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Le néolibéralisme et son impact sur le personnel de la santé

26/07/19
Le néolibéralisme et son impact sur le personnel de la santé

Les grandes institutions viennent de jouer le jeu des chaises musicales ces derniers jours à l’image de la Commission européenne et de la Banque centrale européenne. L’OCDE souhaite, via un dernier rapport, encore plus de flexibilité balayant au passage la concertation sociale qu’il y a eu en Belgique durant la précédente législature. Tandis que de l’autre côté, le CETA arrive à grand pas sur le vieux continent. Cette arrivée soulève alors le débat : santé ou enrichissement de certains, quel choix ?

Alors que les différents pays Européens adoptent une politique sociale et économique libérale, favorable aux multinationales se justifiant par l’enrichissement des Etats, sur le terrain les acteurs publics ne voient pas cela du même œil. En effet, les crises s’enchaînent à une vitesse folle, et ironie du sort, elles se mondialisent bien plus vite que les profits.

En revanche, les États ne sont pas autorisés dans ce système d’arbitrage à porter plainte contre une entreprise et il n’existe aucune cour internationale compétente pour juger les plaintes contre les multinationales pour leurs dommages sociaux et sur la santé. Les Etats subissent l’économie libérale au lieu de la réguler. Un effondrement des institutions que les secteurs de la santé et du social portent sur leurs épaules malgré eux. Aucun secteur n’y échappe et plus problématique, chaque secteur s’effondre sur l’autre comme un effet papillon.

 [A lire] : De Block : la Fédération des maisons médicales dresse un bilan mitigé

Santé, la loi du marché

Notre système de santé est construit en partie sur le paradigme suivant : lutter contre les maladies infectieuses. Cependant ce qui remplit maintenant le plus souvent les consultations, ce sont les conséquences directes de ce mal-être et des conditions à la fois de travail, de vie et d’un consumérisme frénétique (alimentation, tabac, alcool, drogues…). Cela entraîne un changement global du système de santé. En effet, celui-ci se mue en une industrialisation des soins de santé où la recherche du profit, la rationalisation du secteur sont fusionnées avec la productivité.

La maison médicale belge dans un rapport publié en 2009 prévenait déjà des risques face à la libéralisation du secteur de la santé. On peut y lire : « La marchandisation de l’assurance-maladie aura pour conséquence une sélection des risques les moins coûteux au détriment d’une prise en charge de tous les risques […] ».

L’accessibilité aux soins se retrouve alors différente selon les régions, notamment pour ce qui est des régions rurales ou pauvres, alors même que l’Etat est garant de la santé de ses citoyens. Ce manquement consolide la pensée d’un effondrement des institutions faces aux dogmes du néolibéralisme effréné.

 [A lire] : Lettre ouverte aux blouses blanches

Crises à répétition dans le secteur de la santé et du social

Pour la Belgique comme pour la France, les derniers mois ont été plus que rudes pour le secteur de la santé et notamment des hôpitaux. Ceux-ci voient leur propre effondrement poindre le bout de son nez depuis quelques années, et ce, malgré les différentes réformes libérales censées inverser la courbe.
Le mouvement des blouses blanches en Belgique, a pendant un mois montré son désaccord et son ras-le-bol complet par rapport aux mesures prises par les politiques. Le manque de moyens notamment de personnel, la surcharge de travail, les burnouts, la pénurie de travailleurs sont des effets survenus à la suite des différentes prérogatives Européennes censées restructurer et refonder le monde de l’hôpital. Cependant, le rapport de force est sans appel, il y a plus d’effets négatifs que d’effets positifs.

La Belgique, bien qu’enracinée dans cette sphère n’est cependant pas encore au point de la France qui a, pendant des années, appliquée à la lettre des directives européennes conduisant alors le secteur de la santé dans le gouffre.

Le patient n’est plus la priorité, c’est la loi du marché qui règne et la politique du chiffre reflétant la dérive de la santé. La destruction du secteur public de la santé va de pair avec l’attribution de place de plus en plus importantes pour les structures privées qui, de facto, sont plus enclines à mener des logiques financières.

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Quel avenir pour les travailleurs ?

Épuisement, perte de sens, robotisation des actes médicaux, burn-out. Les métiers de la santé, jadis fleuron de nos sociétés sociales, se retrouvent amputés de tous sens commun. Comme les professions du social, les travailleurs de la santé sont poussés par des logiques non financières qui tiennent à l’humain. Or, à en écouter les professionnels du secteur, ce côté humain n’est plus là et le sens des actions se perd de plus en plus au profit de la financiarisation de la santé.

Le personnel médical ne se voit plus comme un simple exécutant et cela est valable des hôpitaux aux maisons de repos et de soins. Il est victime de ces logiques libérales : salaires plus bas, effectifs réduits, concertation sociale malmenée, conventions collectives de travail mise de côté. Le travailleur est sujet à plus de flexibilité et le règlement du travail se retrouve obsolète. De plus, la concomitance entre experts de santé et grandes firmes altèrent la vision des travailleurs et du public sur la santé.

Ce combat pour défendre l’intérêt public, dont font partie la santé et le social ne peuvent coexister avec des traités qui organisent une course vers le bas aux niveaux social, sanitaire et qui comportent une série de clauses arbitraires.

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Le CETA, sous son aspect de marché économique, est donc révélateur et amplificateur des dérives libérales agissant sur nos structures sociales ainsi que sur celles de la santé. Les nombreuses clauses comme celle de « ISDS » (investor to state Dispute Settlement) permettent aux multinationales d’avoir une action juridique et un pouvoir supérieur sur les Etats. Les pays qui souhaitent mettre en place des mesures allant dans le sens de la santé, de l’interdiction de produits, se risquent à des sanctions juridiques. Notre santé, le bien le plus précieux, n’est donc plus sous la protection des Etats qui se retrouvent impuissants face aux multinationales.

B.T.



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