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Quand les partis s'unissent contre le travail associatif

13/06/18
Quand les partis s'unissent contre le travail associatif

Le travail associatif continue de se mettre plusieurs secteurs à dos. La mesure, à l’origine soutenue exclusivement par le secteur sportif flamand, est grandement décriée par le secteur associatif, qui y voit une déprofessionalisation des personnes et une concurrence déloyale se développer dans des domaines comme l’aide et les soins à domicile. Aujourd’hui, les 4 présidents des partis francophones ont signé une carte blanche contre ce projet.

Le travail associatif (ou semi-agoral) aura décidément fait couler beaucoup d’encre. Après avoir fait l’objet d’une motion en conflit d’intérêt pas la Cocof début janvier, gelant dès lors le texte pendant 60 jours, la mesure a repris son bonhomme de chemin. Faisant toujours plus d’opposants. Plusieurs fédérations ont lancé une pétition, qui a récolté à ce jour plus de 4.600 signatures. Aujourd’hui, ce sont les présidents des partis francophones qui s’unissent pour dénoncer la mesure de la ministre de l’Action Sociale, Maggie De Block, dont l’objectif est d’accorder à une personne possédant déjà un statut (4/5ème salarié minimum, indépendant, pensionné) une rémunération s’élevant jusqu’à 6.000 euros par an, défiscalisés. Les 4 partis francophones ont exprimé leur mécontentement dans une carte blanche. Monasbl.be résume les principaux points.

Un projet de loi « dangereux »

Dans cette lettre ouverte, Elio Di Rupo (PS), Benoît Lutgen (CDH), Olivier Maingain (Défi) , Patrick Dupriez et Zakia Khattabi (Ecolo) jugent le projet de loi « inutile et dangereux pour les travailleurs, les indépendants et les associations ».
Selon eux, « tel qu’il est rédigé ce projet de loi causera un préjudice grave aux travailleurs, aux entreprises, aux indépendants et aux associations. Il s’agit donc d’une question sociétale majeure ».

 [A lire] : Le travail associatif passe, les ASBL trépassent

Ils distinguent alors 6 dangers majeurs :

La concurrence déloyale

Les présidents y voient une « injustice profonde » entre les citoyens. Certains « seront soumis aux règles classiques du droit social, d’autres y échapperont ».

Une destruction de l’emploi

Le travail associatif s’adresse aux individus déjà occupés et à certains demandeurs d’emplois. Ainsi, les opposants à la loi estiment que « le fédéral préfère privilégier ceux qui ont déjà un emploi ». De plus, « Amenées à choisir entre un travailleur soumis à l’impôt et aux cotisations sociales et un travailleur exempté de toute taxe ou cotisation, les entreprises opteront pour compléter leurs équipes par des « travailleurs occasionnels associatifs » plutôt que de procéder à l’engagement d’un employé supplémentaire ou de permettre à un travailleur à temps partiel de compléter son horaire de travail. »

 [A lire] : Les ASBL, de futures entreprises marchandes ?

Une réduction de la qualité des services offerts

Si certaines des activités visées par la loi sont soumises à des règles de déontologie, des normes de qualité ou de sécurité, « les travailleurs occasionnels associatifs risquent d’échapper à ces exigences. »

Une fragilisation de la protection sociale

Le SPF Finances estime que les pertes financières s’élèveront à près de 100 millions d’euros en matière de cotisations sociales et plus de 40 millions d’euros de recettes fiscales.

 [A lire] : La proposition de travail « associatif » de la ministre De Block inquiète

Une fragilisation des travailleurs

Les présidents de partis rappellent que ces travailleurs ne bénéficieront d’aucune protection sociale.

Une discrimination entre citoyen(ne)s

Ce statut serait interdit à une certaine tranche de la population, comme les personnes qui bénéficient d’allocations sociales.

« Une mobilisation exceptionnelle »

Les présidents de partis ont donc décidé de faire front face à cette mesure qui « ne correspond à aucune demande sociale réelle et comporte de nombreux risques et effets pervers pour notre société tels qu’il justifie une mobilisation exceptionnelle transcendant les concurrences politiques ».

Différentes actions en opposition au travail associatif ont déjà vu le jour depuis plusieurs mois. Nous citerons notamment la campagne « 50 nuances de Black » ou encore la procédure en conflit d’intérêts de la commission communautaire française (COCOF). Mais malgré une forte résistance du secteur non-marchand et des politiques, le vote du projet de loi était annoncé jeudi dernier à la Chambre des représentants. Une dernière manœuvre de l’opposition a permis de repousser une nouvelle fois le vote final du projet de loi.

« Malgré une véritable levée de boucliers de l’ensemble des employeurs et syndicats du pays (*), du secteur du non-marchand et de sa mobilisation contre ce projet de loi (c’est dire la façon dont le gouvernement a concerté les principaux intéressés) », soulignaient les signataires de la carte blanche « Etre solidaire : un acte lucratif », publiée sur Le Soir.

Demande de négociation

Pour atténuer ces risques, les différents acteurs opposants n’ont pas manqué de communiquer à Maggie de Block, et à d’autres membres du gouvernement leurs préoccupations vis-à-vis des conséquences qu’aura de la mise en place de la loi sur le travail semi-agoral. Des protestations qui « malgré des interpellations successives » restent « toujours sans concertation », s’indigne le secteur associatif dans la carte blanche publiée sur le Soir.

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Benoit Lutgen, Olivier Maingain, Elio Di Rupo, Zakia Khattabi et Patrick Duprez, ont réclamé auprès du fédéral « un véritable espace de négociation politique au sujet du travail associatif ».

L’opposition politique propose alors d’autres pistes de solutions dites « créatives » comme le développement du projet Maribel (projet de création d’emplois supplémentaires dans le secteur non-marchand afin de rencontrer les besoins du secteur à travers les institutions du secteur privé et public) ou d’élargir la possibilité de bénévolat pour les chômeurs.



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