Travail social : vous avez dit piston ?
Quand on parle de piston, on pense en général tout de suite à ceux qui décrochent un emploi parce qu’ils connaissent la bonne personne. Ou à ceux qui ont un rendez-vous médical plus rapidement que les autres. Ou encore aux systèmes bien connus et peu nommés de renvois d’ascenseur aux « amis ». Ce dont on parle peu, mais qui néanmoins existe, ce sont les pistons dans l’univers du social.
Et là, je ne parle pas des pistons « classiques », que sont le fait, pour les travailleurs, d’accéder plus facilement à un emploi ou à une promotion, mais de pistons d’une autre nature : recevoir de l’aide plus vite, accéder à un logement plus rapidement, recevoir plus d’attention, etc. En d’autres termes, lorsqu’on bénéficie d’un service, recevoir un traitement de faveur parce que l’on actionne les bons leviers.
Égalitaires, nos institutions ?
Nous aimons à croire qu’il s’agit d’un mythe, que nos institutions sont égalitaires, qu’elles soient publiques ou associatives, que nul traitement de faveur ne va y être accordé à telle ou telle personne, sous quelque prétexte que ce soit. Nous aimons à croire que le temps des faveurs politiques est révolu, que l’électoralisme n’est plus, ou encore que les grandes personnalités des combats sociaux sont impartiales, qu’elles agissent pour le bien de tous.
Une belle utopie
Malheureusement, on nage ici en pleine utopie. Pour le dire platement, tout ceci existe encore. Obtenir une attention plus particulière parce que l’on connaît bien les élus locaux, c’est tout à fait courant, encore à l’heure actuelle. En pleine crise du logement, se voir largement pistonné pour obtenir un logement à loyer social, là où les listes d’attente sont kilométriques, ça existe aussi.
Constater notre impuissance
Et force est de constater que nous, travailleurs sociaux, sommes impuissants face à ça. Que peut-on faire quand le patron nous dit de faire ceci ou cela pour telle ou telle personne, passant outre aux listes d’attente, aux priorités, voire même à nos missions de base ? Pas grand-chose … Platement, il s’agit de notre boulot, de notre gagne-pain.
Et celle de nos responsables
Dans une certaine mesure, nos patrons n’ont pas toujours le choix non plus. Quand les demandes viennent de plus haut, de personnes particulièrement influentes dans le domaine, ou même « simplement » d’administrateurs de la structure, que peuvent-ils faire ? Il s’agit aussi de leur gagne-pain.
Là où nos illusions meurent
C’est ici, entre autre, que la réalité et les discours viennent se heurter, de manière plus ou moins choquante selon les situations. C’est également ici que nous devons trouver une manière de continuer à travailler avec tous ceux qui n’ont pas la chance de bénéficier d’appuis bien placés. C’est parfois ici que nos dernières illusions viennent mourir.
MF - travailleuse sociale
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