Travailleurs sociaux : la violence des usagers à notre encontre...

26/10/21
Travailleurs sociaux : la violence des usagers à notre encontre...

Récemment, j’entendais une connaissance relater qu’elle avait été victime de violence physique sur son lieu de travail, de la part d’un usager. Scène banale, que j’ai déjà entendue conter maintes fois depuis la quinzaine d’années que j’exerce dans le secteur social. Et, je le confesse, scène que j’ai déjà vécue également. Qu’a-t-il été mis en place ? Rien. Ça aussi, c’est courant, vécu comme normal. Oui mais non.

Une triste réalité quotidienne

Que celui d’entre nous qui n’a pas été victime au moins une fois de violences physiques ou verbales sur son lieu de travail lève la main … Et notez que je ne parle même pas des violences institutionnelles, à propos desquelles on pourrait écrire une thèse en trois volumes minimum. Je parle des violences commises par nos usagers à notre encontre.

A laquelle il n’est pas souvent apporté de réponse satisfaisante

Que celui d’entre nous qui a été victime de violences de la part d’un usager sur son lieu de travail et qui a reçu une réponse respectueuse de sa personne et satisfaisante de la part de sa direction lève la main … A vue de nez, je dirais qu’il y a nettement moins de mains levées … Pour ma part, j’ai entendu des aberrations telles que « Ça fait partie du boulot, il faut l’accepter » ou encore « Nous allons en parler à la prochaine réunion et voir ce qu’il faut mettre en place » … Ladite réunion ayant lieu une semaine après et le sujet étant souvent évoqué à la va-vite, pour aboutir la plupart du temps à une sanction d’exclusion. La personne que j’ai entendue relater son expérience a, quant à elle, été envoyée chez son collègue psy. Pratique.

À quel moment est-il devenu normal de tolérer cela ?

Faisons l’exercice de transposer ce contexte dans le cadre d’un autre métier, par exemple un travail en usine de production. Si un ouvrier était victime d’un accident sur une chaîne de montage, il y aurait, à tout le moins, enquête sur les circonstances de cet accident, inspection des lieux par les conseillers en prévention et sécurité, obligation de mettre en place de nouveaux protocoles et prise en charge de la personne lésée par l’assurance du travail. Peut-être même que les syndicats monteraient au créneau. Avons-nous droit au même traitement ? Poser la question, dans notre cas, c’est connaître la réponse.

Nous ne sommes pas des paillassons

Certes, nous travaillons avec des personnes en difficultés et notre rôle est d’essayer de mettre tout en oeuvre pour les aider. En tenant en compte notre cadre institutionnel et dans la mesure de nos moyens. À aucun moment il n’a été fait mention que nous devions accepter de prendre des coups ou de servir de punching-ball, ou encore de paillasson. Et surtout, à aucun moment il ne devrait être acceptable que de tels événements soient au pire passés sous silence, au mieux débattus lors d’une réunion où, bien souvent, une sanction d’exclusion (permanente ou temporaire) sera décidée, et c’est tout.

Quelle prise en charge ?

Mais du côté de la victime, où est le soutien ? Où est la prise en charge ? Un certificat médical sera, au mieux, toléré, mais bien souvent critiqué de manière à peine voilée. Le travailleur, qui est souvent une travailleuse, ne serait « pas assez forte », « pas capable d’encaisser les difficultés du métier » … à quel moment voir son intégrité physique ou psychologique malmenée doit devenir une « simple difficulté » d’un métier ? Comment peut-on demander à un travailleur de serrer les dents dans de telles situations ? Comble de l’ironie pour des personnes travaillant dans le domaine du soin … De là à se dire que cela traduit le peu de respect que nos institutions et notre société en général a pour nous, travailleurs du social, il n’y a qu’un pas que, pour ma part, je franchis.

MF - travailleuse sociale

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