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Chronique d’un psy : « Le psy : objet du politique ? »

02/11/23
Chronique d'un psy : « Le psy : objet du politique ? »

Alors que 2024 et les élections politiques pointent le bout de leur nez en Belgique, T. Persons nous fait part de son impression sur la manière dont l’homme politique s’approprie la santé mentale.

Tout comme on n’échappe pas aux grelots de Mariah Carey à partir de la fin du mois de novembre, amies et amis, préparez-vous pour le grand cirque politique qui précède les élections ! Sujets phares pour cette nouvelle campagne ? Immigration, sécurité et santé mentale. Alors qu’il y a quelques années, on confondait le psychologue avec le podologue, nous voilà propulsés sur le devant de la scène, bien aidés, il faut le dire, par les années Covid.

Pour vous dire, je n’ai pas de mal à me sentir instrumentalisé, si c’est pour que le citoyen en ressorte avec une prise en charge à moindre frais, une accessibilité à des soins de qualité et que l’on valorise les métiers du social et de la relation d’aide. Qu’on nous mette à toutes les sauces, je m’en masse. Par contre, là où ça me donne envie de me récurer les tympans à coups de brosse à dent trempée dans l’eau de Javel, c’est quand je sens qu’on m’utilise à d’autres fins, par exemple, lorsque l’on se dit que le psy et le monde qui gravite autour de la santé mentale, ça rapporte des points, de la visibilité et que ça appâte l’électorat. De la publicité, du marketing politique, rien que pour vos yeux !

Est-il possible d’à ce point méconnaitre les soins de santé mentale ?

« Mais enfin, T. Persons, qu’est-ce qui vous fait dire cela ? », me demanderez-vous, le ton emprunt d’une naïveté que l’on ne retrouve que dans les cours de récré et dans les chansons de Grégoire. Ni plus ni moins que la sortie politique de la semaine des Engagés, qui ont mis la sauce niveau démagogie, avec une proposition phare : prenons soin de la santé mentale des jeunes en leur proposant douze séances gratuites chez le psy. On est quand même précis dans la proposition, on parle de téléconsultation, d’accessibilité avec – je cite – des bus ou des camionnettes qui circuleront aux abords des écoles… Rien que ça.

Pour les moins initiés, il faut comprendre quelque chose : ce que l’on vous propose, là, c’est de rajouter une couche à quelque chose qui existe déjà. Par exemple, c’est vous promettre que si vous votez pour moi, je ferai en sorte que la terre tourne autour du soleil. Et peut-être même que si je pète les scores, je ferai mon possible pour que la Lune tourne autour de la Terre. Démago ? Est-il possible d’à ce point méconnaitre les soins de santé mentale ? Apparemment, oui. En effet, depuis quelques années, les politiques savent que la santé mentale, c’est vendeur. Ça fait chic comme promesse, de se dire qu’on pense aux pauvres jeunes traumatisés par le Covid. Enfin, on parle surtout à leurs parents, et à ceux qui ont plus de 18 ans. Si ça ne peut pas voter, est-ce que c’est vraiment utile ?

En conclusion, vous me trouverez bien cynique, certainement. Vous me direz que se préoccuper de la santé mentale, c’est déjà une première étape. C’est maladroit, mais peut-être n’y a-t-il pas de volonté de faire du mal ? Le problème, c’est qu’à force de pondre des propositions qui sont complètement déconnectées du terrain, on finit par, malgré tout, les implanter, sans consulter qui que ce soit… N’allez pas croire que ce qui m’enchante peu dans tout ça, c’est de me balader autour des écoles en camionnette blanche pour demander à des enfants s’ils veulent une consultation. Non, ce qui me désole, c’est que les gens vont voter pour quelque chose qui ne servira à rien, parce que cela existe déjà, et que derrière l’idée se cache certainement une plate pirouette politique.

T. Persons

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