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Métiers à l’hôpital : récits de soignants, salaires et réalités du terrain

28/08/25
Métiers à l'hôpital : récits de soignants, salaires et réalités du terrain

L’hôpital ne se résume pas aux médecins. Infirmiers, aides-soignants, ergothérapeutes, psychologues, clowns hospitaliers, patients-experts… une multitude de métiers contribuent chaque jour à la qualité des soins. Dans cet article, le Guide Social met en lumière la diversité des professions hospitalières, les salaires et avantages extralégaux, mais aussi les réalités du terrain à travers des témoignages authentiques de soignants et d’acteurs de la terrain.

Pousser les portes d’un hôpital, c’est entrer dans un monde où se croisent sans cesse des profils et des parcours différents. Dans un même couloir, une infirmière file vers les soins intensifs, un ergothérapeute accompagne un patient en rééducation, une psychologue soutient une famille, pendant qu’un clown hospitalier arrache un sourire en pédiatrie. Plus loin, une aide-soignante s’affaire auprès d’un malade, tandis qu’une patiente-experte partage son vécu pour améliorer la qualité des soins.

Ce microcosme foisonnant illustre toute la richesse du milieu hospitalier : des métiers visibles et d’autres plus méconnus, tous indispensables. Travailler à l’hôpital, c’est rejoindre une communauté où se côtoient savoir-faire techniques, engagement humain et possibilités d’évolution. C’est aussi un lieu de carrière aux multiples portes d’entrée.

Mais derrière cette effervescence, l’hôpital n’échappe pas aux défis : pénurie de personnel, surcharge émotionnelle et matérielle, manque de reconnaissance. Comme le montre notre enquête sur les hôpitaux magnétiques, un modèle organisationnel venu des États-Unis, l’avenir du secteur dépend de sa capacité à repenser ses modes de fonctionnement pour redonner du souffle aux soignants. Car si l’hôpital reste un lieu d’opportunités et d’engagement, il doit aussi se réinventer pour que les professionnels continuent d’y construire leur avenir.

Pour mieux cerner ces réalités, notre article pratique "Travailler dans un hôpital : zoom sur les métiers, les salaires et les avantages extralégaux" propose un panorama complet. On y retrouve les barèmes salariaux des infirmiers et des médecins, les revenus des kinés, ergothérapeutes ou logopèdes, les avantages extralégaux propres au secteur, mais aussi les limites d’un quotidien marqué par des conditions de travail exigeantes. Un aperçu essentiel avant de plonger dans les témoignages de terrain.

Au cœur de l’hôpital : récits de soignants et métiers méconnus

L’hôpital se vit au quotidien bien plus qu’il ne se décrit. Pour comprendre ses réalités, rien de plus parlant que la voix de celles et ceux qui y travaillent. Dans ce dossier, le Guide Social met en lumière des parcours variés, parfois inattendus, qui rappellent combien chaque métier hospitalier joue un rôle essentiel dans la qualité des soins.

1. Les infirmiers et aides-soignants : au cœur du quotidien hospitalier

Les infirmières et infirmiers

Derrière chaque patient, une équipe pluridisciplinaire assure soins et accompagnement. Parmi ces professions, les infirmiers restent l’une des figures emblématiques de l’hôpital : la blouse blanche qui, aux côtés des médecins, incarne aux yeux du public le quotidien hospitalier. Entre proximité avec les patients, richesse des relations humaines, charge de travail (trop) exigeante et manque de moyens, leurs témoignages offrent un aperçu concret des réalités de terrain.

  • Denis, infirmier en chirurgie cardiaque : « Des études exigeantes, des stages durs, mais aussi la complicité avec les patients qui redonne du sens chaque jour. » Malgré les difficultés et le manque de moyens, Denis reste animé par une conviction : son métier, il ne l’échangerait pour rien au monde.
  • Margaux, infirmière urgentiste : Aux urgences, chaque journée est imprévisible. Margaux insiste sur le travail d’équipe, la complicité avec ses collègues et la satisfaction immédiate d’avoir « fait une différence » auprès d’un patient. Mais elle souligne aussi la pression permanente : manque de lits, surcharge de travail, crise du Covid. Un an de pause en Martinique lui a permis de retrouver l’envie et la lucidité nécessaires pour continuer à aimer son métier.
  • Magalie, infirmière en oncologie pédiatrique : Après un passage en gériatrie, Magalie a trouvé sa voie auprès des enfants atteints de cancer. Elle évoque la richesse d’un métier où l’on accompagne à la fois l’enfant et toute sa famille, parfois dans des situations de grande fragilité. Loin d’être uniquement marqué par la tristesse, son quotidien est aussi fait de résilience et de moments de joie. « Les enfants te ramènent sans cesse au moment présent », confie-t-elle.
  • Christine, infirmière en soins palliatifs : À la tête du service « Lotus » à l’hôpital Molière, Christine rappelle que « réussir une fin de vie, c’est trop précieux ». Forte de 30 ans de carrière, elle insiste sur l’importance de l’écoute, du soutien psychologique et du travail en équipe. Si elle évoque aussi l’épuisement et les crises traversées par la profession, elle défend un accompagnement centré sur la dignité, l’apaisement et la formation continue.
  • Marion, infirmière en soins intensifs : Au CHRSM de Namur, Marion raconte un service « à deux vitesses » : entre montagnes russes de stress et moments de calme, entre la vie et la mort. Elle évoque aussi le départ de nombreux collègues depuis le Covid, mais affirme son attachement indéfectible à sa profession.
Les aides-soignantes et aides-soignants

