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Réforme APE : le miroir aux alouettes !

15/05/18
Réforme APE : le miroir aux alouettes!

Entre changements qui font craindre pour le maintien des emplois existants et conditions de réalisation incertaines… Le secteur de la jeunesse appelle le gouvernement à de la concertation et de la transparence !

Le nouveau Ministre de l’emploi wallon trace sa route. Pierre-Yves Jeholet a bien l’intention de faire place nette et de remettre les choses en ordre dans les aides à l’emploi. Il vient d’en lancer la mesure phare : la suppression du plan d’Aide à la Promotion de l’Emploi (APE) qui n’atteindrait pas les retours sur investissement. Selon le Gouvernement, il coûte trop cher à la Région et ne rencontre pas ses objectifs prioritaires. En plus, trop d’aides auraient été accordées de manière abusive. Pour ce faire, la méthode est radicale et sans appel : on arrête la machine, on remise le tout et - hop - on reprend un nouveau cap… Les associations de jeunesse craignent d’être laissées pour compte.

Le Secteur de la Jeunesse fait partie de ceux qui occupent un nombre important de ces emplois dits « APE ». Ils représentent en moyenne 50% de l’effectif total de ses travailleurs. Le secteur regroupe près de 300 associations rassemblant des milliers de jeunes au quotidien. Elles organisent la tenue de quantité d’activités chaque jour après l’école, le week-end ou durant les vacances scolaires. Nous sommes loin de projets douteux dénoncés par le Ministre de l’Emploi ! Il s’agit surtout de la nécessaire opportunité pour nos jeunes de pratiquer de la musique, du sport, du théâtre ou bien d’autres disciplines mais également de développer des actions citoyennes, des projets participatifs, des projets de solidarité locale ou ailleurs dans le monde.

Au moment de supprimer le dispositif APE, que restera-t-il des postes de travail et des missions accomplies jusqu’ici par les associations bénéficiaires ? Douze fédérations du Secteur de la Jeunesse se réunissent pour tirer la sonnette d’alarme sur toute mesure qui précariserait les actions portées pour les jeunes en Wallonie.

 [A lire] : APE, les ASBL doivent-elles paniquer ?

Oui à l’opportunité d’une réforme, non à la précipitation !

L’ensemble de la réforme doit être bouclé pour le 31 décembre 2018 au plus tard. Elle implique l’abrogation d’un décret, la consolidation d’un nouveau cadre budgétaire et la mise en place d’une nouvelle réglementation qui doit instaurer « une meilleure utilisation des crédits budgétaires, plus objective et équitable ». La nouvelle affectation des postes et des budgets devrait être assurée par les ministres de tutelle au niveau de chaque compétence de la Région Wallonne et de la Fédération Wallonie-Bruxelles (Jeunesse, Culture, Sport, Action sociale, Tourisme, …). Si le nouveau mécanisme prévu présente une série d’opportunités, comment réaliser tout cela en si peu de temps sinon dans la précipitation ? D’autant qu’à l’aube même du lancement de la réforme, certaines étapes semblent être oubliées ou négligées. Il faut constater un manque de concertation des parties prenantes et aussi de visibilité sur le sort réservé à l’existant :

 D’une part, les bénéficiaires n’ont pas été associés à l’élaboration de la réforme et se trouvent face à une opacité complète quant à la manière dont leurs postes seront transférés à un portefeuille ministériel ou à un autre. Pour la suite, les associations ne connaissent pas non plus l’usage qui sera fait des budgets et des nouvelles règles d’affectation des postes qui seront appliquées. Les associations sont laissées dans l’expectative.
 D’autre part, la Fédération Wallonie-Bruxelles n’a visiblement pas été consultée alors que cette dernière devrait prendre en charge une part du dispositif supplétif. Aucune information n’est donnée quant à la manière dont elle envisage la responsabilisation qui s’imposera à ses ministres dans la future gestion des postes. En effet, le premier projet de texte ne concerne que des mesures visant la maîtrise budgétaire. Pour la suite, le néant !

Oui à la nécessité d’une maitrise budgétaire, non au définancement !

