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Travailleur social indépendant, ton travail a aussi de la valeur !

05/07/22
Travailleur social indépendant, ton travail a aussi de la valeur !

Récemment, j’écrivais à propos de la valeur financière du travail, surtout en ce qui nous concerne nous, travailleurs sociaux, à qui on a de longue date inculqué une culture de la vocation professionnelle, où parler d’argent n’a pas bonne presse. Toujours récemment, j’ai lu plusieurs articles et interviews où des travailleurs sociaux indépendants font part de leurs hésitations lorsqu’il est question d’honoraires, voire même se justifient quant aux tarifs qu’ils pratiquent. Sérieusement ?

Hormis certaines professions, comme celle de psychologue ou logopède, il est vrai que le secteur du social est traditionnellement un secteur salarié. Décider de devenir travailleur indépendant lorsqu’on est professionnel du social, c’est déjà faire un énorme saut dans le vide, peut-être plus important que dans d’autres secteurs, qui offrent plus « naturellement » cette possibilité. Nous, il faut le dire, nous avons l’habitude du confort du salariat, malgré les difficultés afférentes.

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Être indépendant porte bien son nom

Oui, vraiment, devenir indépendant porte bien son nom. C’est faire le choix de l’indépendance financière et de tout son corollaire, à savoir être son propre patron, supporter intégralement son coût « salarial », payer ses propres cotisations sociales, impôts, assurances diverses venant suppléer à la mutuelle, dont la couverture est bien trop faible. C’est aussi prévoir pour sa pension, beaucoup plus qu’un travailleur salarié, sans oublier ses congés, maladies éventuelles, etc. Le tout en n’oubliant pas de penser à faire bouillir la marmite ! Et à rémunérer son travail « pour de vrai ».

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Une foule de frais

Etre travailleur indépendant, c’est se rendre compte qu’il faut financer et amortir ses outils de travail : ordinateur, téléphone, voiture, etc. Mais aussi se faire connaître : site web, inscriptions à différents répertoires, etc. C’est aussi prendre en compte le fait qu’on est réellement rémunéré uniquement lorsqu’on preste / vend. Autrement dit, que tout le travail préalable ne sera pas rémunéré si aucune prestation n’a lieu ! Alors que, pour un travailleur salarié, il le serait. Et j’oublie certainement une multitude de choses … En plus de ces frais, être travailleur indépendant, c’est devoir estimer la valeur de son travail. Autrement dit, combien vaut une heure de mon travail, de mes compétences, connaissances, de mon expérience ?

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Un risque considérable

Et c’est là que les choses se corsent souvent. Il est assez fréquent d’entendre, ou de lire, que l’on ne veut pas « se faire du fric sur le dos de … », ou qu’on ne veut pas « arnaquer les gens ». Au point que, parfois, certains en oublieraient qu’ils doivent gagner leur vie et que faire le choix de l’indépendance, c’est aussi prendre un risque considérable, ne fut-ce que par le fait qu’un indépendant a, à terme, beaucoup moins de droits sociaux qu’un salarié, malgré le fait qu’il cotise également au système social.

Syndrome de l’imposteur ?

Syndrome de l’imposteur ? Culture de la vocation ? Gène ? Pas de préparation à cette possibilité d’exercer durant les études ? Seuls les intéressés pourront répondre à cette question complexe, qui renvoie aussi parfois à l’estime que l’on a de soi-même. Il y a également la croyance que seules les personnes financièrement démunies ont besoin de recourir aux services d’un travailleur social. Rien de plus faux. La vie actuelle se complexifie tellement, surtout au niveau administratif, que n’importe qui peut être vite perdu, particulièrement en prenant de l’âge. Les pressions sont aussi terribles sur les familles, les problématiques de santé mentale explosent et touchent, comme ça a toujours été le cas, tous les milieux. A nouveau, la liste est certainement beaucoup plus longue que celle que je dresse.

 Lire aussi : Travail social : le syndrome de l’imposteur

Pourquoi un tel débat ?

Il existe depuis toujours des médecins indépendants, des psychologues indépendants, des accueillantes d’enfants indépendantes, et la question n’a, me semble-t-il, pas fait autant débat. Pourquoi un travailleur social indépendant ne pourrait-il pas exister, et surtout, pour quelle raison son travail ne devrait-il pas être rémunéré à sa juste valeur et à la juste valeur de son réel coût ?

MF - travailleuse sociale

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Commentaires - 1 message
  • Je suis absolument d'accord avec vous sur toute la ligne ! Je pense que cela vient mettre en évidence toutes les représentations que la société peut avoir du travail social, à commencer par la représentation que beaucoup de travailleurs sociaux ont d'eux-mêmes. Toute une réflexion à mener et des idées à déconstruire !

    Bibi19851120 mercredi 6 juillet 2022 14:56

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