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Imaginez… une Belgique sans travailleurs sociaux

20/02/25
Imaginez... une Belgique sans travailleurs sociaux

Avec toutes les mesures anti-sociales qui pleuvent sur nous ces dernières années, et qui vont continuer à s’abattre dans un avenir proche, couplées aux pénuries du secteur, il nous est venu une idée, au Guide Social : imaginer une Belgique sans travailleurs sociaux.

Et si l’aide sociale disparaissait ? Si les services de protection de l’enfance, d’accompagnement des personnes âgées, des personnes en situation de handicap ou encore des usagers de drogues n’existaient plus ? Si l’accès aux soins, à l’éducation et à un minimum de sécurité sociale devenait un luxe réservé à quelques-uns ?

Jouons le jeu d’un pays où les travailleurs sociaux ont disparu…

Toute ressemblance avec la réalité serait fortuite… ou peut-être pas.

Lire aussi : Quand la droite de la droite est au pouvoir, le social a-t-il encore une place ?

L’aide à la jeunesse disparaît

Disons au-revoir à l’aide à la jeunesse. Plus aucune institution n’existe, qu’il s’agisse de services résidentiels ou d’aide en milieu familial… Le désert. Les enfants et jeunes en difficulté et en danger sont livrés à eux-mêmes. On assiste à une augmentation des faits de violence intra familiale, des abandons, du sans-abrisme, des faits de délinquance, qui par ailleurs commencent beaucoup plus tôt dans la vie des personnes concernées.

L’augmentation des consommations de stupéfiants est également à l’ordre du jour. La demande appelant l’offre, le trafic augmente, ainsi que celui des armes. La prostitution explose. L’insécurité est de mise. Un couvre-feu est décrété. Un monde parallèle s’organise.

Plus d’aides sociales

Il n’y a plus personne pour accompagner les bénéficiaires du dernier filet de sécurité sociale. Et comme il faut faire des économies tout en maintenant un semblant de protection sociale, l’aide financière est distribuée automatiquement à quiconque en fait la demande sur Internet (et tant pis pour ceux qui ne savent pas utiliser Internet ou qui ne savent pas lire), mais pour une période très limitée dans le temps. Après, débrouillez-vous. Tous n’ont pas la chance de trouver un boulot, mais heureusement, les trafics en tous genres fleurissent, l’économie parallèle a de bons jours devant elle. Avec tout ça, une grande partie de la population meurt plus jeune. Tant mieux pour les économies...

Plus aucun accompagnement des usagers de drogues

Plus personne n’accompagne les usagers de drogues. De toutes façons, avec le marché qui explose, ils ne sauraient plus où donner de la tête. On vend du crack dans les écoles primaires. On installe des détecteurs de métaux et des chiens renifleurs dans les écoles les plus touchées par le trafic et les faits de violence. On deale partout dans les rues, beaucoup de gens meurent.

La violence est incontrôlable, certaines zones deviennent des zones de non-droit. La police a peur d’y aller, on construit des murs isolant certaines parties du pays. Qu’ils s’entretuent, ça fera des économies. Les plus nantis ont peur, ils s’isolent encore plus. Ils construisent des murs autour de leurs quartiers, de leurs villages et engagent des milices privées avec ordre de tirer à vue.

De moins en moins d’élèves dans les écoles

Les écoles accueillent de moins en moins d’élèves. Il faut dire que nombreux sont ceux qui n’arrivent pas à suivre, à comprendre, à faire leurs devoirs. Certains milieux familiaux ne s’y prêtent pas, et les jeunes n’ont nulle part où aller, alors, lentement, ils cessent de fréquenter l’école. Ils ne comprennent plus, ils se sentent bêtes, et puis à quoi bon aller à l’école si on peut devenir riche dans la rue ou devant son ordi ? Alors, de nombreuses écoles ferment. Pas celles des milieux plus nantis, non, toutes les autres.

Les enfants traînent toute la journée. Certains se mettent à travailler, d’ailleurs, l’âge légal du travail « étudiant » passe à 10 ans, sans obligation scolaire associée. Beaucoup goûtent à l’économie parallèle. Les plus chanceux d’entre eux sont conduits à l’école la plus proche, qui est parfois loin, par leurs parents, avant le boulot, c’est-à dire tôt, très tôt. Il faut ce qu’il faut. Beaucoup de familles font face au dilemme de choisir leur lieu de vie en fonction des possibilités, à la fois de travail pour les adultes, d’alphabétisation et d’instruction pour les enfants et de sécurité pour toute la famille. Parfois, c’est plus simple de renoncer à l’instruction « publique » et d’engager un précepteur. C’est fini, il n’y a plus d’ascenseur social.

Les personnes âgées sont livrées à elles-mêmes

Il n’y a plus d’accompagnement des personnes âgées. Ceux qui ont une famille sur qui ils peuvent compter sont chanceux. Ceux qui en ont les moyens s’offrent de coûteux soins à domicile et des aides administratives privées. Les autres vivent dans le dénuement le plus complet et meurent chez eux dans l’indifférence la plus totale. Après tout, c’est chacun pour soi. Leurs logements sont parfois squattés, les personnes âgées maltraitées, voire abattues. Personne ne s’en rend compte, ou alors les gens ont peur de parler.

Les personnes handicapées disparaissent

Il n’y a plus d’accompagnement des personnes handicapées. Les familles doivent tout assumer seules et payer de coûteux professionnels indépendants. Ceux qui en ont les moyens pourraient le faire, mais de moins en moins de personnes le font, car qui sait de quoi demain sera fait et qui peut se permettre de dépenser ainsi de l’argent, surtout si on ne veut pas vieillir dans le dénuement et mourir abattu par des squatteurs ?

Les grossesses non désirées explosent

Parallèlement, il y a une recrudescence des grossesses non désirées. En effet, il n’y a plus aucun planning familial et la prévention devient compliquée à assurer pour de nombreuses familles, qui ne sont pas toujours informées et éduquées, ces pratiques ayant disparu du paysage. De nombreuses jeunes filles enceintes sont contraintes de mener à terme leur grossesse, entraînant une augmentation des abandons de bébés, du trafic d’enfants, des faits de violence domestique, etc.

De plus en plus de familles monoparentales sont précipitées dans la pauvreté. Un marché de l’adoption parallèle se met en place, où de riches familles infertiles peuvent acheter des bébés et des enfants non désirés par leurs mères biologiques. Et s’ils pleurent trop, ce n’est pas grave, ils peuvent toujours retourner d’où ils viennent, ou disparaître sans manquer à personne.

Ça fait peur, vous ne trouvez pas ? Et ce qui me fait le plus peur, c’est que ce n’est pas un monde dystopique, tout cela existe déjà. Pas encore chez nous, mais pas si loin que ça…

MF - travailleuse sociale

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