Mais vous êtes quoi au juste ?

Diplômée en tant qu’assistante en psychologie depuis plus de six ans, je constate à regret que mon métier est peu reconnu, voire mal considéré. Dans ce contexte, s’installer comme indépendante complémentaire relève d’un effort constant de définition.
Dans la catégorie des professions en colère, j’appelle les assistants en psychologie… Ces travailleurs chevronnés formés à surmonter toutes formes de péripéties, pourvu qu’elles appartiennent au monde complexe de l’Aide. Focus engagé sur une situation pas toujours confortable, surtout lorsqu’il s’agit de se lancer comme indépendant.
Février 2017. Je fais mes premiers pas dans le monde du statut d’indépendante complémentaire. Comme tout débutant qui se respecte, je pousse la porte d’un organisme d’assurance sociale qui, je l’espère, pourra répondre à mes nombreuses interrogations.
Étape primordiale : l’inscription. L’interlocutrice qui me reçoit cherche sur sa liste exhaustive la petite case à laquelle je corresponds… Et je comprends à mon grand dam qu’il n’y en a pas.
[DOSSIER]
– Assistants en psychologie : nom d’un titre !
– Loi De Block : les assistants psy se redéfinissent
Qui suis-je ?
Depuis peu, n’étant pas psychologue de formation, je n’ai pas le droit d’accéder au statut de psychothérapeute. Pour bien faire, il faudrait que je sois « supervisée » par quelqu’un de quantitativement plus compétent que moi. En attendant, mon identité d’incasable ne me donne droit qu’au statut d’indépendant dont l’activité est dite « commerciale », numéro de TVA à l’appui.
Quelle ironie ! Quel joli clou planté un peu plus sur le cercueil de ces braves professionnels dont je fais partie, et considérés depuis peu comme des charlatans depuis que l’on sait (honte à eux !), qu’ils n’ont pas le saint Graal : le titre LEPSS.
« Mais… dans quelle case vais-je pouvoir vous mettre moi ? »
Eh bien justement, madame. L’assistant psy, c’est un peu une espèce hybride, incasable, le genre qu’on aime avoir dans une équipe pour sa faculté à s’adapter, à se fondre dans chaque contexte et dans chaque situation. Parce qu’il est riche l’assistant psy. Riche d’apprentissages entretenus pendant trois années d’études empiriques et orientées vers la définition du professionnel qu’il a envie d’être.
La Ministre l’a dit, les assistants en psychologie n’entrent pas dans les cases magistralement organisées par la Loi sur l’Exercice des Professions de Soin de Santé, alors, « pas d’EPSS, pas de métier valable ». Ces petits êtres vils ne sont pas capables d’exercer seuls et s’en trouveront fort aise de bénéficier d’une bonne petite surveillance pour ne pas s’égarer dans les méandres de leur non-savoir !
Ah ! Cette fameuse logique du mérite quantifié par le nombre d’années passées derrière les bancs d’école…
Qu’on se le dise : travailler avec l’humain ça nécessite de savoir manipuler les livres à la perfection, gérer les statistiques comme un expert, mais certainement pas de s’appuyer sur ses propres expériences personnelles… Même si c’est dans cette idée-là qu’une première proposition de loi avait été remise le 12 mars 2012. Une histoire de cohérence politique, sans doute. Au diable les fondements de la systémique, de la psychanalyse, et j’en passe : tous à nos blouses blanches (ça fait plus crédible) ! Enfin tous… Pas vous en fait. Vous vous êtes assistante en psychologie, vous n’entrez pas dans les cases, vous comprenez…
Davantage une question de reconnaissance
Reconnaitre la peine, tout comme reconnaitre la joie ou l’identité de l’autre est un acte essentiel pour soutenir l’épanouissement psychique d’un individu. Comment, à l’heure actuelle, peut-on négliger à ce point cette notion au fondement-même d’une pratique vouée à la reconstruire ? La Loi De Block est une dénégation de ma fonction, du métier que j’ai choisi.
Certains parlent de « l’inapplicabilité de la loi d’avril 2014 », mais je n’y vois pas les freins qui justifieraient qu’en 2016 nous en arrivions à une telle tournure, si injuste et disqualifiante pour tout un pan de travailleurs qui, jusqu’alors, avaient la chance d’exercer un métier de passion.
Intervenante psycho-sociale
Mes études ont fait de moi la professionnelle que je suis aujourd’hui et, pour rien au monde je n’en changerais. Parce que cela fait aussi partie de notre formation d’assistant en psychologie : savoir soutenir là où il y a peu d’espoir, tenir quand tout est prêt à lâcher, et avancer, parce qu’au delà du déni, il y a l’existence, tout simplement.
L.T. Assistante en psychologie
[A lire] :
– Vers des relations nouvelles grâce aux séjours de rupture
– Pour une réflexion éthique de l’aide contrainte des mineurs
– API et SAMIO : même combat ?
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