Par nécessité de maîtrise budgétaire, le Ministre prévoit de figer le financement des emplois dans une enveloppe fermée. Si Mr Jeholet promet le maintien de l’existant, le mécanisme de gel de la subvention prévu au niveau des opérateurs ne leur garantirait pas de maintenir le montant promérité jusqu’ici ! À partir de 2019, un nouveau montant de subvention serait calculé sur base des périodes d’occupation de l’emploi sur une période de référence. Or, celles-ci ne connaissent pas un taux constant. Les associations qui auront connu une baisse inhabituelle du volume global de l’emploi durant la période de référence seraient donc impactées financièrement. Comment pourront-elles continuer à financer l’emploi alors que leur taux d’occupation sera quant à lui revenu à la normale ? Pour la suite, la subvention sera figée sans prise en compte de l’augmentation de la charge salariale liée à l’ancienneté. La subvention dévaluera ainsi à mesure de l’augmentation des barèmes. Pour autant que la subvention soit maintenue, le manque à gagner se creusera d’année en année.

 [A lire] : Bye bye les APE, welcome la marchandisation !

Oui à l’ajustement des aides, non à la perte d’emploi !

La Wallonie souhaite mieux cibler les travailleurs bénéficiaires des programmes de remise à l’emploi en touchant ceux qui en sont le plus éloignés. Certainement, mais la réforme ne peut être menée au prix des emplois existants. Les employeurs risquent de devoir assumer une réduction de leur subvention et devront dans tous les cas supporter la charge financière complète des progressions de la masse salariale. Suite à la campagne contre l’austérité, l’équilibre budgétaire des associations a déjà été soumis à rude épreuve. Une nouvelle coupe dans les finances risque fortement de contraindre les employeurs à prendre des mesures de restructuration. Au-delà de ces difficultés budgétaires, nous n’avons pas de vision ou de garantie sur la réorganisation envisagée pour l’avenir et sur les nouvelles dispositions qui pourraient voir le jour. En effet, le Ministre informe que « les octrois à durée indéterminée seront reconduits à durée déterminée ». Le maintien des postes existants à chaque association serait uniquement garanti jusqu’au 31 décembre 2020. Au-delà, cela appartiendra au ministre dont dépendront les associations. Qu’en sera-t-il ?

Oui à la réorganisation, non à la confusion !

Soucieux de la bonne gouvernance, le Ministre Jeholet a imposé un nouveau tempo à son Administration, qui a engagé un contrôle millimétré des employeurs bénéficiant de postes APE. Ironie du sort, cette volonté se traduit actuellement par des retards dans l’examen des dossiers, des erreurs de traitement et des réponses aléatoires ou inexistantes d’une administration confrontée à des effets d’annonces et des informations peu claires. Alors que les opérations menées jusqu’à présent ne concernaient qu’un nombre limité d’associations, nous sommes en droit de nous interroger sur la capacité de la Région à rassembler les moyens nécessaires pour mener cette réforme dans les meilleures conditions. Comment cela se passera-t-il avec la réforme qui implique un recalcul des subventions pour l’ensemble des bénéficiaires ?

 [A lire] : APE, votre ASBL devra-t-elle passer à la caisse ?

Face à une réforme qui se présente comme un miroir aux alouettes, le Secteur de la Jeunesse invite l’ensemble des secteurs du non marchand à se rassembler et à refuser une réforme précipitée, incomplète et sans garantie pour l’emploi et son avenir. Nous réclamons la mise en place de concertations avec le Ministre de l’Emploi et la prise en compte de la réalité de nos structures pour la réforme des aides à l’emploi.

LES FÉDÉRATIONS D’ORGANISATION DE JEUNESSE : Conseil de la Jeunesse Catholique (CJC) | Relie-F | Confédération des Organisations de Jeunesse Indépendantes et Pluralistes (COJ) | ProjeuneS | Les Scouts.

LES FÉDÉRATIONS DE CENTRES DE JEUNES : Fédération des Maisons de Jeunes en Belgique francophone (FMJ) | Fédération de Maisons de Jeunes et Organisations de Jeunesse (FOR’J) | Fédération des Centres de Jeunes en Milieu Populaire (FCJMP) | Fédération Infor Jeunes Wallonie - Bruxelles (FIJWB) | Fédération des Services d’Information sur les Etudes et les Professions (Siep) | Fédération de centres d’information pour jeunes (CIDJ) | Les Auberges de Jeunesse (LAJ).



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