Reprendre des études à 34 ans pour devenir aide-soignante : le début d’un parcours qui a du sens
Des salles de classe aux couloirs des hôpitaux, ma formation d’aide-soignante a été bien plus qu’un simple apprentissage technique. Entre théorie, stages au cœur de la réalité et réflexions personnelles, elle m’a permis de grandir, de douter parfois, mais surtout de donner du sens à ce que je fais. Ce parcours ne s’arrête pas à la fin de la formation et il appartient à chacun de le construire à sa manière.
[Dossier :]
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- Aide-soignante : indispensable mais méprisée par ses pairs et la société ?
De retour sur les bancs de l’école à 34 ans
Comment vous dire... ça n’était pas quelque chose que j’avais envisagé et encore moins planifié. Mais les sirènes m’ont appelée et je n’ai pas pu résister. Attention pas les sirènes qui sortent de vagues histoires marines mais celles des ambulances. Ayant fait de l’hôpital ma deuxième maison quand j’étais bénévole, en vérité ma résidence principale, le virus du prendre soin m’a contaminée.
Une fois la petite mais brutale bataille entre mon appétence pour la connaissance et l’appréhension de mon entourage face à une "certification de plus", est arrivée l’étape de l’inscription.
Après avoir franchi les lourdes et imposantes portes en bois du hall, je me retrouve au cœur de l’établissement, plongée dans une effervescence féminine. Des sœurs et des amies qui essaient de se détendre en riant, des mamans stressées qui établissaient déjà les conditions de réussite. Quelques jeunes hommes qui rassuraient ou faisaient les cent pas avec leur belle. Puis les solitaires, tout sourire avec une pointe d’appréhension quand même, en mode "Veni, vidi, vici". Même si parfois le "Vici" manquait à la fin.
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J’ai donc fait mon chemin tant bien que mal vers la pancarte "Inscription Aide-Soignante".
Pendant un instant, je me suis demandé si j’étais venue m’inscrire à un casting ! Des chaises installées et occupées le long des murs qui entouraient l’imposant escalier en bois. Petites fiches à compléter avec les coordonnées. Ensuite on vous appelle un à un.
À chaque ouverture de porte du secrétariat, on essayait de deviner le scénario qui s’était déroulé :
- "On vous rappellera"
- "Vous pouvez revenir dans quelques mois ou l’année prochaine"
- "Désolée mais ça ne va pas être possible"
- "Vous commencer dans 2 semaines"
Après l’inscription validée, reportée ou refusée, vient le jour tant attendu et pourtant redouté, "la rentrée".
Anatomophysiologie
Ça y est, on sort officiellement du commun des mortels pour entrer dans celui des soignants.
C’est le premier cours par lequel j’ai commencé ma formation. Le ton était donné et un nouveau langage était à apprendre. En réalité, je dirais même : une autre culture. Car au-delà du vocabulaire, c’était une nouvelle façon de voir, de comprendre et d’agir, que l’on devait découvrir.
Tout comme lorsqu’on part à la découverte d’un nouveau pays :
- Certains viendront avec de gros sabots en voulant imposer leur façon de faire et voir les choses.
- D’autres penseront qu’apprendre par cœur le compendium suffira à les tirer d’affaires.
- Ou encore que la théorie n’est pas vraiment nécessaire car "le feeling il n’y a que ça de vrai."
En réalité, tout n’est pas si catégorique. Comme le dit l’infirmier Hervé Menaut : "Les soins techniques ont une dimension relationnelle, les soins relationnels ont une dimension technique." La technique ne va pas sans le relationnel et inversement. Un peu comme le yin et le yang.
C’est donc grâce aux différents cours et formateurs, qu’une vue plus large et profonde du monde des soignants est acquise. Petit à petit, les compétences apprises se joignent naturellement à votre savoir-être et savoir-faire (en somme ce que vous êtes).
Après quelques mois passés sur les bancs de l’école à affiner vos compétences et votre savoir, vient le 1er grand saut : les stages !
Oh j’allais oublier ! Avant ça, dès votre premier jour de formation, attendez-vous à voir vos amies, vos voisins ou même Tatie Danielle, demander votre avis sur le traitement donné par le médecin. Vous faire la liste de leurs symptômes et vous demander un diagnostic. Ou encore cousin Germain venir avec son poignet clairement fracturé et vous demander si il faut vraiment aller aux urgences..
Les petits et les gros bobos ça sera pour vous. Même si vous leur dites que vous ne faites pas médecine, pour eux c’est pareil : "On fait partie de la même maison."
Stages : la découverte sur le terrain, le moment de vérité !
Revenons-en aux stages ! Cette petite boule au ventre qui rappelle celle de la rentrée mais cette fois teintée d’appréhension et d’impatience. Soyons honnêtes : le niveau d’impatience sera différent en fonction de votre lieu de stage.
Conformément à votre établissement de formation, vous pourrez choisir vos lieux de stage (souvent entre raisons et sentiments), et dans le cas contraire, ils vous seront imposés. Quoi qu’il en soit, vous apprendrez beaucoup, même ce que vous pensiez connaître !
La découverte sur le terrain est un peu le moment de vérité. C’est la confrontation entre ce que vous aurez appris, imaginé… et la réalité. Comprendre qu’il n’y a pas de petites tâches et que chaque action a des répercussions importantes. Par exemple, quand vous connaîtrez l’odeur de l’escarre et entendrez la douleur du patient, vos réfections de lit seront impeccables et chaque centimètre carré de peau sera observé avec attention pendant la toilette.
Ou encore vous découvrirez que parfois être vous-même et vous présenter aux patients (et famille) par votre prénom pourra faire la différence. Une relation de confiance naitra et la coopération au soin également. Vous verrez aussi qu’il existe des équipes soignantes bienveillantes prêtes à vous faire confiance.
Bien sûr, il y aura également des déceptions, des incompréhensions et des larmes qui couleront. Peut-être pour un patient décédé, une collègue avec une vision "du prendre soin" totalement opposée à la vôtre ou un chef aux airs de grand vizir. Cependant toutes ces situations vous aideront à vous construire.
Les stages sont un espace-temps où vous allez prendre conscience de vos capacités professionnelles, organisationnelles, émotionnelles et physiques.vEn somme, vous allez tester et prendre conscience de vos compétences d’adaptation en condition réelle. C’est la meilleure période pour mettre en place et ajuster les bases de votre future vie professionnelle.
Qu’en est-il de l’immersion sur le terrain une fois diplômé(e) ?
Votre avenir, c’est à vous de le découvrir et de le créer. Continuez à apprendre, créer et soyez toujours curieux(se) et observateur(trice) !
Vous pouvez continuer à évoluer professionnellement vers le rôle d’assistant en soins infirmiers, infirmier et pourquoi pas médecin ? Cependant, même si c’est le métier d’aide-soignant qui fait battre votre cœur, ne vous freinez pas dans les formations. Qui a dit que les aides-soignants ne pouvaient pas augmenter leur savoir et leurs compétences, parce qu’ils en ont envie ?
Être diplômée aide-soignant(e) ne marque pas une fin, mais le début d’une vie professionnelle à tracer avec le cœur, la tête et beaucoup d’humanité.
Z.I.K., soignante
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