La santé mentale chez les professionnels du social
Récemment, je lisais une interview évoquant la santé mentale chez les professionnels du social et de la santé. Elle va mal … Rien d’étonnant si l’on considère la difficulté de ces métiers, les conditions dans lesquelles ils sont exercés, les pressions de plus en plus fortes, etc. Jusque là rien de neuf, malheureusement. Les choses ont même plutôt tendance à empirer. Tout comme le fait que de trop nombreux professionnels éprouvent des difficultés à appeler à l’aide. Et c’est bien dommage...
Choisir un métier orienté vers le soin au sens large, qu’il soit de l’ordre de la santé physique, mentale, du travail social, éducatif, … signifie souvent que nous avons une disposition naturelle à aimer prendre soin de l’autre.
Malheureusement, cette disposition va généralement de pair avec une tendance à se faire passer après. Après tout le monde, après le travail, après sa famille, souvent même en dernier. Le cordonnier est effectivement parfois le plus mal chaussé.
– Lire aussi : Travailler dans la santé et le social : lequel de ces métiers de contact est fait pour vous ?
Respecter nos besoins pour continuer à fonctionner
Ne pas se rendre compte que nous sommes là aussi, que nous avons aussi des besoins, qu’il est important de les respecter si nous voulons pouvoir continuer à fonctionner est essentiel. On connaît l’adage : qui veut aller loin prend soin de sa monture. Partant de là, une autre chose est également essentielle : admettre que nous aussi, nous avons besoin d’aide à certains moments. Que ce n’est pas parce que l’on soigne que l’on ne peut être soigné.
Nous sommes tous dans les deux camps
Nous pouvons avoir tendance à diviser le monde en deux camps : ceux qui aident et ceux qui reçoivent de l’aide. Or, rien n’est jamais aussi simple. Nous sommes tous dans les deux camps. Un jour nous allons être la personne qui procure de l’aide et le même jour nous pouvons être la personne qui reçoit de l’aide. Être soignant, même au sens large, ne nous transforme pas en personnages invulnérables. Que du contraire. Soigner au sens large demande énormément de vulnérabilité de notre part.
– Lire aussi : Le courage de la vulnérabilité en tant que travailleur social
Courage, vulnérabilité … et fatigue psychologique !
Nous cheminons avec des personnes qui ont besoin de notre aide à certains moments particulièrement difficiles de leur vie. Pour être à même de les aider au mieux, nous devons nous ouvrir à elles, cette vulnérabilité demande beaucoup de courage et ouvre bien souvent la porte à d’énormes remises en questions, des avancées personnelles qui peuvent être épuisantes. En outre, nous avons aussi parfois besoin de « digérer » les situations vécues par les personnes avec qui nous travaillons. Qui plus est, les conditions dans lesquelles nous travaillons, les pressions que nous subissons viennent ajouter une dose de stress à un métier déjà éprouvant par nature.
Il peut être mal vu de demander de l’aide
La culture de notre société actuelle fait qu’il est mal vu de revendiquer son besoin d’aide. En effet, ce serait perçu comme une faiblesse. Qu’importe. Oser, c’est aussi décider que le regard des autres ne dictera pas ses propres actes. Oser c’est aussi décider de se faire passer en premier et de ne pas baisser les yeux devant ceux qui ricaneraient, bien souvent car ils n’osent pas eux-mêmes. Et oser reconnaître que l’on a besoin d’aide demande énormément de courage, car c’est avouer sa propre vulnérabilité, d’autant plus lorsqu’on travaille à aider d’autres personnes.
– Lire aussi : Suicide : « Il y a un tabou autour de la santé mentale des soignants ! »
Le courage de cheminer avec humilité
Ayons le courage de cheminer avec humilité dans cette voie qui est la nôtre, de reconnaître que l’on peut aider et avoir soi-même besoin d’aide, être soignant et soigné, que nous sommes tous dans les deux camps. Notre profession ne nous impose pas d’être invulnérable. C’est même le contraire. Notre profession nous demande d’être vulnérables et en l’exerçant, nous vivons des situations que nous ne pouvons pas toujours, humainement, gérer seuls. Ayons l’audace de le reconnaître, notre chemin en sera facilité, nous marcherons en étant plus légers.
MF - travailleuse sociale
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