Tribunal de la famille : l'enfant et sa parole en justice

Avec l’instauration du tribunal de la famille et de la jeunesse (TFJ), l’organisation judiciaire belge s’est sensiblement modifiée. Parmi les changements majeurs constatés : l’audition du mineur d’Í¢ge devant le juge.
L’audition du mineur devant le juge relève désormais de la chambre de la jeunesse, division du tribunal de la famille et de la jeunesse. Y sont soumis les litiges protectionnels relatifs aux mineurs en danger pour lequel un recours à la contrainte est nécessaire, ainsi qu’aux mineurs ayant commis un fait qualifié d’infraction (FQI) ou encore aux mineurs dont les parents ont été déchus de leur autorité.
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L’enfant auditionné par le juge de la famille
Dorénavant une distinction est faite selon que :
– le mineur a moins de 12 ans. Dans ce cas, dans les matières qui le concernent, il peut être entendu, selon l’avis du juge, soit à sa propre demande, soit à la demande des parties, du parquet ou du juge. Un formulaire n’est pas envoyé à ses parents pour l’informer de ce droit à être entendu.
– le mineur a 12 ans ou plus. Dans ce cas, le juge fait savoir au mineur qu’il a le droit d’être entendu. Ce n’est que si le mineur souhaite être entendu que le juge le convoquera. Cependant, le jeune peut refuser de comparaître. Cette convocation se fait par un formulaire envoyé chez les deux parents qui sont tenus d’y répondre.
Le juge entend dorénavant l’enfant « seul ». La loi ne permet plus de déléguer cette compétence à un service spécialisé ni que cette audition se fasse en présence d’un avocat. Il est prévu que cet entretien soit consigné, joint au dossier et que le mineur d’âge en soit informé. Lors de l’entretien, si le juge estime que le mineur n’a pas le discernement nécessaire, il doit l’indiquer dans son rapport d’audition.
Une justice trop peu adaptée aux mineurs d’âge
Le service droit des jeunes de Bruxelles accueille positivement le droit pour un mineur d’âge d’être entendu par le juge dans les matières qui le concernent. Par contre, il regrette la suppression du droit pour le mineur d’âge d’être accompagné par un avocat ou une personne de confiance lors de son audition : « nous pensons que cet accompagnement peut être utile pour certains jeunes qui ont besoin d’être rassurés dans cette démarche. La loi prévoit bien une ouverture en prévoyant que le juge puisse y déroger par une décision motivée mais nous craignons que les juges en fassent une application trop restrictive et que peu de jeunes osent écrire au juge pour demander à être accompagnés pour cette audition en utilisant les arguments permettant de convaincre un juge. »
D’autres acteurs de la jeunesse, tels le DGDE (Délégué général aux Droits de l’Enfant) et l’Observatoire ont dénoncé une occasion manquée d’une justice vraiment adaptée aux mineurs d’âge. Un point de vue que partage l’organisation CODE, la Coordination des ONG pour les Droits de l’Enfant : « nous regrettons que les enfants de moins de 12 ans ne soient pas informés formellement et systématiquement de la possibilité d’être entendu, que le droit de l’enfant d’être entendu se limite aux matières qui le concernent et qui relèvent de l’autorité parentale, de l’hébergement ou de son droit aux relations personnelles, et que le droit d’accès autonome à la justice n’ait pas été abordé et élargi pour les enfants. »
Entre la quête du juste et du bon
Reste que, comme le relève Olivier Limet, conférencier spécialiste des mutations familiales, dans une situation où un mineur est concerné par un conflit, le fond du débat porte essentiellement sur : « l’équilibre entre les droits de l’enfant à vocation d’autonomie, de liberté, d’émancipation, souvent nommés dans le langage courant ’droits de l’enfant’, et ceux à vocation de protection, que l’on retrouve régulièrement sous la dénomination de ’besoins de l’enfant’ ou encore ’bien de l’enfant’. On pourrait faire le lien entre les premiers en tant que quête du ’juste’ et entre les seconds et la quête du ’bon’. »
Delphine Hotua
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