Chronique d’un psy : "Trop sexy pour être psy ?"

Apparemment, l’image qu’un·e psychologue se donne pourrait nuire à l’ensemble de la profession. C’est en tout cas l’avis du Conseil Disciplinaire de la Compsy, suite au jugement rendu dans l’affaire impliquant Kaat Bollen. Évocation sommaire et commentaire ironique : T. Persons.
[DOSSIER]
La réaction de la Commission des Psychologues !
"Qui bafoue la dignité des psychologues cliniciens ?"
Qu’on se le dise une fois pour toutes : bonne année ! Que 2021 vous apporte santé, amour et suffisamment d’argent que pour tenter de payer votre cotisation à la Commission des Psychologues sans frais majorés de retard. M’enfin, T. Persons ! On commence à attaquer nos organes de déontologie dès le premier paragraphe ? Et les bonnes résolutions ? La bienveillance ? Le renoncement aux phrases kilométriques et aux introductions mal torchées ? Que nenni ! Le renouveau, on en parlera quand on se refera la bise. En attendant, quitte à être acerbe, autant vous expliquer la raison de mon courroux.
Retour sur les faits : Kaat Bollen est psychologue et sexologue en Flandre. Elle vient d’être condamnée d’un avertissement par les instances disciplinaires de la Commission des Psychologues, suite à une plainte d’un confrère qui estimait notamment que ses photos sexy sur Instagram pouvaient nuire à l’image que le public se fait de notre profession.
Un jugement particulier qui fait grincer des dents à plusieurs niveaux. Tout d’abord, en qualité d’être humain, on peut se demander en quoi des photographies qui passent au travers des standards rigides des réseaux sociaux pourraient être vues comme menaçantes pour la profession de psychologue clinicien. De quoi a-t-on peur exactement ? De créer un précédent ? D’autoriser les psy à gérer leur image comme bon leur semble ? Que le lambda notoire non clinicien imagine son propre psy en nu artistique ? Je vous le confesse, j’ai du mal à saisir la raison, si ce n’est qu’en absurdie, on ne raisonne pas mieux.
Un peu rétrograde notre Conseil Disciplinaire ?
Puis, elle ouvre un débat assez délicat. En tant que psychologue, généralement, on sait que notre image publique se doit d’être - comme tout un chacun - conforme à l’ordre public et aux bonnes mœurs. Ce concept flou évolue au fil du temps et comme le rappelle Bart Somers, Ministre flamand en charge de l’Égalité des chances, se référant à ce dossier : lorsque j’ai eu vent de cela, j’ai cru que l’on était de retour aux années 1950. Un peu rétrograde notre Conseil Disciplinaire ? Déconnecté de la réalité ? Représentatif de l’avis de l’ensemble de la profession ? Vous me direz qu’avec un taux de participation aux dernières élections qui plafonne à 10 %, on peut se poser des questions…
Soit, le droit a parlé au nom de ses représentants et la jurisprudence devrait donc nous pousser à vivre comme des mormons. Mais du coup, je me demande : en tant que psy, on peut encore fumer ? Boire une bière ? Ne sommes-nous pas en train de nuire à l’ensemble de la profession, en reproduisant les stupres et les vices impropres à la sacrosainte image du psychologue ? Ou alors est-ce uniquement valable lorsque l’on est une femme, que l’on estime disposer librement de son corps et que l’on expose celui-ci sur les réseaux sociaux ?
En conclusion, Kaat Bollen écope d’un « avertissement ». Qu’on ne l’y reprenne plus ! À partir de maintenant, on ne poste que des photos de tonton Sigmund ou des proverbes à deux balles impliquant le soin de soi. D’ailleurs, l’intéressée a réagi en indiquant qu’elle ne renouvellerait pas sa cotisation. Comme quoi, à force d’être jugé par des cochons, il n’est pas impertinent de vouloir quitter la ferme…
T. Persons
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