Recours contre la loi De Block relative au statut de la psychothérapie
Pour montrer leur vive opposition à la loi relative au statut de la psychothérapie de la ministre de la Santé, Maggie De Block, plus de 140 psychothérapeutes francophones et néerlandophones ont décidé d’introduire un recours en annulation et en suspension auprès de la Cour constitutionnelle.
Depuis mai dernier, date à laquelle le projet de loi avait été déposé par la ministre de la Santé, Maggie De Block, plusieurs réactions se sont fait entendre de la part du secteur. Si certains supportent la ministre car ils estiment qu’elle a clarifié la situation, d’autres, en revanche, n’apprécient pas qu’elle les privent d’un métier qu’ils exercent depuis des années. C’est le cas du collectif citoyen Alter-Psy, groupe Facebook, de qui est né un manifeste citoyen. Un recours en justice contre la loi de la ministre De Block, coordonné et financièrement soutenu par le collectif, a été introduit. Dans un Communiqué (ci-dessous), Alter-Psy a fait savoir pourquoi il entamait cette action.
Un bon diplôme
Il y a 3 mois, la ministre de la Santé, Maggie De Block faisait voter, en urgence, par le parlement fédéral, une loi révisant, entre autres, le statut de la psychothérapie, abrogeant ainsi une loi qui avait été adoptée en avril 2014, à une large majorité parlementaire, après pas loin de 15 ans de concertation avec les professionnels du secteur et qui devait entrer en vigueur le 1er septembre 2016. Avec cette révision, depuis le 1er septembre, date de son entrée en vigueur, la majorité des psychothérapeutes se retrouvent « hors la loi » et sont supposés ne plus pouvoir exercer.
En effet, la nouvelle loi réserve l’exercice autonome de la psychothérapie aux seuls détenteurs d’un « bon diplôme », entendez : un titre relevant de la loi relative aux soins de santé. Parmi eux, des podologues, dentistes et bandagistes formés à la psychothérapie qui disposeraient du bagage pour exercer de façon autonome, alors que des assistants sociaux, des assistants en psychologie, des sociologues, des éducateurs, des philosophes eux aussi formés, seraient contraints de se placer sous la tutelle des premiers. Non seulement cette loi met de facto de nombreux professionnels sérieux dans l’impossibilité de poursuivre leur pratique privée, mais elle démontre la totale méconnaissance par la Ministre et par le législateur des réalités du terrain qu’ils prétendent réglementer et conduit à des aberrations...
Des soi-disant mesures transitoires
Contrairement à ce que la ministre a voulu faire croire, la loi ne comprend aucune mesure transitoire permettant aux praticiens en exercice, parfois depuis plus de 30 ans, de faire valoir leur expérience acquise. Ainsi, du jour au lendemain, de nombreux psychothérapeutes compétents et sérieux qui, après des années de formations, de supervisions et de pratique, peuvent se targuer de faire ce métier de longue date, se voient contraints de renoncer à leur pratique et de délaisser leurs patients.
Par conséquent l’accès à la psychothérapie est aujourd’hui rendue (sic) extrêmement difficile, plusieurs milliers de patients devant désormais se retourner vers des structures, pour certaines déjà débordées. Cette situation est profondément inacceptable.
Une action en justice
Dans ce contexte, plus de 140 psychothérapeutes francophones et néerlandophones, représentés par Maître Letellier (cabinet d’avocats B49 à Bruxelles), ont décidé d’introduire, ce 27 octobre, un recours en annulation et en suspension auprès de la Cour constitutionnelle, aux motifs du préjudice grave et difficilement réparable qui découle d’une violation de leurs droits fondamentaux, et de la discrimination dont ils font l’objet.
Par ailleurs, sous couvert d’une intention d’inscrire la psychothérapie dans le système de remboursement INAMI et de préparer des « trajets de soins », qui répondent aux seuls impératifs économiques de « gestion de la santé publique », la ministre plonge la plupart des milieux professionnels concernés (institutions, associations, regroupements 2 professionnels, écoles de formation) dans un système de pensée qui tend à la déshumanisation des soins et de la relation d’aide au profit du contrôle et, nous le constatons, de l’exclusion des « mauvais patients ». Ce faisant, la ministre a, purement et simplement, kidnappé une pratique - ne lui en déplaise : un métier ! - qui existe depuis des décennies qu’elle cherche à réduire au rang d’une technique de soins de santé alors qu’il relève, profondément, des sciences humaines.
Le collectif Ater-Psy
Depuis mai, Alter-Psy (www.alter-psy.org), un collectif citoyen de psychothérapeutes et praticiens de la relation d’aide de toutes orientations intervenant à titre indépendant ou en institutions, conteste activement l’orientation de cette loi. Cette contestation se concrétise par cette première action en justice, qu’Alter-Psy coordonne et soutient, avec l’adhésion de plusieurs associations et fédérations professionnelles dont l’Association belge de Psychothérapie/Belgische Vereniging voor Psychotherapie (ABP/BVP), la Plateforme des Professionnels de la Santé Mentale (PsySM), l’Association des Psychologues Praticiens d’Orientation Psychanalytique (APPPsy), l’Union Professionnelle des Psychologues (UPpsy), la Fédération belge des Psychothérapeutes Humanistes centrés sur la personne et Expérientiels/Belgische Federatie voor Humanistische, Experïentïele en persoonsgerichte Psychotherapeuten (FPHE-FHEP) et la Confédération des associations d’orientation psychanalytique (CAOP). Ce recours, fondamental pour permettre à l’ensemble des professionnels de poursuivre légalement leur pratique, devrait prochainement se voir complété de contestations juridiques sur le fond.
Pour plus d’informations sur Alter-Psy ou sur le recours, c’est ici
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