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Chronique d’un psy : « Peut-on remplacer son psy par une intelligence artificielle ? »

02/03/23
Chronique d'un psy : « Peut-on remplacer son psy par une intelligence artificielle ? »

Alors que Chat GPT vient révolutionner notre quotidien, T. Persons se pose la question : pourra-t-on un jour imaginer que le travail du psychologue soit facilité, voire remplacé par une machine ?

Aujourd’hui, après avoir ruminé 30 minutes en me demandant ce que j’allais bien pouvoir écrire pour le Guide Social cette semaine, je l’avoue, je le concède : j’ai craqué. Non, je n’ai pas vidé l’ensemble de ma cachette à sucre en écoutant en boucle l’album 77/87 de Francis Cabrel, mais sur l’échelle de la honte, on s’en rapproche. J’ai (gentiment) demandé à une intelligence artificielle si elle pouvait me donner une idée de chronique.

Il faut dire, pour avoir passé deux soirées à lui faire rédiger mes mails pour me rendre compte qu’elle était beaucoup plus efficace que moi, j’ai commencé à m’interroger. Du haut de mes compétences intellectuelles, je me suis toujours senti à l’abri, protégé d’une automatisation par mon petit savoir. L’industrialisation a eu la peau du travail manuel et naïvement, je me suis toujours dit que le progrès s’arrêterait là où la pensée, la réflexion, la critique commençaient.

Mal m’en a pris. De fait, une intelligence artificielle écrit rapidement, et mieux. Elle fait l’économie des phrases longues, des jeux de mots pourris et des comparaisons disproportionnées. Je me suis donc demandé si, finalement, on pouvait noircir un peu plus le trait. Et si, en plus d’écrire à ma place, mon IA pouvait faire mon job, celui de psychologue clinicien ? De fait, plus de problème de standardisation de la séance, pas d’erreur humaine, un protocole clair. Peut-on finalement se demander qui serait le plus efficace, un cognitivo-comportementaliste ou un ordinateur ?

"Serons-nous, dans quelques années, condamnés à superviser des machines qui feront le travail à notre place ?"

Et l’aspect humain là-dedans, me direz-vous. L’empathie ? Le feeling ? Je ne sais pas vous, mais après avoir un peu discuté avec mon IA, je serais incapable de vous dire qu’elle est dénuée d’émotion. Certes, la technologie n’est pas encore au point, mais il ne faudrait pas que le Conseil fédéral des professions de soins de santé mentale ne tarde trop à réglementer la profession d’assistant en psychologie, parce que Microsoft et Google auront bientôt trouvé une solution encore moins onéreuse pour nos hôpitaux et institutions.

Soit, serons-nous, dans quelques années, condamnés à superviser des machines qui feront le travail à notre place ? J’en vois déjà certain rigoler en me demandant de revoir le dosage de mes petites pilules bleues. Faudrait-il rappeler que si l’on nous avait dit, il y a cinq ans, que la vidéo-consultation rentrerait dans notre pratique quotidienne, certain·e·s collègues psy m’auraient regardé avec autant de crédit que l’on devrait accorder à Vincent Cassel lorsqu’il nous parle de masculinité ?

En conclusion, je ne sais pas si, un jour, les robots règneront sur la santé mentale, renvoyant le psychologue clinicien au rang d’intellectuel has-been qui n’est plus d’aucune utilité. Je me rassure comme je peux, en me disant qu’en attendant de me piquer mon travail, il aura eu le bon goût d’être à côté de la plaque lorsqu’il s’agissait de me donner des idées de chronique… Ou alors, il était vraiment perspicace et je suis à côté de la plaque ? Ou alors, peut-être essayait-il de ménager mes angoisses en produisant un contenu médiocre ? Ou alors…

T. Persons

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