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Iris : "Le personnel se détruit la santé... à soigner les autres !"

05/06/19
Iris:

La colère gronde au sein des hôpitaux du réseau Iris. Le personnel dénonce une charge de travail qui ne cesse de croître et l’impact catastrophique des mesures budgétaires menées par le Fédéral. Trop, c’est trop ! Pour faire entendre leur souffrance, les travailleurs, via le front commun syndical, ont mené une grève ce lundi 3 juin.

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« La situation au sein des hôpitaux du réseau Iris est d’une violence inouïe. Le personnel soignant travaille la boule au ventre. Et puis, vous savez, quand il quitte l’hôpital c’est le soulagement. Il se dit : ouf, je n’ai pas connu de gros soucis dans la journée », alerte Carine Rosteleur, secrétaire régionale CGSP. Elle tire la sonnette d’alarme : « Les travailleurs se détruisent la santé… à soigner les autres. C’est inimaginable ! Ils en sont arrivés à un point où ils préfèrent qu’un patient meurt car ils sont absents car partis en grève plutôt qu’il meurt à cause de leur incapacité à offrir assez de présence ou de soins. »

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« Le personnel a voulu marquer un grand coup »

La grève menée par les travailleurs des CHU Brugmann, CHU Saint-Pierre, Institut Bordet, Huderf et Hôpitaux Iris Sud avait notamment pour objectif de rappeler le cahier de revendications du secteur des pouvoirs locaux bruxellois. « Il y a un an, nous avons remis ce fameux cahier aux autorités locales qui se sont débinées, en arguant qu’elles n’étaient pas compétentes. Il a donc fallu programmer une réunion du Comité C Iris entre les syndicats et les autorités du réseau Iris. Elle s’est tenue ce lundi. Le personnel a donc voulu marquer un grand coup en procédant à un arrêt de travail ce jour-là », pointe la syndicaliste. Concrètement, quelles sont leurs demandes ? « La revalorisation barémique d’un moins 10%, tout d’abord », répond-t-elle. « Il faut prendre en compte la lourdeur des métiers. L’engagement de personnel pour réduire une charge de travail énorme est aussi une revendication. Nous réclamons aussi le 16ème jour de congé, la prime de bilinguisme, la réduction collective du temps de travail ou encore la gratuité des frais de transport à 100%. »

Les travailleurs de ces hôpitaux publics éprouvent toutes les peines du monde à se stationner sur leur lieu de travail. Un vrai parcours du combattant ! « A Jette, par exemple, l’abonnement du parking a augmenté et les places de stationnement gratuites ont été supprimées. C’est la catastrophe pour se rendre au travail », ajoute-t-elle. « Le personnel soignant a des horaires irréguliers et/ou décalés. Impossible de se passer de la voiture quand on commence à l’aube ou quand on termine tard. Il est donc urgent de revoir les critères de stationnement à l’intérieur du campus avec une priorité au personnel qui travaille en horaire décalé. Certains travailleurs ont régulièrement des P.V. Après avoir passé une journée d’enfer, tomber sur cette mauvaise surprise, c’est le coup de grâce. »

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L’administratif au détriment des patients

A ce tableau déjà bien morose, il faut également rajouter l’impact catastrophique sur ces hôpitaux de l’allongement des études des infirmières, passées de 3 à 4 ans. « Personne n’est sorti de l’école cette année. Or, beaucoup de travailleurs sont partis à la pension », s’inquiète celle qui a été infirmière durant 16 ans. « Alors qu’il y a déjà une pénurie, elle va s’aggraver dans les dix ans à venir. Ça va être catastrophique. Sans compter que depuis l’augmentation de 3 à 4 ans, on constate une réduction de 50% des inscriptions. C’est super inquiétant. »

Les mesures budgétaires menées par le Fédéral ces dernières années restent également au travers de la gorge des travailleurs. Sur le terrain, au quotidien, elles ont eu des conséquences épouvantables. «  Pour les cinq hôpitaux Iris, c’est moins 15 millions d’euros pour l’année 2018 ! On est clairement face à un sous-financement structurel. Sans compter toutes les exigences administratives extrêmement pesantes pour le personnel soignant. Actuellement, on met beaucoup de pression sur les soignants pour qu’ils accomplissent toutes ces procédures. Et tout cela au détriment du patient. Pendant qu’ils font de l’administratif, ils ne s’occupent pas des patients. »

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« Aucune réduction d’effectifs en 5 ans ! »

Suite à l’arrêt de travail du personnel des hôpitaux publics bruxellois, Philippe Leroy, le directeur général du CHU Saint-Pierre à Bruxelles, a affirmé qu’il était à l’écoute du secteur hospitalier, des syndicats et du personnel. « En toile de fond des revendications, nous retrouvons le sous-financement du secteur hospitalier en Belgique et de l’hôpital public à Bruxelles en particulier. C’est la base de la revendication et je suis solidaire dans cette recherche de financement », précise-t-il.

Reste que le personnel soignant regrette également un manque de considération. « Je pense que cette grève avait surtout pour mission d’alerter sur des budgets réduits dans certains endroits et sur les efforts demandés aux personnels durant ces derniers années », répond-t-il. « Donc oui, il y a un sentiment de fatigue et de lassitude que j’entends beaucoup sur le terrain. »

Voici notre interview en vidéo :

Une chose est certaine : le personnel du réseau hospitalier Iris n’est pas près de lâcher l’affaire. La mobilisation va se poursuivre et les travailleurs espèrent bien étendre leur mouvement au secteur privé ou bien encore aux maisons de repos. Faire entendre leur voix auprès des futurs mandataires politiques est leur mission.

E.V. avec A.AH. ET B.T.



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