépend d’une subvention facultative liée à un appel à projets, "Territoire zéro sans-abri", dont l’objectif est de pouvoir acquérir ou construire des biens immobiliers, des terrains ou des alternatives de logements modulables pour des personnes sans-abri. Nous avons peu de moyens budgétaires par rapport aux autres relais sociaux, nous avons donc saisi à l’époque cette opportunité d’appel à projets, pour à la fois renforcer les dispositifs déjà lancés et aussi pour en développer de nouveaux.

Guide Social : Parallèlement, vous proposez également un dispositif d’hébergement d’urgence.

Maëlle Dewaele : Nous l’avons développé avec nos partenaires début 2023, ce qui a permis d’augmenter le nombre de places disponibles sur le Brabant Wallon en terme d’hébergement d’urgence. C’est un projet innovant, qui se veut une alternative à l’abri de nuit, en ce sens qu’il offre une plus grande stabilité en permettant aux personnes concernées de se poser. Et de notre côté, nous les accompagnons afin de les aider à sortir le plus rapidement possible du cycle de l’urgence. Pour le moment, il est possible d’héberger entre 19 et 24 personnes, et nous avons encore des perspectives de développement pour les mois à venir, pour approcher des 30 places. De plus, le coût de ce genre de dispositif est vraiment minime par rapport aux abris de nuit.

Guide Social : Avec le Réseau 107 Brabant wallon, vous avez aussi mis en place une Équipe Mobile Précarité.

Maëlle Dewaele : Un des constats était que, sur le Brabant Wallon, très peu de dispositifs spécialisés existaient en matière d’accompagnement des sans-abris. Nous avons donc développé une équipe mobile pluridisciplinaire qui va à la rencontre des personnes sur leur lieu de vie. L’objectif étant de les orienter vers les services psycho-médico-sociaux compétents et de les aider à accéder à leurs droits.

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"Il est très difficile de se projeter pour la fin d’année et encore plus difficile pour l’année prochaine"

Guide Social : Suite à l’annonce de réduction des subsides, quelle est l’évolution de la situation en ce premier semestre 2025 ?

Maëlle Dewaele : Ces derniers mois, nous avons relancé à plusieurs reprises le ministre wallon des Solidarités, Yves Coppieters, et son cabinet. Suite aux différentes entrevues qui ont eu lieu, les dernières nouvelles semblent plus nuancées par rapport à la perte de subsides facultatifs annoncées initialement, mais nous n’avons encore aucune confirmation écrite officielle. On sait que le cabinet du ministre travaille sur la mise en place d’une stratégie de lutte contre le sans-abrisme, mais on va probablement rester dans le flou jusqu’à la rentrée. Régulièrement, des questions parlementaires sont posées par les différents relais sociaux afin d’obtenir des réponses les plus claires possibles, mais on ne les a pas vraiment obtenues jusqu’à présent.

Guide Social : Rien de vraiment rassurant donc ?

Maëlle Dewaele : Nous avons développé nos projets sur base des manques et des besoins du territoire, mais tous ces projets se retrouvent actuellement dans le flou, avec pour le moment une date fatidique du 14 novembre au-delà de laquelle nous n’avons aucune perspective. Ainsi, dans le cadre de notre dispositif d’hébergement d’urgence, on risque de se retrouver avec un seul travailleur pour gérer 30 places, ce qui est tout bonnement intenable. Notre budget est de 117.000 euros, qui permet de financer un temps de travail et quelques petits accommodements, mais pas plus.

Pour le reste, nous devons chercher en permanence des moyens de financement facultatifs pour pérenniser des projets qui n’existent pas sur le territoire et qui répondent à des vrais besoins. Ces subventions facultatives proviennent principalement de la Région wallonne, mais aussi des niveaux fédéral et provincial, et réintroduire à chaque fois ces demandes nécessite beaucoup d’énergie. Et voilà à présent qu’il est très difficile de se projeter pour la fin d’année et encore plus difficile pour l’année prochaine.

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"Notre plus-value tient dans cette créativité et ces collaborations avec l’ensemble du secteur"

Guide Social : Le Brabant wallon véhicule une image de province économiquement riche. Pensez-vous que cette perception puisse parfois jouer en votre défaveur ?

Maëlle Dewaele : La mise en place du Relais a permis de casser cette image, tout comme la vision d’un sans-abrisme qui n’existerait que dans les grandes villes. L’avantage que nous avons est que nous étions un territoire presque vierge en matière de structure d’accueil. Le fait que peu de choses existaient nous a permis de nous montrer très créatifs et de mettre en place des dispositifs qui répondent à la réalité de la province.

En trois ans, notre relais s’est bien développé, avec aujourd’hui une équipe de 20 travailleurs et une bonne collaboration avec l’ensemble de nos partenaires. De plus, nous essayons toujours d’être complémentaires de ce qui existe déjà, et là où il y a des besoins. Notre plus-value tient dans cette créativité et ces collaborations avec l’ensemble du secteur. L’objectif étant de travailler sur l’intersectorialité dans les différents projets que nous portons.

Propos recueillis par O.C.



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