Les rêves de nos patients : une mine d'or ?
Interroger les rêves de nos patients, apprendre à les décrypter, les explorer : les rêves seraient-ils le matériau thérapeutique par excellence ?
Un rêve est un message codé, mais qui n’a rien d’universel. Au diable les dictionnaires permettant de les comprendre de l’extérieur, c’est le rêveur qui détient la clé. Dans l’interaction thérapeutique, une exploration est possible, des pistes émergent, mais à la seule condition qu’elles trouvent, dans le chef du patient, un ressenti qui les valide. A cette condition seulement, le rêve est alors un extraordinaire matériau psychique…
Un chien s’enfuit…
« Une promenade en forêt. Autour de moi, je ne connais personne. Heureusement, j’ai aussi ma charrette à laquelle un chien est attelé. Ma charrette à moi, elle est très « artisanale », elle « ne paye pas de mine », contrairement aux autres. Pourtant elle fonctionne. Sauf que mon chien s’enfuit. J’oblige le groupe entier à s’arrêter. Et le chien ne revient pas. C’est un chien de forêt. On ne le retrouvera pas… ». Comme nous le rappelle la psychanalyste Dufourmantelle, il est extrêmement troublant de se pencher sur les rêves. « Indicateurs de notre psyché », ils sont une matière vivante, difficile à déchiffrer certes, mais porteuse d’une richesse incroyable tant ils résonnent en nous, offrant la possibilité précieuse d’un message enfoui.
Un seul auteur, un seul metteur en scène…
Messager de l’inconscient, le rêve n’appartient qu’à son auteur. Ce qu’il en reste au réveil, ces restes bruts, ces traces étranges, peuvent être mises au travail. Dans la libre association, dans l’exploration actives, leur analyse ouvre la porte d’un univers fascinant. Les questions du thérapeute invitent alors le patient à verbaliser ce qui vient, ce qu’évoquent ces bribes décousues, ces images déroutantes, ces personnages existants ou non, et tout ce que cette exploration suscite en termes de ressenti. Des voies s’ouvrent, des interprétations prudentes s’ébauchent, des souvenirs, des questionnements… Autant de relances pour le travail en cours.
Le désir de l’Autre
Si le rêveur est bien le seul auteur de son rêve, le désir de l’autre n’en est pourtant pas absent. Le rêve permet alors de « traiter » ce désir toujours énigmatique de l’autre, et l’angoisse qu’il suscite. Mais que veut-il, cet Autre ? Dans le chiffrage du rêve, dans la jouissance de ce chiffrage, l’inconscient trouve à se satisfaire, formulant, sans souci de la communiquer, une hypothèse face à cette énigme toujours radicale.
Le travail du rêve
Le travail de l’analyse consiste finalement à passer du contenu manifeste du rêve à son contenu latent. De ce matériau brut, souvent incohérent, décousu, absurde même, il s’agit de faire émerger un sens, un fil qui mène le patient vers ses tensions internes, ses conflits, ses peurs latentes, ses désirs enfouis, ses souvenirs engrangés, ses traumas parfois. A travers les brumes de ces récits étranges, la puissance de la psyché se manifeste dans tout son questionnement, dans tout son bouillonnement. Au thérapeute d’accompagner cette traversée riche en enseignements…
D.B. psychologue
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