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Chronique d’un psy : « Il est de retour »

05/09/23
Chronique d'un psy : « Il est de retour »

Alors qu’il profitait d’une pause bien méritée, à l’ombre des conflits et des tourments que seuls les psychologues cliniciens savent alimenter, T. Persons nous revient en forme et fait sa grande rentrée.

On ne va pas se mentir, je ne m’attendais pas aux canons à confettis valdinguant au rythme de Freddie Mercury clamant que l’on est des champions en passant le sas d’entrée de mon cabinet de consultation, mais un minimum, pardi ! Tout était là, rien n’avait changé, si ce n’est les deux centimètres de poussière, les toiles d’araignées et l’amas de courriers glissés sous le pas de la porte. Finalement, il n’y avait que les factures et les demandes de remboursement de mutuelle qui semblaient vouloir me souhaiter un bon retour de congés…

En effet, cette année, j’ai testé la méthode dure : je suis parti en vacances, déconnecté des mails, du téléphone, des patients, des collaborations, des rapports, des factures, de la comptabilité et des malheurs de tout un chacun. Cette année, on me fiche la paix, je ne voulais rien savoir. Le ciel bleu pouvait bien s’écrouler, la terre s’effondrer, peu m’importe si l’on m’aime, je me fous du monde entier.

Ça a tenu 48 heures. Fichu téléphone. Une demande urgente ? Un séisme sur la planète psy ? Une inondation impromptue de la chasse d’eau des toilettes ? Ah mais non, un petit sms de rien du tout. Un cheval de Troie, dans lequel se cachait mon quotidien professionnel qui ne demandait qu’à sortir et à pourrir mes congés : « Je vous ai envoyé un e-mail. Pourriez-vous y répondre ? ». Même pas de merci. Aucune excuse. C’est comme si le patient savait qu’il fallait mettre le strict minimum dans la missive. Non pas pour alerter ma conscience professionnelle. Juste pour titiller ma curiosité.

« Y a qu’à ne pas regarder »

Réaction en chaine, dès que l’on ouvre sa boite mail, avec son smartphone, c’est compliqué. Il faut faire la mise à jour pour voir la pièce jointe. Sans crier gare, on se retrouve à allumer son ordinateur et à juste répondre à un ou deux mails. Le piège à con. Tout ça pour annuler un rendez-vous, car il part en vacances et qu’il faudrait éventuellement un rapport urgent pour la mutuelle. On respire à fond. On se dit que cette fois-ci, c’est la bonne. À trois, on déconnecte. 1. 2. 3. Ah zut, le satané engin se met à vibrer, un numéro inconnu. Évidemment, il laisse un message vocal. On fait quoi ? Et si c’était important ? Ou pas du tout relié à mes occupations professionnelles ? Et paf ! On se met à écouter les huit messages vocaux et à répondre à tout le monde.

Vous l’aurez compris, à moins de noyer le téléphone dans le vieux port de l’Île de Ré, et de faire la gueule à son ordinateur pour éviter de l’allumer, il n’y a pas moyen de complètement déconnecter. Certains me diront que pourtant, ce n’est pas si compliqué. « Y a qu’à ne pas regarder ». Certes, pour l’un c’est facile. Pour moi, une torture.

En conclusion, 72 heures déconnectées, sur deux semaines de vacances. Cela a été mon record personnel. Et j’en suis fier. Je me soigne, j’envoie les gens balader, j’arrive à prendre un peu de temps pour moi. On dit que les cordonniers sont souvent les plus mal chaussés. Croyez-le ou non mais, du coup, pour la rentrée, j’ai décidé de prolonger un peu l’état d’esprit : on met des limites, ne plus travailler le soir, ni le week-end. Finies les vieilles habitudes, je n’irai plus jusqu’au bout du monde, et ne me ferai pas teindre en blonde si on me le demandait, mais par contre, il faut que je vous laisse, le téléphone sonne.

T. Persons

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