Travailler en tant qu’éducateur sans être éducateur spécialisé ?!
Ce n’est pas un scoop, tout le monde peut être engagé en tant qu’éducateur. Absolument tout le monde… Et de nombreuses personnes le sont, dans de nombreuses institutions, depuis de nombreuses années. Malheureusement, ce n’est pas prêt de s’arrêter… Et pour cause, rien n’interdit à qui que ce soit de postuler en tant qu’éducateur et d’être engagé pour un tel poste. Rien, si ce n’est le bon sens.
Lorsque j’ai entamé mes études d’éducatrice spécialisée, il y a maintenant plus de 20 ans (!), une des premières choses qu’on nous a dites, c’est que notre titre allait bientôt être protégé. Si j’avais su que c’était une blague du type de celles que l’on fait aux nouveaux venus, j’aurais ri… Car ce discours était certainement de mise 20 ans plus tôt et il le sera peut-être encore dans 20 ans.
Lire aussi : Éducateur spécialisé : ce qu’on ne vous dit pas à l’école
Beaucoup d’éducateurs ne le sont pas de formation
Actuellement donc, rien n’interdit à un assistant social, un logopède, un psychologue de travailler comme éducateur. Et pourquoi pas un coiffeur, un maçon ou encore à un plombier tant qu’on y est ! Et de fait, beaucoup d’éducateurs ne sont pas éducateurs de formation. Par ailleurs, beaucoup d’entre eux font un excellent travail. C’est qu’on devient forgeron en forgeant et qu’au fil du temps, les acquis de l’expérience prennent le pas sur la formation initiale. De nombreux éducateurs sont devenus éducateurs par les hasards de la vie, d’autres en voulant sciemment se reconvertir, d’autres encore pour mettre leur expérience de vie au service de la communauté, etc.
Les études seules ne sont pas garantes de la compétence
Au fond, est-ce que la question est vraiment de savoir si oui ou non telle ou telle personne est légitime dans son métier ? Personnellement, je veux croire en la mobilité professionnelle, aux reconversions, aux virages. J’aime l’idée que notre avenir professionnel ne soit pas tracé une bonne fois pour toutes à la sortie de l’école. J’aime cette idée de mobilité sociale et qu’elle soit encore possible me tient à coeur. Je pense également que les études seules ne font pas le professionnel compétent. Nous connaissons tous des professionnels du social, ou même d’autres secteurs, dûment formés et totalement incompétents.
Notre expérience et nos formations continues ont de la valeur
Certes, nos études nous donnent des outils d’analyse et d’intervention, un bagage de base, que notre expérience viendra nourrir, étayer, enrichir. De plus, tout au long de notre carrière, nous avons, pour la plupart, accès à des formations continues pertinentes. De la sorte, nos études ne sont pas notre seul et unique valise, mais un set de départ qui, au fil du temps, se fait de plus en plus lointain, surtout si nous n’avons jamais exercé dans certains secteurs. Personnellement, je n’ai jamais travaillé en psychiatrie. Est-ce que mon seul diplôme me rend plus apte à y exercer qu’un non-éducateur y travaillant en tant qu’éducateur depuis 15 ans ?
Pour autant, le titre et la fonction doivent être protégés
Ceci dit, notre métier est un métier de soin et d’accompagnement de personnes fragilisées. À ce titre, il importe d’en préserver l’accès, de la même manière que les fonctions d’assistant social, de psychologue, de kiné, de logopède sont réservés aux professionnels diplômés. Après tout, il ne viendrait à personne l’idée d’aller faire des séances de kiné chez un logopède ou un assistant social. Aussi, protégeons ce titre d’éducateur spécialisé. À tout le moins, ce serait un message fort envoyé aux éducs. Un message signifiant « Nous avons du respect pour votre métier. Vous faites un travail spécifique qui ne peut pas être exercé n’importe comment ».
Lire aussi : Etat des lieux sur le titre non protégé de la profession d’éducateur spécialisé
Valider les acquis de l’expérience
Protéger un titre et l’accès à une fonction n’est pas nécessairement synonyme d’exclusion des non-diplômés. Après tout, l’expérience a de la valeur, la preuve étant que l’accès à certaines professions est possible avec une validation des acquis de l’expérience. Un tel système pourrait éventuellement être envisagé avec le titre d’éducateur spécialisé. De la sorte, nul n’est pénalisé… à part les employeurs peu regardants.
MF - travailleuse sociale
Découvrez les autres textes de l’autrice
- Travailleur social, quel est ton secteur ?
- Travail social : le difficile équilibre du travail en équipe
- Travail social : vulnérabilité et empathie, quand le lien s’en mêle
- Secteur non-marchand : balayer devant sa porte...
- Travail social : vous avez dit piston ?
- Travailler dans le social : ces clichés qui nous collent encore et toujours à la peau
- Travail social : accueillir un nouveau travailleur, mode d’emploi
- Travail social : le pire moment pour lancer un nouveau projet
- Travail social : quand la communication fait défaut
- Ce que j’aurais aimé qu’on me dise lorsque j’ai commencé à travailler dans le social
- Travailleurs sociaux indépendants : vers un système social à deux vitesses ?
- Peut-on soigner en ne prenant pas soin de soi ?
- Rémunération : travailleur social, combien tu vaux ?
- Travail social : comment "gérer" son chef ?
- Gestion d’un projet en travail social : les erreurs à bannir !
- Travailleurs sociaux : réunion d’équipe, les erreurs à ne pas commettre
- Travailleur social : comment démotiver un collègue compétent et investi
- Travailleur social : (se) motiver au changement
- De l’injonction à la résilience chez le travailleur social
- Éducateur spécialisé, le parent pauvre
- Les travailleurs sociaux sont-ils tous sur un pied d’égalité ?
Commentaires - 1 message
Ajouter un commentaire à l'article