Aux côtés des infirmiers, les aides-soignant.e.s assurent un rôle tout aussi indispensable dans le suivi quotidien des patients. Sabine, forte de 30 ans d’expérience, témoigne d’un métier parfois méconnu mais riche en humanité.

  • Sabine, aide-soignante : Avec trois décennies de carrière, elle parle d’une fonction parfois ingrate, mais profondément marquée par les petites victoires et les instants d’humanité. « Chaque journée apporte son lot d’émotions et de rencontres », confie-t-elle, rappelant la place essentielle des aides-soignants dans la qualité des soins. Et de rajouter : « Les aides-soignantes ont un réel impact sur la vie des gens. Nous pouvons améliorer leur séjour à l’hôpital, faire mieux passer la maladie et offrir du réconfort. C’est quand même exceptionnel un métier qui procure autant. »

2. Les sages-femmes : accompagner la naissance

Exercée en majorité par des femmes, la profession de sage-femme se conjugue aussi au masculin. Présents tout au long de la grossesse, de l’accouchement et des premiers instants de vie, ces professionnel·les jouent un rôle essentiel d’accompagnement médical et humain auprès des couples. À travers le parcours de Pierre-José Marsin, sage-femme au CHU de Liège, on découvre que les hommes peuvent eux aussi s’épanouir dans cette profession, longtemps perçue comme exclusivement féminine.

« Quand je me présente en tant que sage-femme, il y a toujours un effet de surprise »

Ancien infirmier de bloc opératoire, Pierre-José a repris des études à 36 ans pour suivre sa véritable vocation : devenir sage-femme. Depuis 2017, il exerce au sein de la maternité du CHU de Liège, où il accompagne les couples dans des moments intenses, souvent empreints de joie et parfois de doute. « L’accouchement n’est pas une finalité en soi : ce qui me passionne, c’est tout le cheminement avec les couples, leur confiance, la bienveillance qui se construit », note-t-il.

S’il a dû gagner sa légitimité dans un métier exercé quasi exclusivement par des femmes, il y voit aujourd’hui une richesse : « J’ai dû me montrer irréprochable pour être accepté, mais mes collègues sont devenues comme une deuxième famille. »

3. Les métiers paramédicaux : soigner autrement

Les métiers paramédicaux occupent une place centrale dans l’hôpital. Ergothérapeutes, logopèdes, psychologues ou bien encore kinésithérapeutes contribuent à la prise en charge globale du patient, en apportant des compétences spécifiques qui complètent l’acte médical. Leurs témoignages montrent des approches de soin diversifiées.

  • Yves Libert, psycho-oncologue : Yves coordonne la psycho-oncologie au sein de l’Institut Bordet, hôpital universitaire dédié à la lutte contre le cancer. Il accompagne patients, proches et soignants tout au long du parcours de soins – du diagnostic à la rémission, parfois à la rechute. Entre consultations, enseignement et recherche, il décrit un métier exigeant, fait de collaborations interprofessionnelles et d’écoute. Un rôle où la psychologie clinique se confronte aux réalités lourdes de la maladie. « Notre métier ne consiste pas uniquement à écouter en inclinant la tête. C’est un travail clinique, scientifique et relationnel à la fois », résume-t-il.
  • Séverine Piret, psychothérapeute : Depuis 25 ans, Séverine exerce en psychiatrie à l’Hôpital Van Gogh, où elle a créé un programme thérapeutique de jour centré sur l’art-thérapie et la psychothérapie sensorimotrice. Spécialisée en psychotraumatologie, elle propose aux patientes d’exprimer leurs blessures par le corps lorsque les mots manquent. « En hospitalier, les gens sont tellement mal qu’il faut leur apporter de l’espoir », observe-t-elle. Convaincue que la co-thérapie avec le patient est essentielle, elle illustre combien les approches psychocorporelles enrichissent les prises en charge psychiatriques en milieu hospitalier.
  • Mathilde, ergothérapeute : dans un service de neurologie à Bruxelles, Mathilde accompagne depuis quelques années des patients en perte d’autonomie. Elle aide à réapprendre les gestes du quotidien — se laver, ouvrir un pot, prendre le bus — avec créativité et énergie. « En apprenant le métier d’ergothérapeute, on apprend aussi à mieux se connaître soi-même : ses forces, ses limites… C’est une double découverte, du métier et de soi. Franchement, si j’avais pu inventer un métier, j’aurais créé celui d’ergothérapeute », sourit Mathilde.

