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Le bulletin social : "Laissez mon cash tranquille !"

12/10/20
Le bulletin social:

Dans son style particulier, T. Persons revient nous parler d’une proposition de loi de 2019 visant à rendre obligatoire la mise à disposition d’un mode de paiement électronique, qui vient d’être remise sur la table durant l’été.

« L’argent ne fait pas le bonheur de celui qui n’en a pas. »

B. Vian

Ah ! L’été… Cette saison fugace où l’on lâche prise sur la politique qui, en catimini, en profite pour remettre sur la table des dossiers que l’on croyait définitivement enterrés… Cela a fait grand bruit au sein d’associations professionnelles : fin juillet, notre ancien Gouvernement songeait à modifier le Code de droit économique concernant l’offre de paiement électronique.

Concrètement, la proposition de loi visait à rendre obligatoire la mise à disposition d’un paiement électronique pour toutes les entreprises, y compris les indépendants, les professions libérales et donc, les acteurs des soins de santé de première ligne. À la lecture du texte, on se dirait presque que c’est une bonne idée. Pensons au consommateur qui, dans de rares cabinets, n’a pas le choix que de sortir un billet pour payer sa consultation. Pauvre loulou. Ne serait-il pas opportun de lui proposer un terminal Bancontact ? C’est tellement pratique… En 15 secondes, c’est plié. Pas de billet, pas de microbes, une transaction traçable, le paradis ! Puis, c’est pas comme si ça coûtait un bras ces petites machines…

Que nenni, pauvres bougres ! Non, non, non. Un paiement électronique, c’est bien plus qu’un terminal. C’est également un virement, un paiement sans contact par smartphone. Bref, une technologie qui ne nécessite pas beaucoup d’investissement et qui permet de savoir qui paie quoi. Puis, c’est convenant, c’est pratique, ça tombe jamais en panne et ça ne nécessite pas de Wi-Fi. Ah. Si ?

Pensons aux patients…

Vous l’avez compris, plusieurs éléments viennent titiller mes sens de la même manière qu’un bruit strident ou qu’une chanson de Jean-Jacques Goldman jouée à la flûte à bec. Tout d’abord, il y a cette notion détestable de le rendre obligatoire. C’est pas comme si on allait encourager les gens, les former, leur donner les moyens de passer à l’électronique. Non, on impose, ils n’ont qu’à se démerder les asticots. Ils sont médecins, kinés, psychologues, s’ils ne sont pas pétés de thune, ils ont le ciboulot pour faire les démarches, non ? Et la liberté, dans tout ça ? Le choix ? Ah mais non, mais vous n’avez rien compris ! Le consommateur, il a le choix ! Oui, mais le professionnel, lui ?

Alors, soyez rassurés, il ne s’agit pas du tout d’une mesure pour lutter contre l’argent que l’on dissimule vilement aux impôts. Il s’agit simplement d’imposer la possibilité d’éventuellement ne plus payer en cash. Pensons aux patients… À propos de patients, est-ce qu’on ne ferait peut-être pas mieux d’imposer des soins de qualités, par des prestataires pour qui la formation continue n’est pas synonyme d’un week-end à Paris pour « assister à un colloque » ? Quitte à rendre obligatoire certaines choses, j’ai plein d’idées : Des remboursements ! Une promesse de ne pas attendre deux mois pour avoir un rendez-vous ! Une charte de qualité qui empêche le professionnel de faire tout et n’importe quoi ?

En conclusion, soyons rassurés, l’été est passé, les acteurs de terrain ont grondé, on a enterré le projet jusqu’aux prochaines fêtes, en espérant certainement que cette fois-ci, ça passe. Puis, d’un point de vue pragmatique, pourquoi s’assurer de mettre en place des lois, de faire un travail parlementaire, d’écouter l’avis d’Unions Professionnelles, et de se battre sur des questions dérisoires telle que la liberté alors qu’une crise sanitaire fait déjà le job !

T. Persons

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