A l'écoute des familles de jeunes radicalisés
A Schaerbeek, deux sociologues ont mené des recherches sur la radicalisation des jeunes. Leur étude, sujet de leur ouvrage "Mon enfant se radicalise", s’intéresse aux processus de radicalisation et au rôle des familles. Ils ont ainsi mené le projet "Rien à faire, rien à perdre" afin d’échanger avec les familles des radicalisés et des accompagnants professionnels .
La commune de Schaerbeek, touchée par le départ de certains de ses jeunes vers les zones de conflit, a mis en place depuis 2013 des mesures de prévention de la radicalisation violente. Elle s’appuie pour cela sur le secteur de l’Aide à la Jeunesse. Parmi ces mesures, le projet "Rien à faire, rien à perdre" des sociologues Isabelle Seret et Vincent De Gaulejac, qui a instauré des espaces d’échange avec les familles des jeunes radicalisés et des rencontres avec les intervenants jeunesse.
Un projet de recherches
Le projet "Rien à faire, rien à perdre" est né des recherches d’Isabelle Seret et Vincent De Gaulejac dans le cadre de leurs recherches pour le livre "Mon enfant se radicalise". La sociologue et journaliste a d’abord mis en place des échanges avec les professionnels de l’Aide à la Jeunesse et des groupes de parole pour les familles de jeunes radicalisés. Des rencontres ont aussi été réalisées avec des jeunes arrêtés dans leur parcours de radicalisation. L’objectif de ces recherches était d’initier une réflexion collective sur les processus de radicalisation et de donner la parole aux familles, souvent brisées par le phénomène.
Le projet, financé par la commune de Schaerbeek et la Fondation Roi Baudouin, a également reçu le soutien du Délégué général aux droits de l’enfant de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Bernard De Vos.
Une aide pour les familles
Les groupes de parole initiés par le projet "Rien à faire, rien à perdre" ont mis en lumière le désespoir des parents, mais aussi leur honte, face à la radicalisation de l’un de leurs enfants. Dans une interview à la RTBF, Isabelle Seret explique qu’il s’agissait de "rendre la capacité éducationnelle des parents", notamment pour les fratries. En effet, les autres enfants sont des victimes collatérales de la perturbation de la structure familiale lorsqu’un membre de la fratrie se radicalise. Il s’agissait aussi pour les familles de mettre de mots sur leur histoire et sur leur perception du phénomène. Dans la lutte contre la radicalisation, le rôle de l’accompagnement et de l’information des familles est ainsi particulièrement important. Pourtant, à Anderlecht, les responsables de projets ont remarqué qu’il s’agissait du volet le moins efficace de leur politique de prévention.
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Pour plus de prévention
Isabelle Seret déclare au micro de la RTBF qu’aujourd’hui, "le discours est plus sécuritaire que tourné vers la prévention" et encourage à s’orienter vers la seconde option. Elle expose notamment le problème de l’information des jeunes face à des problématiques sensibles, qui ne trouvent personne pour répondre à leurs questions et sont donc plus sensibles à la propagande extrémiste sur internet. La formation des intervenants jeunesse est ici particulièrement importante, puisqu’ils sont des interlocuteurs privilégiés des jeunes en difficulté. Des initiatives comme le projet YARIM permettent ainsi de former les acteurs de l’Aide à la Jeunesse aux questions religieuses et politiques parfois taboues.
Dans la continuité de "Rien à faire, rien à perdre", des outils pédagogiques ont été mis au point pour prévenir la radicalisation violente. D’anciens radicalisés et leurs familles ont ainsi réalisé des vidéos qui racontent leur expérience. Des spectacles et des jeux de rôles sont aussi organisés pour sensibiliser les jeunes.
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