Chronique d’un psy : « À quoi bon faire des études ? »
Dans son style particulier, T. Persons se questionne sur la valeur des études de psychologie clinique lorsqu’il s’agit de chercher un travail et d’exercer sa profession.
Qu’on se le dise, je suis d’une nature joviale, calme, assez réflexif, un peu obtus et généralement, j’arrive à prendre du recul sur pas mal de situations. Néanmoins, il y a des éléments du quotidien qui, tel un violon strident dans une intro de chanson de Louise Attaque, arrivent à me faire sortir de mes gonds. Aujourd’hui, de nature curieuse, j’ai épluché les annonces d’emploi et je suis tombé sur un service de santé mentale qui cherchait un bachelier pour faire de la psychothérapie…
C’est questionnant, non ? Cinq ans d’études, bientôt une année supplémentaire de stage professionnel, souvent un troisième cycle en psychothérapie et, bien évidemment, l’acquisition d’un visa et d’un agrément qui est aussi aisé à obtenir que des papiers de naturalisation aux États-Unis et tout ça pour quoi ? Pour se retrouver sur le carreau, parce qu’on est trop cher, parce que d’autres peuvent exercer la psychothérapie alors que l’exercice de la psychologie clinique devient aussi réglementé que la plantation de bambou dans le Brabant Wallon.
Je vous vois déjà venir : « Non mais y’en a des biens ». Certes, et parmi mes collègues psychologues clinicien·ne·s en ordre d’exercer, il y en aussi des biens. La question n’est pas tellement d’être un gros crétin hautain qui juge par la longueur du diplôme ou de la formation, mais de se questionner profondément : à quoi bon jouer les règles du jeu si les employeurs s’en fichent complètement ?
"Nous voilà donc piégés à respecter de plus en plus de contraintes"
Non, mais T. Persons, vous vous gourez complétement ! On cherche des assistants psychologues qui feront de la psychothérapie, mais de manière tout sauf autonome sous la supervision d’un psychologue clinicien ! Trouvons donc une tête de pipe payée au juste barème pour superviser le tout, alors qu’on finance les soins psy au rabais. La bonne idée ! Le problème, voyez-vous, c’est que les psy n’ont peut-être pas envie de superviser ? On peut postuler que si l’on se lance dans des études pareilles, c’est pour faire de la clinique, non ?
Nous voilà donc piégés à respecter de plus en plus de contraintes - certes légitimes et nécessaires – alors que le voisin exerce en toute impunité sans trop se soucier de perdre son visa ou d’exercer illégalement la psychologie clinique. Et puis, c’est une chose de le savoir, les employeurs truanderont toujours pour payer moins, mais là, ce qui est choquant, c’est que ce n’est pas caché. Dans le profil de fonction, on ne joue même pas sur les mots. On décrit les fonctions d’un psychologue clinicien, mais clairement, on indique qu’on ne veut pas d’un psy, mais d’un bachelier. Et ça passe crème…
En conclusion, ami·e·s qui vous lancez dans des études de psychologie clinique, réfléchissez ! Soyez malins, faites les études, les plus courtes possibles, de préférence une formation en ligne, devenez coach, psychothérapeute, aidant, accompagnateur des âmes en détresse et exercez en tout impunité ! N’ayez crainte, du boulot de psy, il y en a, moins vous serez formés, plus vous trouverez des offres ! Mieux ! Soyez bénévoles, faut pas être psy pour savoir écouter ! Ne vous cassez pas la tête à vous former, cela ne rapporte que des ennuis et visiblement, cela ne sert à rien…
T. Persons
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