4. Des rôles innovants et méconnus : patients-experts, clowns hospitaliers et médiateurs interculturels

Si l’hôpital repose sur des professions bien établies, il s’ouvre aussi à des fonctions plus récentes ou inattendues. Patients-experts, clowns hospitaliers ou médiateurs interculturels apportent un éclairage différent sur le soin. Leurs expériences montrent combien la qualité des soins repose aussi sur l’écoute, la créativité et la compréhension des diversités culturelles.

  • Catherine Vanandruel, clown hospitalier : Comédienne de formation, Catherine découvre le clown hospitalier après une expérience en théâtre de contact. Elle fonde ensuite l’association Les Clowns à l’Hôpital, qui coordonne aujourd’hui plus de 100 interventions par an. Pour elle, ce métier ne se résume pas à faire rire : il s’agit d’un véritable accompagnement, entre culture et santé, qui apaise les enfants hospitalisés et soutient les équipes. « On ne s’improvise pas clown hospitalier. C’est un vrai travail d’accompagnement », souligne-t-elle.
  • Abdel Ouadi, médiateur interculturel : Depuis plus de dix ans au CHU Saint-Pierre, Abdel facilite le dialogue entre soignants et patients lorsque la langue ou les codes culturels créent des incompréhensions. « Le médiateur est celui qui fait le pont entre les cultures », résume-t-il. Son rôle ne se limite pas à la traduction : il décrypte gestes, attitudes et non-dits pour éviter tensions et malentendus. Indispensable dans un hôpital multiculturel, il permet de gagner du temps, d’améliorer la qualité des soins et de rétablir la confiance dans la relation soignant-patient.
  • Anh-Thi, première patiente-experte de Belgique : Présente à l’Institut Bordet, Anh-Thi met son vécu de la maladie au service des autres patients atteints de cancer. Elle fait le lien entre soignants et soignés, aide à poser des questions parfois difficiles et soutient l’expression des besoins. Son rôle, encore rare en Belgique, incarne une nouvelle approche de la collaboration entre patients et professionnels.

5. Les métiers techniques : l’imagerie médicale au cœur des soins

Souvent dans l’ombre, certains métiers hospitaliers sont pourtant essentiels au diagnostic et au suivi des patients. C’est le cas des technologues en imagerie médicale, garants de la qualité des examens qui orientent la majorité des décisions médicales.

  • Vivien Meurillon, technologue en imagerie médicale au CHU Saint-Pierre : À seulement 29 ans, Vivien est déjà chef adjoint du service de radiologie, un service qui réalise chaque année 100.000 examens (scanner, IRM, échographie, angiographie…). Il insiste sur la diversité et l’importance de son rôle : « Chaque patient, à un moment ou à un autre, requiert nos services. L’imagerie médicale est véritablement un pivot autour duquel s’articulent de nombreux services de l’hôpital. » Entre la gestion des urgences, la complexité des examens d’IRM et la pénurie de professionnels, Vivien décrit un métier exigeant mais passionnant, au cœur des innovations techniques et de la collaboration pluridisciplinaire.

6. Les coulisses de l’hôpital : communication et coordination

Derrière les soins, des métiers œuvrent en coulisses et assurent la cohésion et l’information. Communication interne, gestion de crise ou coordination avec la presse : ces fonctions jouent un rôle clé dans le quotidien hospitalier.

  • Frédéric Dubois, directeur de la communication à HUmani : Ancien journaliste, Frédéric a rejoint en 2018 l’Intercommunale de Santé Publique du Pays de Charleroi (appelée aujourd’hui HUmani). À la tête d’une équipe de cinq personnes, il pilote la communication interne et externe d’un réseau qui compte cinq hôpitaux, plusieurs polycliniques, crèches et maisons de repos. Son rôle s’est révélé essentiel pendant la pandémie, entre communication de crise, lutte contre les rumeurs et soutien moral aux équipes. « La communication est un pilier fondamental : elle rassemble, rassure et donne du sens », pointe-t-il. Aujourd’hui encore, il reste convaincu que transparence, réactivité et empathie sont les clés d’une communication hospitalière efficace.


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