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Psychologues en soins palliatifs : "Ce travail amène son lot d'émotions"

15/10/19 # Psychologue
Psychologues en soins palliatifs:

Cathy Léonard et Alexandra Joris, deux psychologues travaillant à la Plate-forme de concertation des soins palliatifs en Province de Luxembourg, ont accepté de partager leur expérience. Elles nous racontent leur quotidien dans ce secteur trop peu connu par le grand public. Entre humanité et bienveillance…

Guide Social : Comment avez-vous commencé à travailler dans le secteur des soins palliatifs ? Ce fut un hasard ou bien une volonté ? Avez-vous fait une formation spécifique pour endosser cette fonction ?

Cathy Léonard : Ce fut une opportunité à un moment de ma carrière même si dans ma formation de base, je n’avais jamais envisagé travailler dans ce domaine. L’offre d’emploi a fait sens pour moi, en lien avec un vécu personnel et ce fut l’occasion à ce moment d’opérer un tournant dans ma carrière. Au départ, je n’avais pas de formation dans ce secteur, mais très vite, j’ai senti la nécessité de me former plus spécifiquement aux soins palliatifs de façon globale. J’ai donc choisi de suivre le certificat interuniversitaire en soins palliatifs et qualité de vie.

Alexandra Joris : Ce fut pour moi, une réelle volonté de travailler dans le domaine palliatif. J’ai tout d’abord eu une expérience en oncologie et le travail avec les personnes en fin de vie est venu comme une évidence à un certain moment de ma carrière. J’ai donc postulé de manière spontanée à la plate-forme. Mon expérience en oncologie et ma formation en psycho-oncologie glanées au fil des années m’ont aidées dans l’obtention de ce poste.

"Nous accompagnons le patient au fil de ses questionnements liés à sa fin de vie"

Guide Social : Comment se déroule votre travail au quotidien ? Quelle prise en charge offrez-vous aux patients ?

Les deux : Nous avons un bureau à Marche-en-Famenne et nous nous déplaçons à domicile dans toute la Province du Luxembourg. Nous travaillons toujours à la demande du patient ou de sa famille. Les demandes peuvent venir du personnel soignant (médecin généraliste, infirmières de l’équipe de soutien en soins palliatifs donc des 2èmes lignes avec qui nous collaborons beaucoup), des proches ou du patient lui-même. La prise en charge du patient se déroule toujours en collaboration avec les équipes du domicile qui gravitent autour de celui-ci.

Nous offrons un soutien psychologique au patient à travers une écoute active. Nous l’accompagnons au fil de ses questionnements liés à sa fin de vie, de ses craintes tout en respectant son rythme et nous le reconnaissons dans sa souffrance, le tout empreint de bienveillance et de non-jugement. Nous pouvons également l’aider à identifier ses émotions, ses besoins et ses ressources. Ces rencontres sont aussi le moment pour le patient d’évoquer avec nous sa vie, son parcours, son histoire.

Ce soutien psychologique peut bien sûr être proposé aux proches du patient tant dans la phase palliative qu’en suivi deuil. De la même manière, nous nous déplaçons à leur domicile mais les proches peuvent aussi être vus dans nos bureaux à Marche. Notre position nous permet également de proposer des entretiens de famille où à ce moment, notre rôle est davantage un rôle de médiateur afin de faire circuler la parole autour de la fin de vie dans le but d’une meilleure communication intrafamiliale. Les suivis sont sans frais pour le patient et sa famille.

"Notre plus grande difficulté ? Accompagner des patients qui peuvent réveiller en nous une forme d’identification"

Guide Social : Votre travail a son lot de difficultés mais aussi de grandes satisfactions…

Les deux : Nous avons la chance d’avoir un travail qui a du sens à nos yeux car nous accompagnons des personnes dans une phase de leur vie cruciale, remplie d’authenticité et où on touche à l’essentiel, au fondamental. Ce travail au quotidien amène son lot d’émotions bien entendu, et parfois, il arrive qu’elles s’expriment face au patient. A ce moment, il est important de mettre des mots sur l’émotion puisqu’elle est bien la preuve que nous sommes humaines et touchées par le vécu de chaque personne que l’on rencontre. L’émotion est également un outil formidable pour échanger sur ses sujets plus sensibles.

Notre plus grande difficulté actuellement est peut-être l’accompagnement des patients qui peuvent réveiller en nous une certaine forme d’identification de par leur âge, leur situation familiale, leur histoire de vie, … Pour tenir le coup dans ce travail, il nous parait primordial de se sentir soutenue par la hiérarchie, de pouvoir échanger dans la bienveillance entre collègues, de bénéficier de supervisions et de rester en lien avec les soignants du terrain.

"Nous n’accompagnons pas des mourants mais des vivants jusqu’au bout"

Guide Social : Quels conseils donneriez-vous à des jeunes diplômés qui souhaitent suivre vos pas et se lancer dans cette carrière professionnelle ?

Les deux : Il nous parait important de faire un travail personnel afin de prendre conscience de son rapport à la mort. La flexibilité et la grande capacité d’adaptation nous paraissent être des atouts essentiels en complément des qualités d’empathie, de bienveillance, d’ouverture… dont tous psychologues doivent faire preuve. Au-delà du côté douloureux de la fin de vie des patients, nous voulons rappeler que nous n’accompagnons pas des mourants mais nous accompagnons des vivants jusqu’au bout. Ce travail est donc également rythmé de moments de joie, de sourires et même de rires, nous avons même envie de rajouter, d’une rare intensité certaines fois.

Propos recueillis par E.V.

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