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Manifestation du secteur non-marchand : le cri d’un secteur en péril

02/12/24
Manifestation du secteur non-marchand : le cri d'un secteur en péril

Je ne sais pas si nos amis politiciens mesurent à quel point la situation du secteur non-marchand est grave et ce dernier en péril. La preuve en est : les travailleurs manifestent. Et ça, ce n’est pas du tout dans notre culture. Pour qu’on en arrive là, il faut vraiment qu’on soit exsangues. Et on l’est.

Je suis éducatrice spécialisée de formation et travaille dans le secteur social depuis pas loin de 20 ans. Ces dernières années, j’ai commencé à voir des manifestations de travailleurs du secteur des soins de santé, du non-marchand en général, et même de travailleurs sociaux. Du jamais vu auparavant. Manifester, réclamer plus de considération, de meilleures conditions de travail, ce n’est pas du tout dans notre culture. Monter au créneau pour nos patients ou nos bénéficiaires, ça, on sait faire et même plutôt bien. Pour nous ? Jusqu’à il y a peu, on ne le faisait pas. Maintenant oui et c’est peut-être le signe le plus criant de l’état lamentable dans lequel notre secteur se trouve. Mais ce n’est pas le seul.

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Pénuries, précarité, pénibilité

Les pénuries sont de plus en plus criantes. Cela fait déjà longtemps que les professions d’infirmier et d’aide-soignant sont en pénurie. Y viennent s’ajouter celles d’aide familiale, mais aussi d’éducateur, d’assistant social… Bref, toutes les professions du care.

Les employeurs peinent à trouver du personnel et ça n’a rien d’étonnant : actuellement, les contrats de travail sont de plus en plus précaires. Les financements sont réévalués en permanence, réajustés, revus par projets. L’emploi n’est plus garanti, du moins pour les « nouveaux » travailleurs. Qui aurait envie d’un contrat précaire pour un boulot mal payé, avec des horaires contraignants et des responsabilités en pagaille ?

Inscriptions en baisse dans les écoles

Parce que là est la réalité : la précarisation de nos emplois vient s’ajouter à la longue liste des violences institutionnelles et politiques dont nous sommes victimes, nous, travailleurs du Non-Marchand. À trop tirer sur la corde, elle finit par casser, et c’est ce qui est en train de se produire. Non seulement de nombreux travailleurs refusent de subir des conditions de travail de plus en plus rudes et font des pas de côté, mais en plus, le secteur n’attire plus les jeunes : que ce soit dans les écoles d’assistants sociaux ou d’infirmiers, pour ne citer que ces deux exemples, les inscriptions sont en baisse, après avoir connu une période de stagnation.

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Des professions néanmoins indispensables

On l’a compris, le social et la santé font partie des parents pauvres, mais ils sont néanmoins nécessaires au bon fonctionnement de notre société. Nous avons besoin de structures pour soigner les malades et les personnes âgées. Nous avons également besoin de structures pour prendre en charge les personnes qui, pour une raison ou pour une autre, se trouvent « en marge » de la société, quelle que soit la définition de la marge en question. Sans cela, notre société imploserait, c’est aussi simple. Et les logiques de systèmes à deux vitesses ne tiennent pas la route à long terme, il suffit de tourner les yeux de l’autre côte de l’Atlantique pour s’en rendre compte.

Les mentalités des travailleurs évoluent

Les jeunes travailleurs n’ont plus envie de se dévouer corps et âme à leur boulot. Ils veulent un équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie privée et souhaitent même parfois que leur boulot s’adapte à leur vie privée plutôt que le contraire.

Quant aux travailleurs de 40 ans et plus, qui ont plus facilement tendance à faire passer leur boulot avant tout, ils saturent complètement et commencent à en avoir marre d’être pris pour des bonnes poires. En effet, ils donnent tant et plus et on ne fait que leur prendre, à croire que c’est un test de résistance. C’est un paradoxe, mais comment peut-on prétendre aider des personnes en difficulté à (re)gagner en dignité et en estime d’elles-mêmes si on ne se respecte pas soi-même ?

MF - travailleuse sociale

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