Handicap et déconfinement ? Pas de mesures précipitées sans concertation
La Première ministre Sophie Wilmès a composé un groupe de travail dont la mission est de plancher sur la sortie progressive du confinement. Parmi les experts réunis autour de la table, aucun représentant ou presque du secteur psycho-médico-social… Face à cette absence de concertation, le Guide Social a souhaité donner la parole aux acteurs de terrain. Ils vont livrer leurs priorités ainsi que leurs recommandations pour l’après-crise, pour le déconfinement. L’asbl Inclusion, association pour la qualité de vie et la participation des personnes avec un handicap intellectuel, ouvre le bal.
Depuis le début de la crise du coronavirus, nous n’avons eu de cesse de relayer les difficultés vécues par les personnes en situation de handicap, par leurs familles et par les professionnels qui les entourent. Force est de constater que ces voix ont eu beaucoup de difficulté à percer et qu’elles commencent seulement, aujourd’hui, à devenir suffisamment audibles pour que les décideurs politiques fassent, parfois, référence aux réalités vécues par les personnes en situation de handicap dans leurs communications officielles.
Alors que le déconfinement se prépare, doucement, il serait regrettable que les associations représentatives, les conseils consultatifs existants (au fédéral et dans les entités fédérées) et l’ensemble du secteur ne soient valablement représentés lors des discussions sur la stratégie à mettre en œuvre. La composition actuelle du groupe fédéral d’experts sur le déconfinement confirme nos craintes quant à la non-représentation des personnes en situation de handicap.
L’incompréhension d’une partie du secteur concernant la mesure prise le 15 avril sur la réouverture des visites dans les centres pour les personnes en situation de handicap, entre autres, montre que la réalité du terrain n’a pas suffisamment été entendue, notamment en ce qui concerne le déficit en termes de matériel de protection, de moyens humains et de dépistages généralisés. Cela montre une fois encore toute l’importance d’entendre tous les acteurs, en ce compris les personnes en situation de handicap elles-mêmes, afin que les mesures soient réalistes et répondent aux besoins, sans générer de faux espoirs et d’inquiétudes des familles.
Nous ne sommes ni des professionnels de la santé, ni des épidémiologistes mais en tant qu’association représentative de personnes avec un handicap intellectuel, nous avons néanmoins les idées très claires sur les urgences auxquelles il faudra répondre en premier lieu. Nous pensons à ces familles monoparentales, à ces parents âgés qui peinent à gérer le quotidien avec un adulte en situation de handicap, à ces enfants et adultes en manque de repères, aux situation très compliquées liées à des troubles du comportement, aux enfants de l’enseignement spécialisé sans suivi depuis de nombreuses semaines, aux tensions qui montent parfois au sein des familles ou des institutions, et bien d’autres encore.
Ce sont donc à eux à qui il faudra penser en premier lieu, en rouvrant, notamment, les centres de jours, en remettant en marche les services d’accompagnement, les services de répit, en assurant le transport vers les écoles, en développant des soutiens pour les familles qui n’en avaient déjà pas avant la crise et dont la situation se sera encore aggravée.
Pour prendre ces mesures, il faudra d’abord s’assurer que les professionnels qui sont en première ligne en aient les moyens et puissent répondre à ces demandes dans les meilleures conditions possibles afin d’offrir aux personnes en difficulté un retour à la normale en toute sécurité, le plus rapidement possible.
Ensemble, c’est certain, si tout le monde est entendu, nous y arriverons.
Thomas Dabeux
Secrétaire politique d’Inclusion asbl
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