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Maisons de repos : le sous-effectif à l'épreuve du coronavirus…

13/03/20
Maisons de repos: le sous-effectif à l'épreuve du coronavirus...

Face à la crise du coronavirus, le personnel des maisons de repos est confronté à des défis majeurs. Il doit suivre à la lettre des procédures d’hygiène exigeantes afin de protéger au maximum son public particulièrement fragile, et tout cela en composant avec une pénurie criante de matériels de base et avec un manque de bras. Il y a aussi la gestion de résidents angoissés par l’arrêt des visites de leurs proches. Jamais le sous-effectif chronique, qui frappe le secteur depuis plusieurs années déjà, ne se sera ressenti de manière aussi exacerbée. Le point avec Nathalie Lionnet, Secrétaire fédérale du SETCa non-marchand.

Guide Social : Dans cette période d’épidémie de coronavirus, nombreux sont les professionnels du secteur psycho-médico-social à avoir les mains dans le cambouis. Le personnel qui œuvre dans les maisons de repos est notamment en première ligne. Quelle est la situation sur le terrain ?

Nathalie Lionnet : Ce n’est un secret pour personne : ces professionnels, en temps normal, sont frappés par un sous-effectif chronique. Le manque d’effectifs sur le terrain est dramatique et nous cessons de le dénoncer. Cela a des conséquences inacceptables : les travailleurs n’ont pas le temps de soigner correctement les résidents de ces structures. Aujourd’hui, avec le développement du coronavirus, ils doivent effectuer toute une série de mesures de précaution supplémentaires. Des mesures tout à fait légitimes pour stopper le développement de l’épidémie. Par contre, cela exige des travailleurs des maisons de repos de travailler encore plus, de consacrer davantage de temps à ces gestes essentiels, alors qu’ils vivent déjà des cadences de travail inhumaines en temps normal. On peut déplorer que le manque de personnel impacte la qualité des procédures pour faire face au coronavirus. Il faut se laver les mains au moins 40 secondes. Si vous multipliez ce temps avec la quantité des interactions effectuées par les professionnels avec les résidents, cela prend des proportions énormes. C’est extrêmement chronophage.

"Le personnel manque même de savon !"

Guide Social : Le SETCa, en commission paritaire des maisons de repos, a interpellé les responsables de ces structures accueillant nos aînés…

Nathalie Lionnet : Nous avons notamment tiré la sonnette d’alarme au niveau du personnel logistique. Il doit absolument être en suffisance pour appliquer correctement les procédures d’hygiène renforcées. L’entretien du mobilier est par exemple essentiel pour éviter la contamination. Nous avons également fait une autre démarche : nous avons dénoncé le manque de matériel mis à disposition dans les chambres. Un exemple ? Du simple savon ! On ne parle même pas de gel hydroalcoolique... Le personnel n’a pas assez de produits de base, ni de gants d’ailleurs. En dehors du coronavirus, on assistait déjà à des difficultés d’approvisionnement de ces éléments. Dans des grands groupes commerciaux, le mot d’ordre est le « just in time ». En gros, ils limitent au maximum les stocks disponibles afin de faire des économies. C’est donc toujours en flux tendus.

"Avec la fin des visites, les familles ne peuvent plus aider"

Guide Social : Les visites provenant de l’extérieur ont été interdites dans les maisons de repos. Quel impact à cette mesure sur le quotidien des professionnels ?

Nathalie Lionnet : Avec l’interdiction des visites, le personnel doit faire face à une série de difficultés. Il faut d’abord savoir que certaines familles de résidents prennent en charge l’alimentation de leur proche. Comme il n’y a pas assez de bras, comme on assiste à un déficit criant de personnel, les familles prennent le relais. Face à l’intensité du travail à fournir, les professionnels se retrouvent malheureusement dans l’impossibilité de prendre le temps de nourrir les personnes qui ont besoin d’aide. En temps normal, maris, enfants… suppléent les équipes : ces citoyens s’organisent pour donner à manger et hydrater correctement leur proche. Ces ressources informelles qui sont d’une grande aide aux travailleurs sont désormais terminées. Les équipes doivent également gérer la tristesse de certains résidents. Certains sont confus et ne comprennent pas pourquoi leurs proches ne viennent plus les voir. Cela engendre une réelle angoisse. Souci et de taille : le personnel qui est au four et au moulin n’a pas le temps de s’arrêter et de rassurer ces personnes.

Propos recueillis par E.V.

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